Mohamed Ali Marouani, citoyen de la Méditerranée et du Monde arabe
Lorsqu'il fut reçu Major de la promotion 1994 de l’Institut National Agronomique de Tunis avec la médaille d’argent de l’Organisation des Nations Unies pour l’Agriculture et l’Alimentation en poche, plusieurs de ses professeurs l’encouragèrent à rester au pays pour y poursuivre ses études. Il fut, un moment, tenté de suivre leurs conseils d'autant plus qu'il se sentait complètement dans son élément à Tunis. Mais il aspirait à vivre de nouvelles expériences… Et c'est ainsi que son choix s’est porté sur Montpellier où il a suivi simultanément un Master of Science au sein du CIHEAM et un DEA à l’ENSA Montpellier.
En 1997, ces deux diplômes en poche, il postule à un stage au sein de la Commission européenne. Il est parmi les deux Arabes et Africains sélectionnés. Il est affecté à la cellule prospective de la Direction Générale de l’Agriculture. Après une brève période d’essai, ses supérieurs se résolvent à lui confier les dossiers de négociation euro-méditerranéens. C’est le point de départ de l'aventure méditerranéenne…
Il renonce à faire un séjour doctoral à Berkeley après les évènements du 11 septembre
Ressentant le besoin d’approfondir ses connaissances sur l’intégration régionale en Méditerranée à l’issue de ce stage, il se lance dans la rédaction d’une thèse sur l’impact des Accords Euromed sur l’emploi en Tunisie. Son laboratoire d’accueil, DIAL, est un groupement d’intérêt scientifique fondé par l’INSEE, l’IRD et la coopération française. Avec un pied dans l’académique et un pied dans le conseil en politique publique. En 2001 il obtient une bourse Fulbright pour réaliser un séjour doctoral d’un an à l’Université Berkeley. Au moment d’y aller, en septembre, la Professeure qui l’accueille l'en dissuade en raison du climat qui risque de n’être pas propice pour un étudiant arabe après les évènements du 11 septembre qui venaient de se produire…
Il soutient sa thèse de doctorat en décembre 2003 et décide de rester à Paris pour enseigner à l’Université Paris-Dauphine. En 2004, le Centre de recherches pour le développement international canadien l’embauche comme administrateur principal du secrétariat d’appui à la recherche économique, basé à Dakar. Et lui offre la possibilité de travailler à mi-temps, entre Paris et Dakar. C’est pour lui l’occasion de concilier recherche et connaissance du terrain. Et de découvrir et de sillonner l’Afrique. De cette expérience est né son premier livre, "The Policy Paradox in Africa", qui porte sur les liens entre recherche économique et prise de décision publique [Africa World Press, 2007].
Au terme de cette expérience, il postule au concours de maître de conférences et est sélectionné par l’Université Paris1-Panthéon-Sorbonne au sein de l’Institut d’études du développement. On lui demande rapidement d’être responsable des relations internationales puis également directeur du master « expertise économique du développement ». Il collabore également avec Sciences-Po Paris où il participe au lancement du master Carrières Internationales. Outre ces deux institutions, il a enseigné en France à l’ENA-IIAP, à Sup de Co Paris et a été professeur invité en Allemagne, en Egypte, au Liban, en Tunisie, etc.
"On peut se rendre utile au pays sans y résider"
Ses recherches portent essentiellement sur l’évaluation d’impact des politiques économiques et sociales. Son laboratoire d’accueil est l’UMR « développement et société » de l’Université Paris1, mais il est aussi chercheur associé à l’UMR DIAL (IRD/Paris-Dauphine), membre de la chaire de développement durable de Sciences-Po et Research Fellow de l’Economic Research Forum, réseau de recherches régional basé au Caire. Il est également membre du comité éditorial de la Review of Middle East Economics and Finance.
Son expertise en évaluation des politiques publiques l’a amené à travailler régulièrement comme consultant pour la Banque mondiale, ainsi que pour d’autres organisations de coopération telles que l’OCDE et le PNUD, etc. Sa mission consiste principalement à conseiller les gouvernements sur leurs politiques agricoles, commerciales, de l’emploi, etc. Au niveau de la région, il a notamment participé au développement de modèles d’évaluation d’impact des politiques sur l’emploi au Maroc, en Tunisie et actuellement au Liban et en Syrie. "Mes différentes missions à Tunis où j'ai travaillé en collaboration avec plusieurs ministères (agriculture, commerce, développement économique) m'ont permis de me rendre compte qu’on peut être utile au pays même en n’y résidant pas ! ", reconnait-il.
Ce déclarant citoyen de la Méditerranée et du Monde Arabe, il croit possible de concilier à la fois des liens forts avec "nos voisins européens (y compris la Turquie) avec une intégration plus poussée du Monde Arabe, en commençant déjà par le Maghreb". "L’intégration, estime t-il, peut contribuer à solutionner le problème de l’emploi des jeunes qui se pose avec acuité dans tous les pays de la région". Membre du réseau YML lancé à Tunis l’année dernière, membre du GDRI du CNRS « développement des recherches économiques euro-mediterranéennes (DREEM) », il participe aux activités de l’Institut de prospective économique du monde méditerranéen (IPEMED) et est membre du conseil d’administration du Cercle des Economistes Arabes créé cet été à Paris, "dans l’espoir que de nouvelles idées pourront contribuer à façonner un espace euro-arabo-méditerranéen plus prospère et plus juste", précise t-il.
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