Faire de l'innovation l'un des principaux moteurs de la réussite économique
Nous vivons des temps critiques et plus que jamais, le savoir et l’innovation devront avoir raison des obstacles et des difficultés qui se dressent sur le chemin de la croissance.
La Tunisie de demain, sera sans doute une Tunisie enracinée dans les traditions puisées dans son histoire millénaire et amarrée à la modernité, une Tunisie maitrisant les nouveautés scientifiques et les technologies nouvelles et contribuant à leur enrichissement : ce sont là les choix stratégiques que son Excellence le Président de la République Zine El Abidine Ben Ali s’est fixés pour l’avenir de notre pays ouvrant ainsi la voie vers la construction d’une société basée sur le savoir, et l’édification d’une économie nouvelle fondée sur la libération de l’initiative et la stimulation de l’innovation.
L’innovation est désormais la clé pour répondre aux enjeux de la concurrence tant au niveau national qu’international. Notre conviction est que le secteur des Technologies de l’Information et de la Communication doit s’engager dans une politique d’innovation pour assurer une croissance durable.
Innovation et promotion de la Recherche et Développement sont, en réalité, deux objectifs indissociables, les deux faces d’une même pièce.
C’est pourquoi, nous avons tenu à associer aux travaux de ce forum tous les acteurs : les représentants des structures de recherche, des structures d’appui à l’innovation et bien sûr les représentants des entreprises du secteur des Technologies de l’Information et de la Communication.
Comme vous le savez, ce secteur est aujourd’hui à l’origine d’une grande part de la croissance et représente un gisement d’emplois important.
Or, un des enjeux fondamentaux de ce secteur est celui de la qualité de la recherche publique et de la capacité qu’ont les structures de recherche à transférer les résultats de leurs travaux aux entreprises.
De ce point de vue, si la Tunisie dispose d’un potentiel non négligeable en matière de recherche et d’innovation, son développement reste entravé par l’insuffisance de la coopération entre la recherche publique et le monde économique.
Ce qui retient particulièrement l’attention dans le domaine des TIC aujourd’hui est ce foisonnement d’études et de projets pour améliorer, renouveler, voire révolutionner la notion même de l’innovation. Qu’elle soit incrémentale ou de rupture, l’innovation doit s’entendre ici dans son sens le plus large, technologique, managérial ou économique.
La saisie des opportunités offertes par les nouvelles technologies, la volonté de s’adapter au mode de vie de nos concitoyens et la nécessité d’accompagner notre développement économique nous poussent à cesser de considérer la Recherche et Développement comme une sorte de luxe, de privilège, ou de défi insurmontable.
Accompagner le développement c’est aussi et surtout placer l’entreprise au cœur du dispositif de l’innovation afin de l’aider à renforcer ses avantages comparatifs lorsqu’ils existent ou bien à les créer.
Faire de l’innovation l’un des principaux moteurs de la réussite économique
Comme il faut se limiter dans un discours d’introduction, je rappellerai les réalités suivantes :
- L’économie numérique constitue partout dans le monde le secteur d’activité le plus dynamique, avec un taux de croissance deux fois supérieur à celui de l’économie mondiale.
- L’économie numérique représente 40% des gains de productivité pour cette même économie mondiale.
- L’économie numérique constitue de fait le fer de lance dans la transformation de l’économie mondiale vers une économie entrepreneuriale de la connaissance, une économie où la concurrence par l’innovation a remplacé la concurrence par les coûts et les avantages naturels.
- Désormais, la prospérité des territoires et des pays est fortement conditionnée par l’essor de cette économie entrepreneuriale de la connaissance. Ce modèle se présente comme un écosystème socio-économique favorisant, notamment par l’action d’intermédiaires spécialisés, les interactions entre entrepreneurs, capitaux-risqueurs et investisseurs, chercheurs, développeurs, ingénieurs de production et opérateurs de production afin de développer en permanence de nouveaux produits et services dans un univers concurrentiel.
C’est pour ces raisons que le programme présidentiel de développement de l’économie numérique, dont la concrétisation est entamée depuis cette année place l’innovation au cœur de la stratégie élaborée. Celle-ci s’articule en effet autour des 4 axes suivants :
- la modernisation des infrastructures : la démocratisation de l’accès au haut débit et le déploiement du très haut débit, le développement de la TNT, l’édification d’espaces technologiques (technopoles, cyber parcs, techno city, etc.)
- le renforcement du capital humain : le programme national de certification des compétences en TIC par exemple
- la promotion des services numériques et de leur usage et le développement d’une industrie de contenu : de grands projets couvrant plusieurs domaines d’activité (administration, santé, éducation, transport, culture, etc.), des services numériques d’utilité publique, des actions pour le renforcement des capacités institutionnelles des SSII, …
- l’édification d’un écosystème de la R&D et de l’Innovation.
