Personne n’échappe à la vindicte d’israel!
Benjamin Netanyahou ne dévie guère de sa sempiternelle habitude : pour lui, chaque initiative diplomatique, chaque critique de sa politique est perçue comme une menace pour Israël. C’est son fonds de commerce : l’Etat d’Israël est constamment en danger… en dépit de ses bombes atomiques et du sixième sous-marin que vient de lui offrir l’Allemagne.
Une fois encore, le Premier Ministre de ce gouvernement israélien - formé d’extrémistes et de colons - s’en est pris à la courageuse ministre des Affaires Etrangères suédoise Mme Margot Wallström dont le pays a reconnu l’Etat de Palestine en 2014 et œuvre pour la solution à deux Etats. Elle a osé demander une enquête pour déterminer si Israël est coupable d’exécutions extrajudiciaires de Palestiniens. L’Union Européenne paralysée par l’Histoire, travaillée surtout par les lobbys et ne tenant aucun compte des Arabes, ne lui a guère emboîté le pas. Condamner Israël qui se fait juge, procureur et exécuteur des Palestiniens devrait pourtant rallier tous les hommes doués d’une conscience. Il n’en demeure pas moins que, pour Netanyahou, les propos de la ministre suédoise sont « scandaleux, immoraux et injustes ». Or, ces qualificatifs ne s’appliquent-ils pas précisément à la campagne actuelle de meurtres que mène sa clique au pouvoir ?
L’an dernier, Mme Wallström a soutenu que « la situation critique » qu’Israël impose aux Palestiniens – situation faite d’assassinats, de vols des terres, de check points humiliants, de destructions de maisons, d’intrusions nocturnes, de routes séparées, d’emprisonnement d’enfants-… conduit à la radicalisation islamiste.
De leur côté, les Etats Unis, l’Union Européenne et l’ONU se sont « inquiétés » de la violence extrême exercée par l’Etat sioniste en réponse au soulèvement palestinien contre l’occupation.
Des chiffres qui glacent le sang
A l’appui de la déclaration de Mme Wallström, les chiffres parlent d’eux-mêmes. Depuis octobre 2015 et jusqu’au 12 janvier 2016, l’armée israélienne ou des Israéliens armés – généralement des colons encouragés par le gouvernement - ont tué au moins 133 Palestiniens, les Palestiniens ayant de leur côté tué 21 Israéliens et un Américain rapporte le New York Times (12 janvier 2016).
Pour les 12 premiers jours de 2016, l’armée israélienne a assassiné au moins 8 Palestiniens en Cisjordanie selon l’ONG Palestine Solidarity Campaign de Londres (PSC) qui précise que depuis octobre 2015, plus de 150 Palestiniens ont été assassinés, en majorité des adolescents des deux sexes et même des enfants comme Ahmed Abou al Hommus (12 ans) qui a reçu une balle en pleine tête début janvier. Au total, plus de 13500 Palestiniens ont été blessés par l’armée sioniste en Cisjordanie et à Gaza. Selon l’ONU, en 2015, les assassinats de Palestiniens par Israël ont atteint un sommet inégalé depuis dix ans. Gideon Levy (Haaretz, 17 janvier 2016) donne plusieurs exemples de ces exécutions sommaires de Palestiniens, sans la moindre raison parfois ! Ainsi, l’étudiante en cosmétologie Samah Abdallah âgée de 18 ans a été tuée par les soldats de l’armée israélienne. Ceux-ci auraient tiré « par erreur » sur la voiture de son père, suspectant un jeune piéton de 16 ans, Alaa al Hashhash, de vouloir les poignarder et qu’ils assassinèrent, lui aussi. Et Levy de conclure : « Oui, Israël exécute les Palestiniens sans procès. En 2016, il ne faut pas être Adolf Eichmann pour être exécuté en Israël. Il suffit d’être une jeune Palestinienne avec des ciseaux à la main ». On rappelle ici le meurtre de Youssèf Abou Aker Shawamrah, âgé de 14 ans, par un soldat israélien en mars 2014, face au village de Deir al Assal al Fouka alors qu’il ne faisait que ramasser des chardons à 6h30 du matin pour nourrir sa famille.
Un débat au parlement britannique
Cette atroce série d’exécutions de Palestiniens et l’impunité de leurs auteurs interpellent ceux qui ont encore une conscience face aux odieux crimes d’Israël. C’est ainsi que le 6 janvier 2016, à l’initiative de Mme Sarah Champion, députée travailliste, un débat a eu lieu au Parlement britannique concernant la question de l’emprisonnement par Israël d’enfants palestiniens et leur comparution devant les juridictions militaires en dehors de Cisjordanie. Ce qui est un crime de guerre au regard des conventions de Genève. La députée a demandé au gouvernement anglais de dresser « la liste de surveillance » de ceux qui sont responsables de ces crimes afin de leur demander des comptes et éventuellement de les poursuivre si jamais ils entraient au Royaume Uni. Au cours de ce débat, la députée Caroline Lucas (Parti des Verts) a suggéré « de passer à l’action » et demandé la suspension de l’accord d’association UE-Israël dont une clause précise que si les droits humains ne sont pas respectés, cet accord est suspendu. Trois députés conservateurs - du parti au pouvoir - ont aussi critiqué la politique d’Israël et l’un d’entre eux, Tania Mathias, a relevé une « triste coïncidence » : ce débat à Westminster a lieu la semaine même où l’envoyé des Nations Unies pour les droits de l’homme en Palestine a présenté sa démission. Celle-ci est motivée par le refus d’Israël de l’autoriser à entrer au pays. Au cours de la discussion parlementaire, le soutien à Israël a été, comme prévu, faible car affirme le journaliste Ben White « Israël continue de perdre des amis à l’étranger ». Le député travailliste Ian Austin a fait rire tout le Parlement quand il a nié les arrestations d’enfants palestiniens de moins de 12 ans.
