Opinions - 09.02.2016

Dans quelles conditions l’Armée Nationale peut-elle contribuer à réduire le chômage?

Dans quelles conditions  l’Armée Nationale peut-elle contribuer à réduire le chômage?

Parmi les mesures d’urgence pour la création davantage de postes d’emploi, Mr le Chef du Gouvernement a annoncé « l’enrôlement dans l'armée nationale de 30 mille jeunes, dont une grande partie sera réservée aux appelés à l'issue de leur service militaire pour réduire le chômage». A part le fait que cette mesure s’inscrit dans le cadre du Service National, on ne voit pas encore, clairement les mécanismes pratiques permettant réellement la création de ce volume d’emplois aux jeunes.

Dans l’attente de plus amples précisions, je me propose de présenter une vision globale du Service National, qui à mon avis, permettra à l’Armée de contribuer à, non seulement réduire le chômage parmi les jeunes mais aussi à réaliser plusieurs autres objectifs nationaux, non de moindre importance. Cela passe par une profonde refonte du système actuel du Service National et bien sûr par la promulgation d’une nouvelle loi. 

En Tunisie, le Service National, n’est pas seulement une nécessité vitale pour la sécurité du pays, mais présente aussi de larges opportunités, tant au profit des jeunes que de la nation. Faut-il s’y mettre pour les saisir.

Le Service National de nos jours, entre textes et réalités

Avant d’entamer les mesures proposées, il est important de rappeler certaines données de base et réalités constituant le cadre de mise en œuvre de la décision gouvernementale annoncée:

1. Le modèle d’Armée prévu par  la Constitution, déjà de 1959, et confirmé par celle du 27 janvier 2014, se base essentiellement sur la  conscription, le « Service National Obligatoire » prescrit par l’article neuf de la dite Constitution :« La préservation de l’unité de la patrie et la défense de son intégrité est un devoir sacré pour tous les citoyens. Le service national est obligatoire selon les dispositions et conditions prévues par la loi». En termes simples, ce sont les jeunes tunisiens à l’âge de la vingtaine qui doivent, dans le cadre du Service National, constituer une grande part du volume personnel de l’Armée, c’est à ces jeunes citoyens qu’incombe la défense du pays. Pour les besoins de cumul d’expérience, nécessaire aux  cadres, et de continuité du fonctionnement des structures de l’Armée, la majorité des officiers et une importante  partie des sous-officiers constituants l’ossature de l’Armée, sont, en revanche, des volontaires engagés sous contrats pour des durées déterminées, plus ou moins longues et qui sont renouvelées sous certaines conditions, dans certains cas jusqu’à l’âge de la retraite même, bref c’est l’Armée de Conscription ; par opposition à une Armée dite ʺprofessionnelleʺ ou ʺde métierʺ où les jeunes citoyens ne sont pas astreints à un Service Militaire obligatoire.

Quant aux modalités de concrétisation du système du Service National prévu par la Constitution, elles font l’objet de la loi Nr1 du 14 janvier 2004, relative au  Service National, son article deux stipule que « Tout citoyen âgé de 20 ans doit se présenter volontairement pour accomplir le service national, il demeure dans l'obligation de l'accomplir jusqu'à l'âge de 35 ans ».

Cependant, Il n’échappe à personne et surtout pas aux dirigeants du pays, le dysfonctionnement total du système de conscription et des maigres résultats enregistrés en terme de nombre de jeunes tunisiens qui se présentent pour accomplir ce devoir et surtout de ceux qui sont effectivement incorporés dans les unités des Forces Armées. En fait, depuis des années, le système de conscription se trouve en panne. Ces dernières années,  le nombre de jeunes incorporés dans le cadre du Service National, devoir constitutionnel sacré( !), ne dépasse guère le millier de jeunes par classe, soit moins de quatre mille  jeunes par an, un volume  dérisoire au vu des besoins de l’Armée qui s’élèveraient à des dizaines de milliers par an, et aussi par rapport au nombre important des jeunes tunisiens qui atteignent annuellement l’âge requis pour ce devoir national, pas moins de 60 mille jeunes.

Et là, faute de jeunes incorporés dans le cadre du Service National, on est bien loin de pouvoir atteindre l’objectif annoncé par Mr le Chef du Gouvernement. 

