Commentaire du rapport pour le programme national des réformes majeures 2016–2020 ?
Tout d'abord rendons hommage à l’équipe qui a formulé les choix figurant dans cette 1ère version du «Programme National des Réformes Majeures – PNRM». Toutefois, et bien que que ce programme affirme qu’il devrait être accompagné par une revue de l’ensemble des politiques sectorielles (y compris celles concernant l’agriculture …), il reste quand même que le secteur agricole nécessite en fait toute une série de réformes indispensables pour dégager un modèle nouveau à annoncer dans ce rapport. Les poids cumulés de la dispersion des exploitations agricoles, de la gestion par l’Etat de quelque 500.000ha de terres domaniales, de l’absence d’un accompagnement innovant de l’agriculteur pour en faire un véritable entrepreneur, de l’absence d’une recherche-développement qui guide cet entrepreneur dans sa tâche quotidienne, de l’exode rural des jeunes qui quittent l’agriculture avec l’espoir de trouver de l’emploi dans l’administration ou dans une hypothétique industrie de proximité… appellent à une vision innovante d’une politique agricole et agroalimentaire nouvelle; dont le rôle est fondamental aussi bien pour le développement régional que pour la création d’emplois.
Pour ce, il est suggéré d’inclure dans cette version du PNRM, au moins partiellement, les réformes de base à adopter dans cette nouvelle vision, et, en particulier, les aspects suivants:
Le développement agricole, tout comme le développement industriel, passent en majorité par l’entreprise.Il est à remarquer que la masse critique des entreprises (= les exploitations agricoles) est composée de 75% de petites exploitations (enquête 2004/2005) alors que celle des entrepreneurs (exploitants agricoles) comprend 43% d’exploitants âgés (même enquête). Sachant que plusieurs travaux de la FAO, et en dehors de la FAO, ont conclu plutôt à l’intérêt de l’Exploitation Moyenne Familiale Agricole (EMFA) en matière de développement durable, notre politique agricole 2016-2020, et sans toucher au droit de propriété, recommandera l’encouragement de la création d’une masse critique d’EMFA, comme entreprises de base du développement régional durable envisagé, notamment par les actions ci-après:
- l’encouragement d’une partie des 490.000 petites exploitations en majorité peu ou pas rentables, à évoluer en EMFA dans le cadre d’un projet national de remembrement des parcelles dispersées et d’agrandissement volontaire de la superficie des exploitations par une acquisition organisée d’une fraction des terres domaniales avoisinantes (l’AFA pouvant être chargée de cette tâche).
Si cette option touche seulement 20% des 490.000 exploitations, on obtiendra quelque 100.000 EMFA qui peuvent créer à leur tour au moins 1 emploi chacune, soit 100.000 emplois nouveaux (entre techniciens, gestionnaires, ouvriers, machinistes, forgerons…). De plus, cet encouragement permettra de débarrasser l’Etat d’une gestion directe ou indirecte de terres, fonction qui n’a rien à voir avec la fonction régalienne de l’Etat ; et lui permettra d’utiliser les produits de cette vente pour financer le reste des actions nécessaires à la solution des nombreux problèmes fonciers; - l’emploi des jeunes pouvant provenir également du remplacement des agriculteurs âgés, il est à envisager l’encouragement de 10% parmi ceux-ci à quitter l’activité vers une retraite en tout honneur. Un départ, au moins de ces 10% d’agriculteurs de 60 ans et plus (soit quelque 22.000 personnes) ; permet l’installation de 22.000 autres emplois de ‘’jeunes exploitants’’. Ce remplacement partiel et progressif sera favorisé par des encouragements adaptés (des systèmes de retraite ou de rente viagère aux candidats au départ ‘’à développer en P26 et 27‘’ de cette version du PNRM’’).
En rappelant, parallèlement que cette classe d’agriculteurs détient 46% de la superficie agricole totale (soit presque 2,5 millions d’ha), on peut apprécier le développement régional qui va découler - en plus du rajeunissement de cette classe d’entrepreneurs en agriculture - en matière de production, d’exportation, de transformation et des différents métiers d’agriculture… - Cette politique devra être accompagnée par la création d’un millier d’emplois d’ingénieurs et d’agents de terrain supplémentaires comme task-force pour l’avancement de ce projet.
L’ensemble de cette politique justifie la priorité à réserver au secteur agricole ainsi qu’une révision profonde de la structuration en profondeur de la recherche, de la vulgarisation et une réflexion suffisamment élaborée quant aux innovations à introduire sur ces exploitations et à leur adaptation aux potentialités naturelles très limitées et au contexte économique national ou international (revoir en conséquence le pilier 3 : Développement des ressources humaines en P23 de cette version du PNRM)….
A cela s’ajoutent quelques autres brèves remarques de fonds à prendre en compte:
Le paragraphe III-Les Piliers du Programme National des Réformes Majeures (PNRM) (P8) est à compléter par un pilier (VI): Ressources naturelles de plus en plus limitées (sol et eau) et préparation aux changements climatiques
Composante 8: Réforme du cadre d’exécution des investissements publics (P20) est à compléter par un paragraphe (V): sur la priorité à réserver à la valorisation maximale des investissements déjà en place (ex. : barrages dont le colmatage est avancé et âgés de plus de 40 ans ; mise en production des PPI existants et ceux sous-exploités…) avant la réalisation d’investissements nouveaux (création de nouveaux barrages…)
Enfin, la conclusion (P38) est à compléter par l’intérêt très particulier à consacrer aux politiques agricoles et agro-industrielles qui se complètent et que les changements climatiques peuvent perturber très gravement à une échéance plutôt proche.
Malek Bensalah
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