Le forum d’aujourd’hui s’inscrit pleinement dans ce contexte et a pour ambition d’inaugurer un travail de réflexion commun, en mettant l’accent sur certaines questions qui paraissent à la fois les plus stratégiques et les plus mûres pour utilement bénéficier de l’action publique.
Les entreprises opérant dans les TIC sont aujourd’hui parmi les principaux acteurs économiques et sont aussi au cœur du processus d’innovation. Sauf que dans notre réalité, force est de constater que la valorisation et les transferts des résultats de la recherche au secteur industriel restent insignifiants et c’est ce qui prive l’économie tunisienne d’une valeur ajoutée certaine en termes de créations de richesses et d’emplois.
Les moyens engagés ne seront rien si nous ne nous dotons pas d’orientations stratégiques-claires pour la recherche, le développement et l’innovation dans notre secteur.
Cette stratégie nationale de recherche-développement et innovation dans les Technologies de l’Information et de la Communication, sera déterminante pour la transformation de notre système.
Il ne s’agit pas, bien sûr, de copier des modèles étrangers, mais de s’approprier la culture de l’innovation et surtout de créer les conditions qui permettront à nos chercheurs et à nos entreprises de tirer davantage profit des résultats scientifiques, d’inventer de nouveaux services et de créer de nouvelles solutions.
Ancrée à l’économie entrepreneuriale de la connaissance, cette culture de l’innovation devrait engendrer un bouillonnement créatif qui ne pourrait être freiné que par les structures de recherche opérant en vase clos ou en silos, d’une part, et par des organisations territoriales bureaucratisées et structurées en mille-feuille d’autre part.
Permettez-moi de revenir sur les raisons qui ont été à l’origine de notre démarche en organisant ce premier forum et sur la méthodologie qu’on souhaiterait adopter :
- L’allocation de 0,5 % du chiffre d’affaires des opérateurs des réseaux de télécommunications et des entreprises du secteur à la Recherche, au Développement et à l’Innovation ne doit pas être perçue comme une taxe, ni un impôt supplémentaire. Il s’agit de ressources additionnelles allouées aux besoins stratégiques des entreprises elles-mêmes, pour l’amélioration de leurs performances et de leur compétitivité. Nous l’entendons comme une action des entreprises responsables pour améliorer leur environnement de valorisation industrielle.
- Cette démarche doit aboutir au financement de projets de recherche et développement collaboratifs et thématiques dans le cadre d’appels à projets ouverts aux différentes structures de recherche, mais aussi aux petites entreprises innovantes et aux centres techniques.
- Il s’agit surtout de soutenir le développement de produits et de services technologiques intéressant l’entreprise c'est-à-dire répondant à des besoins déjà identifiés.
Enfin, il s’agit en quelque sorte d’exploiter dans un cadre collaboratif prédéfini les ressources humaines existantes spécialisées en recherche et développement en TIC, ainsi que les moyens matériels des laboratoires ou d’autres structures d’appui, sans en supporter entièrement et de façon permanente la charge.
Ce forum se veut une occasion de rencontre entre les acteurs de la recherche, les entreprises, les structures de soutien et les autres partenaires institutionnels.
Une occasion pour se connaître mais bien se connaître, connaître les besoins de chacun, connaître les potentialités de chacun.
Une occasion pour réfléchir sur les moyens pour dynamiser les liens recherche-entreprises, sur les mécanismes de coopération et de partenariat.
Dans ce défi de taille qu’est la R&DI, je voudrais vous soumettre pour le débat quelques questionnements qui méritent d’être approfondis lors de vos travaux.
- Quels sont la nature et le type de projet d’innovation technologique pouvant se prêter à une démarche collaborative de recherche ?
- Quel processus de mise en concurrence pour la sélection des projets faudrait-il envisager ? partenaires éligibles, portée, objectifs, résultats, activités, ressources, dépenses éligibles, cadre d’exécution du budget à allouer, planning d’exécution, indicateurs d’avancement, etc.
- Quelles modalités de financement conviendrait-il de privilégier ?
- Quelles sont les structures de gouvernance ad hoc à mettre en place ?
- Quelles dispositions faudrait-il prendre en matière de protection de la propriété intellectuelle des connaissances antérieures et des résultats de recherche conjointe ?
- Quid de la démarche d’évaluation et de la matrice d’indicateurs de performance à définir ?
- Quels sont les outils de pilotage permettant de supporter l’ensemble du programme et de conduire son exécution ?
Mohamed Naceur Ammar
(*) Extraits de l'allocution prononcée vendredi 1 er octobre 2010, à l'ouverture du 1er Forum ICT'in, à Tunis