Quant à l’Armée, elle vit stoïquement, en silence, un grand paradoxe : d’un côté, elle doit affronter des menaces réelles, bien pesantes et accomplir des missions toujours plus élargies, toutes très exigeantes en personnel ; de l’autre, elle se trouve allouée des ressources humaines en deçà de ses besoins et dotée d’un système de recrutement qui ne peut en aucun cas permettre, à l’avenir, de réaliser les volumes de contingents nécessaires. Le comble, c’est que personne, même pas les premiers responsables du pays,  ne semble s’en inquiéter malgré la persistance et l’ampleur des menaces et l’importance des pertes humaines et économiques essuyées; déjà plus d’une centaine de victimes entre: militaires; agents de sécurité, de douane; politiciens ; citoyens civils et une soixantaine d’étrangers en visite dans notre pays et de très nombreux blessés.  L’environnement sécuritaire régional, étant des plus préoccupants, ne fait qu’empirer, une éventuelle intervention militaire occidentale en Libye en dit long sur les perspectives à venir de la région!

2. Le dysfonctionnement du système du « Service National » est essentiellement dû aux facteurs suivants:

  • la loi 1/2004 ne garantit ni universalité ni égalité, alors qu’il s’agit de deux conditions sine quoi none pour la réussite du système ; l’affectation individuelle dans le secteur privé est l’expression la plus criante d’iniquité et d’inégalité des jeunes citoyens devant un tel devoir national, auquel ceux des familles aisées peuvent facilement y échapper, car cette même loi leur permet, pratiquement, de verser un montant à la Trésorerie Générale contre l’exemption de l’accomplissement d’un an de service militaire au sein des unités militaires.
  • Quand aux affectations individuelles dans le secteur public, elles restent en deçà des larges possibilités qu’elles offrent puisqu’elles aussi, ne touchent qu’une faible frange des jeunes concernés, très rares sont les diplômés universitaires qui répondent à l’appel de ce devoir, même sous cette forme allégée du Service National;
  • l’absence de volonté chez les autorités pour imposer le respect des lois en vigueur avec la fermeté et le sérieux nécessaires, depuis des années les autorités font fi, par exemple des dispositions de l’article 17 de la Loi n°83-112 du 12 décembre 1983, portant Statut Général des personnels de l'Etat, des collectivités locales et des établissements publics à caractère administratif qui stipule que: « Nul ne peut être nommé à un emploi de fonctionnaire de l'Etat, d'une collectivité publique locale, d'un établissement public à caractère administratif:1) s'il…, 2) s'il …,    3) s'il ne se trouve en position régulière au regard des dispositions de la loi sur le recrutement de l'armée » ;
  •  l’environnement social est, lui aussi, totalement complice avec les jeunes et leur fournit toute l’aide et semblant d’excuses possibles pour se dérober à leur devoir ;

Bref sur l’échelle des valeurs de notre société, le Service National reste « sacré » et source, théorique, de fierté, mais juste pour valoriser et rehausser le texte de la Constitution, sans répercussion tangible dans les faits et la vie de tous les jours de la société.

Le Service National: une nécessité vitale pour la sécurité nationale et de grandes opportunités, tant pour le jeune que pour le pays

De ce qui précède, il apparait clairement qu’il reste difficile, si non impossible d’incorporer, sous quelque forme que ce soit,  les trente mille jeunes annoncés par Mr le Chef du Gouvernement sans procéder à une profonde réforme du concept et du système du Service National et bien sûr, sans la révision de la Loi qui en précise le cadre et les modalités pratiques de sa mise en œuvre.

La réforme proposée devrait porter sur les axes suivants:

1. Garantir dans les faits, l’universalité du service et l’égalité de tous les jeunes tunisiens devant ce Devoir constitutionnel. Ainsi, les fils des familles aisées, ceux issus des régions favorisées, aussi les lauréats des différentes universités, seront incorporés, à titre d’exemple, en tête de liste dans les mêmes conditions que leurs pairs moins fortunés et se retrouveront avec eux sur les mêmes rangs,

2. Le Service National devrait revêtir les modes suivants:

  • Le Service militaire : au sein des unités de l’Armée,
  • Un Service paramilitaire: dans les forces paramilitaires : Forces de Sécurité Intérieure (Police - Garde Nationale - Brigade de l’ordre public) ; Protection Civile ; Douane ; Services Pénitenciers et Services des Gardes des forêts,
  • Un Service Civil : au sein des institutions publiques civiles.