Netanyahou attaque Ban Ki-Moon
Le 26 janvier 2016, le Secrétaire Général de l’ONU a déclaré qu’il est dans « la nature humaine » de réagir à l’occupation et que « l’Histoire prouve que les peuples résisteront toujours à l’occupation ». Devant le Conseil de Sécurité, il devait dire, la semaine dernière, que « la frustration et les griefs des Palestiniens ne cessent de croître sous le poids de près d’un demi-siècle d’occupation. L’ignorer ne fera rien disparaître. Nul ne peut nier que la réalité quotidienne de l’occupation provoque colère et désespoir, véritables moteurs de la violence et de l’extrémisme qui détruisent tout espoir d’une négociation portant sur la solution à deux Etats ». Le Secrétaire Général se dit « troublé » par les déclarations de hauts responsables israéliens visant à l’abandon de la solution à deux Etats. En réaction, Netanyahou a prétendu que l’ONU a perdu depuis longtemps toute neutralité et tout poids moral accusant M. Ban Ki-moon d’ « aider le terrorisme » et éructant que « les assassins palestiniens n’ont aucune envie de construire un pays. Ils veulent détruire un pays et ils le disent ouvertement… ls ne tuent pas pour la paix et ils ne tuent pas pour les droits de l’homme ».
Face aux attaques et à la déformation de ses propos exprimant une vérité historique incontestable, il a publié le 1er février 2016, un point de vue sur les colonnes du New York Times. Il condamne catégoriquement le terrorisme, appelle les Palestiniens à s’entendre, avertit Israël des conséquences d’un plus grand isolement et ajoute : « Il est inconcevable que les mesures de sécurité seules arriveront à arrêter la violence ». Il note que la colonisation ne cesse de s’étendre et que 150 ha de terre viennent d’être déclarés « propriété de l’Etat » ce qui signifie, souligne M. Ban Ki-moon, « que cela conduira à leur usage exclusif par des colons israéliens » et il ajoute : « Dans le même temps, des milliers de maisons palestiniennes de Cisjordanie risquent la démolition à cause d’obstacles qui, pour être légaux sur le papier, n’en sont pas moins discriminatoires dans la pratique ». Et le Secrétaire Général de conclure : « Le statu quo est intenable. Maintenir indéfiniment un autre peuple sous occupation sape la sécurité et l’avenir des Israéliens et des Palestiniens à la fois ».
Israel est en guerre civile
Bien entendu, l’initiative française pour la paix du week-end dernier est brocardée par Netanyahou - d’autant que si elle n’avait pas lieu, la France reconnaîtrait l’Etat de Palestine - qui déclare à son sujet : « L’essence des négociations est le compromis et l’initiative française incite essentiellement par avance les Palestiniens à ne rien faire dans ce sens ».
Le comportement de Netanyahou s’explique notamment par son désir de satisfaire son électorat de colons et d’ultra-orthodoxes comme le rabbin Shlomo Aviner - en faveur du retour des femmes au foyer, « leur milieu naturel » affirme ce « saint » homme - que « les habits d’une fillette de trois ans inquiètent car ils peuvent amener des hommes à avoir des idées de péché » (Ariana Melamed, Haaretz, 18 novembre 2015). De plus, le Premier Ministre est actuellement face à deux Etats : celui d’Israël d’un côté et celui de Judée de l’autre. Le citoyen de ce dernier Etat est « élevé pour croire en l’autorité des rabbins, en la supériorité des commandements divins et de la Torah, au droit des juifs sur la Terre Sainte, en l’idée du peuple élu qui a le droit de priver les Arabes des leurs » écrit le chroniqueur Uri Misgav, sous le titre « Israël est en guerre civile et non dans une guerre de frères ». Pourtant, Itzhak Rabin disait que la Bible n’est pas un titre foncier. Pour l’écrivaine israélienne Ronit Matalon, « Israël ne croit plus au processus de paix avec les Palestiniens, au risque de devenir un pays juif mais non démocratique ». (Le Monde10-11 janvier 2016, p.15).
Mais si Israël poursuit de sa vindicte Mme Margot Wallström, M. Ban Ki-moon, l’UE, la France… il peut cependant compter sur un nouvel ami : Abou Dhabi où son ministre de l’Energie et nouveau ministre de l’Economie depuis le 1er février 2016 vient d’assister à une conférence et où, pour la première fois, Israël aura « une mission diplomatique officielle et visible »!
Mohamed Larbi Bouguerra