Samir Gharbi - Tabac : mourir de… fumer
Selon le nouveau rapport de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) sur le tabagisme dans le monde, sorti le 19 décembre, il y a eu au moins 8 millions de fumeurs morts précocement à cause… de la cigarette ou du tabac en pipe et en chicha (voir note 1). Ce chiffre ne tient pas compte de la réalité, car plusieurs pays du Tiers Monde – comme la Tunisie – ne fournissent pas de données précises à l’OMS et ne rendent pas publique des études/enquêtes sur le fléau du tabagisme.
Selon le rapport, le nombre de fumeurs baissent sensiblement, surtout dans les pays développés. La planète comptait, selon les estimations de l’OMS, 1,34 milliard de fumeurs en 2018, contre 1,4 en 2000, soit 60 millions en moins. Mais ce résultat est dû aux femmes, dont le nombre a baissé de 102 millions (de 346 millions en 2000 à 244 millions en 2018) alors que celui des hommes a augmenté de 40 millions (de 1,05 milliard en 2000 à 1,09 en 2018. Attention : dans toutes les statistiques citées ici, l’OMS n’intègre pas les données pour les moins de 15 ans (voir note 2).
En 2025, l’OMS espère qu’ils ne seront plus que 1,3 milliard, grâce encore à une baisse chez les femmes de 32 millions (212 millions en 2025, contre 244 en 2018) et, enfin, la première stabilisation historique chez les hommes (à près de 1,09 milliard). Voir note 3.
L’estimation pour la Tunisie restera stable à environ 2 millions de fumeurs (âgés de 15 ans et plus), dont 1,9 million d’hommes et 100 000 femmes. Elle précise qu’environ 1 homme tunisien sur 2 fume (47,2 %), la proportion pour les femmes étant estimée à 3 % seulement (ce qui me semble inférieur à la réalité).
L’OMS se félicite cependant de la diminution à l’échelle mondiale. C’est « un changement majeur dans l’épidémie de tabagisme ». Et elle en profite pour retoquer les « autorités » peu agissantes - surtout celles des pays du Tiers Monde - qui ne font pas assez de campagnes anti-tabac pour « protéger leur communauté face au tabac, sauver des vies et éviter les préjudices liés à la consommation ». Voir note 4.
Pour 2020, les projections de l’OMS font apparaître une diminution de 10 millions du nombre total pour les deux sexes par rapport à 2018 et une nouvelle baisse de 27 millions d’ici à 2025. Selon le Directeur de la promotion de la santé à l’OMS, le Dr Ruediger Krech, les réductions constatées au niveau occidental montrent qu’en introduisant des mesures de dissuasion, tous les pays peuvent de la même façon « protéger le bien-être de leurs ressortissants ».
« Le nombre des consommateurs commence à diminuer globalement, ce qui représente un grand pas en avant pour la santé publique mondiale. Mais sans une action nationale renforcée, la diminution prévue du tabagisme ne permettra pas d’atteindre l’objectif mondial (-30 % du nombre de fumeurs d’ici à 2025). Nous ne devons jamais relâcher nos efforts contre les multinationales du tabac », conclut le chef de l’unité de lutte antitabac à l’OMS, le Dr Vinayak Prasad.
Notes
Note 1: sur les 8 millions de décès, environ 1,2 million résultent du tabagisme passif.
Note 2: l’OMS estime, globalement, le nombre des enfants de 13 à 15 ans qui fument à quelque 43 millions d’enfants en 2018, dont 14 millions de filles et 29 millions de garçons. Ei il y a des enfants de moins de 13 ans qui fument aussi…
Note 3: La consommation augmente dans la plupart des pays à revenu faible ou intermédiaire « qui (note l’OMS) sont la cible d’activités et d’efforts de commercialisation intenses de la part de l’industrie du tabac ».
Note 4: Six mesures « politiques » permettent de sauver des vies et de réduire globalement les dépenses de santé grâce à l’application des six interventions suivantes :
1. Surveiller la consommation de tabac et adopter des politiques de prévention;
2. Protéger la population contre la fumée du tabac, notamment des lieux fermés (comme les bureaux d’entreprises, les guichets, les autobus, les trains, les cafés et les restaurants) ;
3. Offrir une aide à ceux qui veulent renoncer au tabac ;
4. Mettre en garde, de façon permanente et convaincante, contre les dangers du tabagisme ;
5. Faire respecter l’interdiction de la publicité en faveur du tabac, de la promotion et du parrainage ;
6. Augmenter les taxes sur le tabac. Cette mesure antitabac est triplement efficace : elle contribue à réduire la consommation et les dépenses de santé liées au tabac, tout en représentant aussi une source de recettes permettant de renforcer le financement de la santé publique et du développement.
Samir Gharbi
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