Nota: 

  • la durée du service dépendra du mode, par exemple la durée du service civil serait le double ou une fois et demi de celles des Services militaire et paramilitaire.
  • Tous les jeunes, y compris ceux des services Paramilitaire et Civil, suivront la Formation militaire Commune de Base (FCB).

3. prévoir des mesures incitatives pour encourager les jeunes à adhérer, de leur propre gré, au système en valorisant l’accomplissement de ce devoir, et surtout ne pas pénaliser ceux qui y répondent favorablement; au contraire il faut accorder à ceux ci des avantages par rapport à ceux qui s’en dérobent et qui après épuisement des mesures précédentes devront être même sanctionnés;

Dans ce qui suit, sont présentées quelques mesures incitatives à considérer lors d’une éventuelle réforme du Service National:  

  • pour toute candidature à un recrutement, dans le secteur public et également privé, le candidat doit présenter un justificatif de régularisation de sa situation vis-à-vis du Service National;
  • le jeune, bénéficiant d’un emploi lors de son incorporation pour le Service, a légalement le droit de reprendre automatiquement son travail dans le même poste ou un autre poste équivalent, même en surplus chez son employeur;
  • la période passée en Service National, sera comptée dans le calcul de l’ancienneté de service pour l’avancement et de la retraite et tout autre avantage, ainsi le jeune appelé n’est aucunement pénalisé ;
  • à égalité de diplômes, la priorité de recrutement  revient, de droit, à celui qui justifie avoir effectué son Devoir National  (et non tout simplement régulariser sa situation vis-à-vis du Service);
  • permettre aux filles, à titre de volontariat, d’effectuer le Service National, et dans ce cas, elles bénéficieraient des avantages accordés aux garçons ayant effectué le leur. 

4. Supprimer définitivement le mode « affectations individuelles » dans le secteur privé, mode sans fondement raisonnable et constituant un signe ostentatoire d’injustice et d’inégalité sociales;

5. Elargir les domaines du mode ʺService Paramilitaire"  dans le secteur public pour y englober le maximum d’institutions publiques paramilitaires telles que  Forces de Sécurité Intérieure, Protection Civile, Douane, Services Pénitenciers, Services des Gardes des Forêts où on a besoin, pour une partie non négligeable de leurs effectifs d’intervention sur le terrain, plutôt de jeunes en bonne condition physique et d’un niveau d’instruction leur permettant, moyennant une courte formation, d’accomplir certaines tâches n’exigeant pas une longue expérience professionnelle ;

6. De même, étendre le ʺ Service Civil ʺ au plus grand nombre d’institutions publiques déficitaires en personnel, particulièrement dans les zones reculées du pays : les Ministères de la Santé, de l’Education, de l’Environnement, les Services de Sauvegarde et de Mise en Valeur du Patrimoine et à l’Administration Publique en général;

7. Supprimer l’âge maximum, de 35 ans, d’obligation du Service National, et ce pour éviter que des jeunes ne le fuient espérant y définitivement échapper à l’occasion de son trente cinquième anniversaire.
Cette démarche permettra de:

  • satisfaire les besoins en personnel qualifié surtout dans les régions défavorisées dans certains domaines et spécialités vitales, telles que la Santé et l’Education ;
  • réduire les effectifs permanents des institutions publiques concernées, et par là, faire des économies sur les charges salariales de l’Etat, car une partie des effectifs de l’Administration publique serait constituée de jeunes accomplissant leur devoir national en mode ʺService Paramilitaire ou civil",
  • résorber les volumes de jeunes incorporés excédents les besoins de l’Armée en mode service militaire, ce qui permet de concrétiser, dans les faits,  l’universalité du Service National et de l’égalité de tous devant ce devoir.

