Boubaker Ben Kraiem: Quels enseignements tirer suite au séisme politique des élections partielles d’Allemagne ?
En politique, il n’y a pas d’amis permanents mais des partenaires conjoncturels et ceux qui pensent le contraire sont des novices et des naïfs dans le domaine. Cependant, le mal étant fait, il ne faut pas perdre son temps à regretter certaines promesses faites par les supposés alliés ou par des associés contre nature et dont l’objectif principal était d’affaiblir, au maximum, Nida Tounes, pour qu’il perde les prochaines élections municipales. N’oublions surtout pas que celui qui remportera les municipales de mai 2018, aura de fortes chances de remporter les législatives et même les présidentielles de 2019. Il est, aussi,presque assuré de gouverner le pays durant, au moins, deux décennies.
Auparavant,et avant que ce séisme n’arrive, avec cette intensité, de nombreuses erreurs ont été commises dont, entre autres:
- D’abord, le nombre pléthorique de cadres qui ont rallié, le fondateur du parti, dès les premières semaines, a déjà posé le difficile problème de positionnement des uns et des autres, et n’a pas donné, au parti, le résultat escompté,
- Ensuite, l’égoïsme de la plupart de ces cadres dont les orientations politiques étaient assez divergentes, n’a ni facilité ni permis l’homogénéité du groupe qui a épaulé le fondateur du parti,
- Enfin, le retard mis pour organiser le premier congrès du parti a été la cause du départ de la majorité des cadres fondateurs dont certains ont formé d’autres partis politiques, ce qui a fait perdre à Nida Touness une part non négligeable de sa notoriété, de son prestige, de sa présence dans les régions et de la confiance dont il jouissait auprès de la population,
- Aussi, l’inexistence d’un chef charismatique qui aurait pu, après le départ du fondateur,mériter le flambeau, s’imposer et rallier tout le groupe, ces chefs en herbe, n’a pas permis à Nida Tounes de bien s’organiser, d’évoluer, de se fortifier, et de se faire adopter par la majorité de nos concitoyens,
- De même, le fondateur, une fois élu à la magistrature suprême et devant le constat d’appauvrissement flagrant de l’encadrement au sommet, et voyant naître d’abord un combat de chefs, ensuite un certain immobilisme ou une quelconque division du parti, n’a pas, aussitôt, réagi pour remettre les pendules à l’heure et a laissé faire. Le résultat de cette inacceptable situation, tout le monde l’a ressenti, l’a vécu et les autres partis concurrents sont heureux de ses conséquences inespérées,
- Précisément, l’absence totale et absolue d’activités politiques du parti dans les régions, dans la campagne et dans les villes, a fait perdre, au Nida et de sa prestance, et de son existence et de sa notoriété. N’est-il pas le premier parti politique de la 2°république qui a remporté les élections législatives et présidentielles ? Pourquoi des réunions régionales ne sont pas, régulièrement, organisées et diffusées par les médias pour rappeler aux tunisiens sa présence, son existence et même ses programmes?
Que faire, maintenant, à quatre mois des élections municipales?
1- Organiser les congrès régionaux du parti pour élire des responsables légaux,
2- Organiser le congrès du parti pour élire une direction légitime,
3- Faire l’effort nécessaire pour conclure des alliances avec les partis formés par les anciens membres fondateurs du Nida et d’autres partis à connotation destourienne, pour présenter, aux prochaines élections, des listes communes,
4- Mener, d’ores et déjà, une mobilisation générale dans tous les coins et recoins du pays, avec des activités variées et diversifiées,en vue de ranimer la vie politique dans les régions, présenter le programme du parti, et convaincre les adhérents et les citoyens à participer aux prochaines élections municipales,
5- Conduire une campagne de sensibilisation auprès des jeunes pour les responsabiliser et les mobiliser en vue d’être concernés par ce rendez-vous électoral auquel ils doivent être partie prenante.
Quant au taux de participation aux élections partielles d’Allemagne ( 5,02 %) qui n’est pas surprenant mais qui en dit long à propos du désaveu des partis politiques par nos concitoyens, je laisse le soin à la nouvelle classe politique qui se croit plus apte et mieux lotie que l’ancienne, d’en tirer les conclusions qui s’imposent et qui sont, vue l’inactivité flagrante de ces partis, prévisibles.Devenir député de la Nation en récoltant seulement 284 voix est, tout simplement, une honte pour les partis politiques. Cependant, Nida Touness doit, illico presto, se remettre en cause, corriger sa copie, se refaire une santé, légaliser ses structures, occuper le terrain, et investir dans la jeunesse, cette jeunesse qui est notre richesse, notre espoir et notre avenir.
Les prochaines élections municipales sont d’une importance capitale. Que le parti qui a pu rétablirl’équilibre politique au lendemain de la Constituantefasse en sorte qu’il ne perde, par des agissements malvenus ou mal étudiés, sa position de leader de la scène politique. Pour y parvenir, il doit rallier tous les membres fondateurs qui sont partis , à gauche et à droite, ainsi que tous ceux qui croient en ce pays et tous les fidèles à Bourguiba qui nous a permis d’être ce que nous sommes et d’arriver là où nous sommes et qui a été, malgré les erreurs commises:
1- le Fondateur de l’Etat Tunisien moderne,
2- l’Emancipateur de la Femme avec la promulgation, dès 1956, du Code du statut personnel, unique dans le monde musulman,
3- et celui qui a généralisé l’enseignement qui deviendra obligatoirepour les garçons comme pour les filles et gratuit pour tous.
En agissant ainsi, nous permettrons au Combattant Suprême, le Président Bourguiba, d’être, là où il est, bien tranquille, content et fier de son peuple.
Que Dieu veille et protège la Tunisie Eternelle, l’héritière de Carthage.
Boubaker Ben Kraiem
Ancien Gouverneur