Hanène Hattab: des techniques plurielles pour une femme plurielle
Pour sa première exposition personnelle, Hanène Hattab, jeune peintre tunisienne, a choisi la toute nouvelle agence de décoration intérieure, Dadecco, tenue par Ghada Néji à Hammamet. En vue de présenter les 19 toiles de cette exposition, elle a sollicité Enissa Ayari, jeune Professeur agrégé en littérature française pour confectionner un beau texte-hommage à cette femme, plurielle(s), thème central de l’exposition « magnétique, sensuelle, enfantine, absente et présente (…) rencontrée dans les détours du quotidien, admirée au hasard des rencontres ». Rencontre avec l’artiste:
Simple et modeste, Hanène Hattab ne se définit pas comme un peintre professionnel. Et pourtant son parcours académique parle pour elle. Après un Baccalauréat Maths, elle rejoint l’institut supérieur des beaux-arts de Tunis où, à l’issue de cinq années d’études, elle obtient le diplôme national d’arts et métiers. Elle se spécialise en design produit, une des spécialités les plus difficiles en Tunisie car elle demande des alliances avec des industriels pour la conception de produits de consommation créatifs et originaux. Pas de quoi dérouter la jeune artiste qui poursuit ses études de troisième cycle et embrasse la carrière d’enseignant-chercheur. Elle est actuellement affectée à l’Université de Sousse. Dans ce cadre, elle achève les travaux de sa thèse qui porte sur la biomimétique, une tendance artistique qui prend la nature comme modèle.
Des effets surprenants
Après cinq expositions de groupe et une présence dans les salons de meubles, Hanène Hattab s’est donc lancée dans une première expérience en solo. En utilisant des techniques mixtes qui allient l’acrylique, l’encre de chine et les crayons de couleur au collage, elle crée un univers tout en nuances où les images se fondent, se confondent, se superposent et s’animent. Hanène exploite toutes les possibilités actuelles des arts plastiques pour produire des effets surprenants, parfois en trompe-l’œil, rapprochant la peinture de la photographie moderne retouchée, le tout dans un style néo pop art et des espaces universels. En effet, il ne faut pas chercher la tunisianité dans sa touche traditionnelle dans les femmes qui occupent les toiles de Hanène Hattab.
Mystérieuses avec leur visage souvent à moitié caché par un large chapeau, un masque ou un effet flouté, les femmes représentées se détachent du milieu sombre qui les entoure, belles, affichant sans complexe leur féminité. Elles sont unies dans leur modernité mais se déclinent en femme féline ou dame de cœur, se transformant d’une toile à l’autre, d’une flâneuse ou d’une nonchalante à une fêtarde ou une commère.
Servie par un large éventail de techniques picturales qu’elle maîtrise, Hanène parvient à imposer un style personnel qui se détache nettement du déjà vu. Elle parvient par cette exposition à détacher la femme tunisienne des clichés qui l’ont trop longtemps emprisonnée en tant que femme objet ou gardienne des traditions pour l’inscrire dans une universalité post-moderniste où elle assume, toujours seule sur les toiles, sa liberté et son indépendance de ton et d’esprit.
Anissa BEN HASSINE