Evidemment, les demandes de servir en mode « service civil », doivent rester soumises à l’accord de Mr le Ministre de la Défense Nationale qui ne peut y répondre favorablement qu’après satisfaction totale, d’abord des besoins des unités de l’Armée, ensuite des forces paramilitaires ; ces besoins, pour chaque classe, devront être déterminés et planifiés à l’avance;

8. Développer et renforcer davantage les ʺ Unités (militaires) de Développement National ʺ chargées de réaliser des projets de développement là où les entreprises privées, pour des raisons de manque de profit ou de sécurité, ne veulent pas ou ne peuvent pas intervenir. L’Armée tunisienne a une riche et très positive expérience dans ce domaine : l’oasis et l’infrastructure du village de R’jim Maatoug, la route du Chott jerid, celles entre Douz et Matmata, entre Remada et Dhibet ne sont que quelques exemples parmi tant d’autres réalisations réussies. D’ailleurs, effectifs permettant, on ne devrait pas écarter d’envisager l’élargissement de cette expérience à d’autres secteurs tels que la préservation de l’environnement et la mise en valeur des sites archéologiques;         

9. Développer davantage le nombre, les spécialités et les capacités des centres de Formation Professionnelle relevant du Ministère de la Défense Nationale et encourager le plus grand nombre de jeunes incorporés pour en bénéficier dans le cadre du Service National. Déjà, le Ministère de la Défense offre aux jeunes de larges occasions de formation professionnelle dans différentes régions du pays et dans des spécialités arrêtées en fonction des besoins réels du marché de l’emploi.  Ceci répond parfaitement aux besoins nationaux de formation des jeunes, entre autres, celui de requalifier les nombreux jeunes diplômés, qui sans cette mesure et par la nature de leur diplôme, restent difficilement employables, donc en marge du marché de l’emploi. 

Naturellement, il faudra accompagner cette réforme d’une consultation surtout dans les milieux des  jeunes avec l’objectif de sensibiliser le tunisien et enraciner dans la société les valeurs de ʺcitoyenneté responsable" avec axiome de base: accomplir ses devoirs, dont le Service National, pour pouvoir réclamer et jouir de ses droits de citoyenneté.  

Dans quelles conditions alors, le Service National peut-il contribuer à la réduction du chômage?
Ainsi, c’est seulement après avoir réformé tout le système de conscription en vigueur qu’on pourrait le voir contribuer significativement à la réduction du chômage.

Cette contribution se concrétisera alors, directement et davantage indirectement, sous plusieurs aspects:

  • L’enrôlement de l’ensemble des jeunes à la vingtaine d’âge, bien sûr médicalement aptes, sous les différents modes du Service National ci-dessus énumérés,
  • Le suivi par un grand nombre de jeunes, pendant le Service National, d’une formation professionnelle dans une spécialité recherchée sur le marché du travail et leur faciliter par la suite, l’accès à un emploi,
  • Permettre à tous les incorporés d’acquérir une expérience pratique dans une institution et un domaine où il aura, à l’issue du Service, la priorité dans le recrutement et aussi lui permettre de mieux appréhender la vie professionnelle en général.

Là, ce sont les principaux axes de la réforme proposée et qui sont à même d’atteindre les objectifs escomptés d’un Service National valorisé et répondant aux objectifs attendus d’un tel système:

  • Satisfaire les besoins de l’Armée en conscrits pour assurer la sécurité de la nation;
  • disposer d’une Armée de Réserve conséquente pour affronter les situations de crise et celles de guerre;
  • Fournir les ressources humaines nécessaires aux unités militaires de développement;
  • Permettre aux jeunes de suivre un complément de formation professionnelle les qualifiant au marché de l’emploi;
  • Fournir un complément de ressources humaines aux institutions de l’Etat au moindre coût;
  • Inculquer aux jeunes, d’une façon pratique dans leur vie de tous les jours pendant le service, les valeurs de citoyenneté et leur permettre de vivre les concepts de: devoir, respect de la loi, assumer sa responsabilité, courage, primauté de l’intérêt général sur le particulier, exigences de la vie en communauté, respect de l’autre même en présence de différences de quelque nature que ce soit: idéologique, religieuse, régionale, raciale, aussi les valeurs de discipline, de sérieux, de ponctualité, de propreté,… et tant d’autres valeurs dont la communauté a de nos jours grandement besoin pour le bien de tous.

