L’asfaxie
Terme médico-social signifiant le ralentissement progressif de la circulation d’oxygène dans le corps des habitants de Sfax et de ses environs. Les premiers cas cliniques ont été observés, mais non décrits, dans le courant des années 1950. Alors que la Tunisie finissait de signer sa liberté et son indépendance, Sfax signait sa condamnation à la non-vie. Les symptômes sont une suffocation, une irritation au quotidien, des maux en chœur aux corps et au cœur. Les patients en deviennent malades et les moins chanceux succombent. Le taux de personnes atteintes de cancer et de mortalité bat son comble. Si vous voulez des chiffres alors appelez la première personne de la région que vous connaissez et demandez-lui si sa famille n’a pas encore été visitée, au moins une fois, par l’asfaxie. Frappée à un point tel que le cancer est aux sfaxiens ce que la grippe est au reste du monde ! Les discours de « allah ghaleb, c’est la vie » déambulent de bouche en bouche.
C’est la vie? Non, c’est la mort! La mort qui frappe à toutes les portes, arrachant à vive allure enfants, jeunes et moins jeunes, lâchant des menaces toutes griffes dehors aux générations à venir. Aussi faut-il que l’on redouble d’effort dans le diagnostic précoce des maladies cancéreuses à Sfax, scandent les médecins. Le mal de dos n’est pas la maladie du siècle, une perte de poids n’est pas toujours liée au stress, et les maux fréquents de tête ne sont pas toujours l’effet de fatigue chronique. L’asfaxie est un paramètre que l’on devrait rajouter sur les fiches des patients, voire faire bénéficier ces derniers d’une carte d’asfaxié.
Malheureusement, et contrairement à l’asphyxie qui finit par toucher la conscience de celui qui la contracte, l’asfaxie n’a rendu inconscients que ceux qui ne l’ont jamais éprouvée. Sfax croule sous la pollution, sombre dans la saleté et l’anarchie les plus totales sous le regard ou plutôt l’aveuglement de tous. Tout le règne animal et végétal est entrain de périr d’une mort lente sous le long empire de décideurs lents. Le 14 janvier 2016, la société civile a manifesté à Sfax pour que cette ville ne soit plus délaissée, ni par les siens ni par le reste du pays. Nous devrons tous redoubler d’effort pour que nos enfants, dans les quatre coins du pays et ailleurs, jouissent de bonnes infrastructures dans un environnement sain.
Compatriotes, l’asfaxie nous comprime les veines mais le cœur continue à battre dans l’espoir que vous réagirez à cet appel et que vous soutiendrez notre région.
Vive la Tunisie!
Hajer Abdelkafi Kamoun
Chercheur scientifique
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