Blogs - 15.10.2010

L'ouverture, c'est bien, mais dans le respect de notre authenticité

Depuis qu'elle s'est  installée sur nos chaînes, il y a deux ans, notre perception de la téléréalité a beaucoup changé. Le spectacle de ces invités venus livrer leurs petits secrets de famille,ne choque plus et s'est même banalisé. Assurément, notre faculté d'adaptation a joué et plus rapidement qu'on ne le croyait. A telle enseigne qu'on a parfois même l'impression que les Tunisiens n'attendaient que ce genre d'émission pour épancher en public leurs états d'âme, trop longtemps refoulés, et braver parfois les interdits. C'est à croire que les caméras et projecteurs n'inhibent plus, mais au contraire désinhibent.  Mais du moment que les invités savaient jusqu'où il ne fallait pas aller trop loin, malgré les provocations des animateurs, les Tunisiens avaient  fini par en prendre leur parti. Ils étaient même devenus des accros  à ce genre d'émissions comme l'attestent les mesures d'audience...Sauf que certaines dérives commencent à pointer du nez.

On en a eu la preuve il y a quelques semaines lorsqu'un grand acteur tunisien dont le ton n'est pas généralement au libertin a avoué au cours d'une émission de télévision, après une longue  tirade sur l'amour conjugal...  avoir eu des relations extraconjugales, plongeant dans l'embarras son épouse, présente sur le plateau, l'animateur, le public  et des milliers de téléspectateurs. De quelque point de vue où l'on se place, ce genre de confession, passant, qui plus est, en prime time ne peut que choquer, surtout que leur auteur, loin d'éprouver le moindre remords a essayé de justifier son comportement en se lançant dans des explications fumeuses. On aurait eu quelque indulgence si la personne incriminée était un citoyen ordinaire. Ce n'est pas le cas s'agissant d'un immense acteur qui était et reste un exemple pour beaucoup de Tunisiens. Même dans les pays occidentaux et notamment latins où l'infidélité conjugale, est banalisée,  il est extrêmement rare qur des personnages publics fassent de tels aveux. Que dire, alors, d'un pays comme le nôtre qui pour être ouvert et tolérant, n'en est pas moins attaché à certaines valeurs (dont la moindre n'est pas la fidélité conjugale) qui font notre authenticité par rapport aux autres peuples. Déjà, j'entends d'ici, des voix  s'élever pour dénoncer "la bien-pensance", "le politiquement correct", "la pensée unique" et que sais-je encore. Mais rien ne pourra m'en faire démordre.

Il y a quelques années, le grand journaliste français, aujourd'hui disparu, Yves Mourousi avait invité à son journal de 13 heures sur une station de radio, le sociologue et islamologue Jacques Berque qui venait de publier une traduction française du Coran sur laquelle il travaillé pendant une vingtaine d'années. Parmi les questions qui furent posées :

- «est-il possible de passer autant d'années pour traduire le Coran sans se convertir à l'Islam ?

- (Après un temps de latence), Oui

- Qu'est-ce qui vous empêche de le faire ?

- Mon "authenticité" (NDLR : ce qui n'a pas empêché Jacques Berque de demander dans son testament de faire lire sur sa tombe des versets du Coran, ce qui s'est fait à son enterrement ).

L'OUVERTURE, C'EST BIEN. L'OUVERTURE DANS LE RESPECT DE NOTRE AUTHENTICITÉ, C'EST MIEUX !

Hédi Béhi