Quant à l’aspect quantitatif des mesures proposées, il y a lieu d’engager en coordination avec les parties concernées des études basées sur les données numériques réelles, la population disponible (le nombre de jeunes atteignant chaque année la vingtaine), les besoins des Forces Armées en conscrits par niveau, les besoins des unités de Développement National en fonction des projets en vue et par spécialité, les besoins des institutions paramilitaires, ceux des institutions publiques concernées par le Service Civil…

En conclusion et au vu de ce qui précède il ressort ce qui suit:

a. Le Service National est une nécessité vitale pour la sécurité du pays tout en offrant de grandes opportunités tant pour le jeune incorporé que pour la nation, seulement, faut-il créer le cadre approprié et agir sur les mentalités pour en profiter, entre autres,  pour réduire le chômage;
b. Il y a urgence à réformer profondément le Service National et revoir la Loi qui en précise les modalités;
c. Le Service National en lui-même ne créera en fait que peut d’emplois, mais il contribue indirectement à en créer de très grands nombres;
d. La mise en place d’un système de Service National fiable, efficace et durable dépend d’une volonté nationale, c.à.d. d’abord de l’Etat et puis de l’adhésion de la société, des citoyens : vous, moi; lui ; votre voisin, le mien; mon fils, le votre, celui du Ministre et celui du maçon, l’originaire de maghni (région de Dhéhibet), de la Marsa, de M’dhilla, de Tabarka, de Zarzis, de tous les coins du pays; 
e. La volonté nationale et l’adhésion générale citoyenne restent le fruit d’un minimum d’audace politique, de sincérité et d’un effort pédagogique et de communication de la part des Autorités envers le peuple. Ce dernier, au fait, ne demande que l’équité entre tous et l’égalité de tous devant la loi et les sacrifices demandés. Créer les conditions favorables pour initier ces changements de mentalités incombe en premier lieu à l’Etat, concrètement, à Mr le Président de la République, Commandant Suprême des Forces Armées ; à Mr le Chef du Gouvernement et à ses collègues dont notamment  Mrs les Ministres de la Défense Nationale, celui de la Jeunesse et évidemment à nos Honorables Députés à l’ARP.

Ces autorités doivent fixer les objectifs à atteindre et dans une première phase mener une large consultation où les associations de la société civile viendront jouer leur rôle décisif d’explication, de sensibilisation et de persuasion. Ensuite, c’est à l’Etat qu’il revient d’y mettre les moyens nécessaires puis de veiller à la bonne application des décisions prises. Le Ministère de la Défense doit procéder aux réformes internes adéquates pour s’adapter au nouveau système de conscription, qualitativement au niveau de l’encadrement des jeunes recrues et des programmes d’instruction et aussi au niveau des capacités d’accueil et d’instruction des recrues. 

Enfin, j’espère que par la mesure annoncée par Mr le Chef du Gouvernement, on ne vise pas tout simplement le recrutement des milliers annoncés de jeunes au sein de l’Armée, en accordant la priorité à ceux qui auraient effectué le Service National, objectif absolument irréaliste et irréalisable. Déjà, cela suppose que plus de trente mille jeunes effectuent le Devoir national chaque année, mais la réalité est tout autre, seulement moins de quatre milles jeunes répond à l’appel de ce devoir par an.  Et même dans l’hypothèse théorique où le nombre y est, recruter 30 milles contractuels au sein de l’Armée constituerait un net glissement de notre Armée Nationale, qui constitutionnellement est une Armée de Conscription, vers une Armée de métier non déclarée ! Sommes-nous conscients de cela ? Est-ce  c’est  bien ce modèle d’Armée que nous voulons pour le pays ? Ce qui est certain, c’est que la Constitution s’attache à l’Armée de Conscription qui, aussi à mon avis, reste le seul modèle en Tunisie, qui répond aux besoins nationaux de sécurité en tenant bien compte de l’environnement sécuritaire, des spécificités et des ressources du pays. Dans tous les cas, cela est une autre grande question de défense nationale à débattre : Quelle Armée pour la Tunisie de demain? peut être l’objet d’un prochain article!

Que Dieu garde la Tunisie!

Gl (r) Mohamed Meddeb
Armée Nationale