Election de Sadiq Khan à Londres : l’Islam n’y est pour rien!
Tous les médias et particulièrement ceux des pays arabo- musulmans, ont traité l’élection de Sadiq Khan à la tête de la Mairie de Londres en mettant en avant son appartenance religieuse, en l’occurrence musulmane. Et certains adeptes de «l'insécurité culturelle», à l’instar de l’extrême droite française, y ont vu le début du « Grand remplacement » et la réalisation partielle des prophéties islamophobes de Michel Houellebecq.
En agissant de la sorte, les médias occidentaux ont cédé à l’essentialisme et à « l’identitarisation » religieuse, alors que les arabo-musulmans l’ont fait par gloriole nationaliste comme chaque fois que quelqu’un d’origine, de culture ou de foi musulmane accomplit une Succes story.
Or l’élection de Sadiq Khan à la tête de la Mairie de Londres ne doit rien à son islam. Lui-même, sans pour autant cacher sa foi, il n’en a fait ni un argument ni un usage ostentatoires, pendant sa campagne. En effet, il sait très bien que les musulmans ne constituent qu’une minorité de la Cité, et ne s’adresser qu’à eux l’aurait mené irrémédiablement à l’échec.
D’ailleurs, son programme n’a rien d’islamique puisqu’il s’inscrit dans la tradition de gauche du Labour, le Parti travailliste britannique dont il est, depuis 2005, le député de la circonscription de Tooting, un quartier populaire au Sud de Londres. Quartier où d’ailleurs Il est né et où il a grandi dans une cité HLM avec sa sœur et ses six frères.
Et c’est le parcours de cet homme, son ascension sociale, bref la force et l’exemplarité de son mérite qui ont fait la différence et l’ont imposé face à son adversaire, l’héritier millionnaire Zac Goldsmith. Ce conservateur eurosceptique a essayé d’instrumentaliser la foi de Sadiq Khan et il l’a même accusé d’être islamiste voire proche des djihadistes terroristes, mais en vain.
Cette stigmatisation et ces soupçons n’ont pas pu opérer dans la cosmopolite et multiculturelle capitale britannique dont les citoyens sont porteurs d’identité plurielle. Réduire Sadiq Khan à sa religion, c’est négliger des pans entiers de sa personnalité : l’origine pakistanaise de ses parents ; sa naissance et son enfance londoniennes ; son éducation anglaise, ses convictions européistes, son engagement travailliste ; son féminisme ; son attitude pro-mariage gay…
Ne retenir que son islam, serait comme si on réduisait l’élection d’Obama à la couleur de sa peau, ou celle de Béji Caïd Essebsi, à son grand âge … comme si on considérait que Bertrand Delanoë n’a été maire de Paris de 2001 à 2014 qu’en raison de son orientation sexuelle. Absurde!
Slaheddine Dchicha