STB-BH : les raisons de la fusion, l'approche, la démarche
Il ne s’agira pas d’une simple fusion, calculée en termes de parité d’échange pour parer aux pertes d’échelles, mais d’une totale refonte, avec pour objectif essentiel la création de la valeur, l’ancrage d’une grande enseigne et son rayonnement à l’international. C’est dans cette vision que s’inscrit la fusion des deux grandes banques publiques tunisiennes, STB et BH, inscrite au programme présidentiel 2014. Le lancement des études, ordonné par le Chef de l’Etat lors de l’audience accordée, vendredi au ministre des Finances, marque le bouclage du dossier préparatoire et le démarrage de la phase effective devant aboutir à la concrétisation. Un signal fort bien perçu par l’ensemble des acteurs. Retour sur le contexte et éclairage sur la démarche.
Les analystes n’ont cessé de le signaler : les banques tunisiennes sont victimes de leur taille : petite, coûteuse, sclérosée. Sur les 21 établissements en activité, aucun ne fait partie des Top 10 maghrébins ou africains, selon les dépôts, les crédits ou le produit net bancaire. La première banque tunisienne arrive juste en 21ème position au Maghreb et 47ème rang en Afrique, en PNB.
Le reste de l’analyse s’ensuit : faible capacité de financement de grands projets, fragmentation et éparpillement des prises de participation au capital d’entreprises significatives, inadéquation des systèmes d’information et peu d’ouverture, malgré les efforts de la BCT, sur de grandes compétences d’ingénierie financière et bancaire parmi celles qui brillent à l’étranger et pouvant contribuer substantiellement à l’essor de nos banques. Est-ce une fatalité, aucune enseigne bancaire tunisienne significative à l’étranger. L’UTB venant juste d’amorcer à partir de Paris, sa conversion en TFB, avec un objectif de déploiement en Europe, à la mesure de ses maigres ressources actuelles.
Redressement, modernisation et amélioration des services ont ouvert la voie
Même compressé à 13,2%, le taux des créances accrochées demeure élevé et, en dépit des grands efforts de redressement, de modernisation et d’amélioration des services, beaucoup reste à faire. Il faut le dire, le redressement engagé dans les années 1990, comme les nouveaux textes législatifs pris, l’institution des nouvelles instances (comités de crédits, etc.) et mécanismes, l’accélération de la télé-compensation, l’encouragement de la monétique et la mise en place des nouvelles normes internationales (Bâle 2 et 3), ont été salutaires.
Ce sont ses dividendes qui autorisent aujourd’hui l’engagement d’une nouvelle étape. La fusion ne peut se réaliser si chacune des deux parties n’était pas dotée d’assises saines et solides, d’équipes compétentes et d’un réseau bien déployé. C’est d’ailleurs cette maturité qui offre une bonne opportunité.
Peut-on accepter aujourd’hui que des banques publiques se livrent à une rude concurrence entre-elles, subissent en double nombre de charges, dupliquent les mêmes investissements informatiques, se privent d’une même structure d’évaluation et de gestion de risques, et se cloisonnent ? Autant de pertes réelles qui les plombent face à une concurrence internationales déjà nos portes.
Indicateurs au 31/122009 | STB | BH |
Fonds propres (en MD) | 514 | 411 |
Chiffre d'affaires (en MD) | 403 | 306 |
Charges d'exploitation (en MD) | 108 | 78 |
Produit Net Bancaire (en MD) | 244 | 186 |
Clients | 870 437 | 668 529 |
Nombre d'Agences | 118 | 89 |
Effectifs | 2380 | 1855 |
Créer de la valeur, innover
A Carthage, la décision est prise : la refonte d’un nouveau pôle bancaire public est indispensable. D’abord, la création d’un e structure holding pour gérer les participations de l’Etat directes et à travers les entreprises publiques au capital de la BNA, STB et BH. Et une fusion STB-BH. A la Kasbah, comme rue de la Monnaie, siège de la BCT, la mise en œuvre a été immédiate, dans une totale synergie, sous la houlette du Premier Ministre, et avec la participation active et quotidienne du ministre des Finances et du Gouverneur de la BCT.
Si rien n’a encore filtré de leurs travaux, l’orientation tracée par le Chef de l’Etat est claire : saisir cette opportunité non pour fusionner deux banques mais pour donner naissance à une grande banque tunisienne qui doit s’assigner un objectif précis, tel qu’acquérir telle taille, devenir parmi les Top 5 ou 10 dans la région, apporter une valeur ajoutée effective et s’enrichir des compétences utiles. A cet effet, une gouvernance moderne et efficace, un organigramme approprié dédié à la croissance et à la rentabilité, un système d’information performant, des produits novateurs, un réseau optimisé et une nouvelle culture qui ne laisse dominer aucune des celles héritées, mais fusionne les valeurs fondatrices et les consacrent à la satisfaction du client et l’excellence des services : les principes sont clairs, les termes de références sont précis et la feuille de route est bien établie.
Tout en un, la démarche s’appuiera certes, comme lors de toute fusion, sur les aspects légaux et comptables, mais se concentrera surtout sur la nouvelle architecture conceptuelle, managérielle et opérationnelle. A cet égard, l’absorption par la STB de la BNDT et de la BDET, en Tunisie et nombre d’autres exemples (Attijari Wafa Bank, etc.) montre les erreurs à éviter et les enseignements positifs à tirer, et définit la nouvelle approche 360° appropriée. L’étude ira dans le détail, segment par segment, fixant un plan précis pour les 100 premiers jours, le premier semestre, la première année et les 18 premiers mois, pour s’assurer que chacune de ces phases critiques ne conduira que de succès en réussite.
En espérant, et c’est un autre objectif, que cette initiative montrera la voie à d’autres banques privées tunisiennes qui, aujourd’hui et demain, doivent y penser très sérieusement. Si ce n’est pas déjà lancé.
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