Avec Malek Lakhoua, ça va jazzer
Un be-bop, un doo-wop ou un boogie-woogie, … et vous êtes conquis. Attablés, agenouillés ou simplement debout, tous l'étaient ce weekend sur la place du Tribunal dans la médina de Tunis. Entre les initiés et ceux qui découvrent, les notes de Jazz et de Blues ont fait l'unanimité. Samedi 4 septembre, Malek Lakhoua était ravi, son collectif Blue Note project s'est installé pour la deuxième soirée consécutive sur cette place habilement restaurée. Ce n'est pas tant une satisfaction personnelle que la joie de voir un public aussi varié apprécier le Jazz.
Malek Lakhoua est un jeune tunisien comme on voudrait en voir beaucoup. Interne de la faculté de médecine de Tunis, il s'applique à soigner à la fois les corps et les mœurs. Passionné de jazz, il a suivi des années durant les chroniques de Mongi Méjeri sur RTCI. Puis d'auditeur, il est passé batteur. L'appel des baguettes est venu d'un manque de tels musiciens en Tunisie. Alors il débute en accompagnant Adel Jouini et en apprenant des maitres batteurs le tunisien Azaiez Hamrouni et le franco-algérien Mourad Benhammou. Son apprentissage s'est poursuivi aussi bien au contact de grands batteurs comme l'américain Al Foster que par sa position d'insider dans les festivals de Jazz en Tunisie.
Démocratiser le Jazz
La réputation de Jazz comme musique d'élite l'exaspérait. Il entreprend alors de le démocratiser et le meilleur moyen à ses yeux était de le sortir du cadre formel des festivals. Non sans difficultés, il réalise son premier succès en imposant une soirée jazz hebdomadaire au Bœuf-sur-le-toit à la Soukra. Le concept plait et le premier noyau d'initiés crée une réaction en chaine. La scène du lieu devient dès lors un refuge pour les jazzmen de passage et Malek, son intendant. Un rendez-vous d'artistes comme il devrait en exister dans toutes les villes qui chérissent la culture.
Ainsi, il a réussi à sortir le jazz des festivals, mais il voulait faire mieux encore. Si les gens ne vont pas naturellement vers le jazz, c'est le jazz qui ira vers eux. Le collectif Blue Note project prend quartier dans la médina de Tunis. Une révélation agréable pour le grand public venu par curiosité ou par hasard découvrir ce groupe et sa musique. Malek et son collectif, leur jazz et le charme du lieu ont rendu ces soirées ramadanesques délicieuses. Il est heureux de voir des adolescents qui chahutaient dans les rues, s'arrêter avec respect pour écouter les savoureuses notes de Blues ; ou cette dame âgée drapée de son sefseri en soie tapoter discrètement du pied au rythme pimpant de Make it funky.
Garvin Bushell attribue le mot « jazz » au mot jasmin, effluve répandue dans la Nouvelle-Orléan de l’époque. Il est donc naturel que le Jazz se sente chez lui ici.
Alors un conseil, courez les voir ce soir, vous apprécierez le détour. Pour ceux qui ne peuvent y aller. Blue Note project et son batteur reprennent leurs bonnes habitudes dès la semaine prochaine à leur QG de la Soukra. Malek Lakhoua y abordera sa 5ème rentrée consécutive avec plein de projets de collaboration en tête: du bassiste Adel Azzouz à la chanteuse Alia Sallemi, l'agenda de sa scène ne désemplira pas. Malek nous a donné rendez-vous dans quelques mois pour nous révéler d'autres projets. On y sera, mais entretemps, on ira de nouveau le voir ce soir.
Mourad Daoud