Ghassan Salame : «Le conflit libyen est une menace permanente pour le voisinage immédiat»
C’est un bien sombre tableau que le représentant spécial du secrétaire général de l’ONU en Libye, Ghassan Salame a brossé de la situation dans ce pays devant le Conseil de Sécurité le 21 mai.Dans ce rapport, l'émissaire onusien évoque notamment le péril terroriste qui pourrait entraîner une partition du pays et constituer une lourde menace non seulement pour les Libyens, mais aussi leurs voisins immédiats. Constatant que les Libyens semblaient résignés à un long conflit, il les exhorte à reprendre les pourparlers «car c'est la seule voie pour sauver le pays».
extraits
«J’ai passé les deux dernières années à œuvrer de toutes mes forces pour éviter de vous présenter un tel rapport .Effectivement, les 48 jours d’attaques déclenchés par les forces du général Haftar ont entraîné la mort de 460 personnes dont 29 civils et plus de 2400 blessés pour la plupart des civils, ainsi que le déplacement de 75000 personnes toutes civiles dont une majorité de femmes et d’enfants alors que les parties travaillant dans l’humanitaire estime que 100.000 personnes sont encerclées dans les zones de combat, tandis que 400000 autres sont immobilisées dans les zones qui ont été le théâtre de combats.
Je ne veux pas jouer les prophètes du malheur mais la violence à la lisière de Tripoli n’est que le début d’une guerre longue et sanglante sur la rive sud de la méditerranée, ce qui expose les voisins immédiats de la Libye et la région méditerranéenne à tous les dangers. Le vide sécuritaire dû au retrait d’une partie des forces de Haftar vers le sud en plus de la focalisation des forces occidentales sur la défense de la capitale Tripoli seront mises à profit par Daech et El Qaïda. Dans le sud du pays les drapeaux noirs ont fait leur apparition et je suis au regret de vous annoncer qu'en avril dernier daech a mené quatre attaques dans le sud, deux dans la région de Ghadoua, une troisième à Sebha et une quatrième plus récente à Zela avec un bilan cumulé de 17 morts, 8 blessés et 8 enlevés. Les forces libyennes qui avaient défendu avec beaucoup de détermination les terres libyennes contre les groupes terroristes sont aujourd’hui en train de guerroyer contre d’autres troupes libyennes. Outre les civils libyens qui ne cessent de pâtir du terrorisme daechien, il faut s’attendre à ce que la violence gagne les voisins directs de la Libye.
Tant que les parties concernées sur le double plan, régional et international ne sont pa convaincus que la Libye n’est pas une simple offrande qui revient au plus fort , mais un pays de 6,5 millions d’habitants qui méritent de de jouir de la paix et ont le droit de choisir leur chemin pour vivre ensemble, l’avenir du pays sera sombre. Ce que je crains le plus, c’est que si l'on ne réagit pas immédiatement pour mettre un terme à l’afflux d’armes et de faire pression sur toutes les parties au conflit libyennes pour faciliter la reprise de négociations sérieuses, toute la Libye sera entraînée dans une guerre civile qui pourrait aboutir à un chaos généralisé et la partition du pays. Ces développements ne sont pas inévitables. J'ai appris que les Libyens ont fini par se résigner à une confrontation qui pourrait durer des mois et même des années. Il est de mon devoir et celui de la communauté internationale de m'adresser à eux en leur disant : vous devez arrêter les tueries immédiatement pour les gens qui vous sont chers, votre pays et la paix et la sécurité internationales.
En conclusion, il appelle le Conseil de Sécurité à assumer ses responsabilités et appeler au cessez-le-feu tout en conviant les parties belligérantes à oeuvrer avec la mission de l'ONU pour assurer l'arrêt total et global des hostilités et le retour à l'opération politique sous les auspices des Nations Unies.