Ezedine Hadj-Mabrouk: je propose une feuille de route pour la Tunisie
Tout le monde politique ou presque (surtout les impatients et ceux qui ont la trouille) demande avec insistance au Président Kais Saied une feuille de route pour la période dite Période d’Exception venant après le "coup de maitre" du 25 juillet 2021.
Monsieur le Président je vous recommande une feuille de route de trois points seulement (autrement dit 3 fers qu’il faut battre à chaud car une fois refroidis il serait beaucoup plus difficile de les modeler d’où l’urgence de ces trois points):
I. Mettre fin à l’impunité des gros de la politique et des affaires en commençant par:
(i) La poursuite des malfaiteurs de l’ARP dont vous avez la liste et le type d’infraction. Une cinquantaine de députés environ, si pas plus.
(ii) L’exécution du rapport de la Cour des Comptes sur les infractions, dysfonctionnements et opacité des élections de 2019 notamment « l’argent étranger » qui a coulé à flots pour que les sièges de l’ARP soient remporté illégalement. Ceci doit vous amener à appliquer d’office l’article 163 de la constitution qui va éliminer nécessairement au moins 80 sièges/députés de l’ARP (notamment d’Ennahda, Qualb Tunis et Ich Tounsi) ce qui doit résulter automatiquement en la dissolution du parlement et l’ouverture d’un nouveau chapitre conduisant à l’instauration de la 3ème république.
(iii) L’ouverture et la poursuite des autres gros dossiers chauds à résonnance politique ou socio-économique qui trainent depuis des années dont les assassinats, l’appareil secret, la corruption, la malversation, l’extorsion, la mauvaise gestion et l’abus de pouvoir.
II. Former un Gouvernement «d’Assainissement et de Reprise Economique»: Un gouvernement restreint ne dépassant pas les 15 ministres (en plus du CDG) composé de compétences de gros calibres de grande intégrité entre jeunes femmes et hommes (n’ayez pas peur Monsieur le Président des compétences et des gros calibres notamment parmi les jeunes). Un gouvernement qui doit durer jusqu’aux prochaines élections de 2024. Il faut mettre fin à l’instabilité gouvernementale causée par des caprices politiques et qui a rangé le pays depuis 2011. Ce nouveau gouvernement va devoir s’attaquer et d’urgence à un nombre de priorités (budgétaire, financière, d’investissement, de réforme et de bonne gouvernance). Pour être bref, je me limite ici à citer deux (2) priorités qui me tiennent à cœur.
La première serait de «changer la face visible» du pays en lançant un programme d’urgence d’investissement à trois volets.
Le premier volet doit porter sur la réparation et l’amélioration de l’infrastructure de base du pays notamment l’infrastructure roulière (dite le nerf de la guerre) qui souffre lamentablement des fameux trous, crevasses, fissures, obstacles, etc. et l’infrastructure des hôpitaux, des écoles, des tribunaux et de tous les autres établissements à usage intensif par le public et qui se trouve dans un état déplorable et indigne de l’image de notre pays.
Le deuxième volet doit porter sur la dépollution (déchets, air, cours d’eau, plages, etc.) et l’embellissement du pays qui est devenu malheureusement un dépotoir pendant ces dernières années. Et le troisième volet doit préparer le pays aux calamités naturelles dont notamment les inondations, les incendies et les chutes de neige dans certaines régions. A noter que les dégâts des inondations des années précédentes sont restés pour la plupart intouchés ce qui risque de causer de graves conséquences lors des inondations et catastrophes naturelles des tous prochains mois.
La deuxième priorité serait de «changer la culture administrative» de notre pays. L’administration publique (y compris les sociétés publiques telles STEG, SONEDE, Tunis Air, SNCFT, SNT, etc.) est devenue en général non seulement non respectueuse du citoyen mais pratiquement adversaire du citoyen. Ceci doit changer et rapidement. Le fonctionnaire ou l’agent public doit enfin comprendre qu’il est là pour SERVIR le citoyen et non pour le harceler ou lui faire perdre son temps et ses moyens. Une nouvelle culture de respect MUTUEL administration-citoyen reste à promouvoir voire même à imposer en profitant de cette Période d’Exception. Beaucoup a été dit sur l’administration électronique et sur la transparence et l’efficacité de l’administration mais pratiquement rien n’a été fait jusqu’à maintenant ! Encore trop de paperasses, trop d’autorisations, trop de "revient demain" et trop de petites et grandes corruptions.
III. Préparer les projets d’une nouvelle Constitution et d’un nouveau Code Electoral instaurant la 3ème République et préparant le terrain pour les prochaines élections présidentielle et législative de 2024 (oui de 2024 et pas avant et donc pas besoin d’élections anticipées). Le prochain parlement ne doit pas comprendre plus de 104 députés (sur la base de 6 députés pour chacun des gouvernorats de Tunis et Sfax, 5 pour chacun des gouvernorats de Nabeul, Kairouan, Sousse et Bizerte et 4 députés pour chacun des 18 autres gouvernorats). On doit éliminer les députés des tunisiens à l’étranger qui ont montré leur incapacité de faire quoi que ce soit pour cette catégorie de citoyens. Les tunisiens à l’étranger doivent voter pour les candidats de leurs gouvernorats d’origine soit sur place en Tunisie soit à distance et électroniquement du pays de leur résidence. Ceci est de loin plus pratique et plus économique que le système actuel.
Un Congres National de 104 jeunes hommes et femmes (à l’image du prochain parlement) représentant la société civile (toutes tendances confondues sauf terroristes et criminelles) et les 24 gouvernorats du pays doit être organisé pendant 3 jours par le Président de la république ou sous les auspices du Président de la république, et ce, pour la discussion et l’adoption des nouveaux projets de Constitution et de Code Electoral. Le congrès national fait office à la fois de parlement et de référendum.
Loin des vengeances et des règlements de comptes, la Période d’Exception doit respecter les libertés individuelles et collectives du citoyen et doit durer jusqu’à la fin du mandat actuel du président Kais Saied. Une période suffisante à exploiter par les partis politiques pour entamer leur renouvellement (après autocritique, réévaluation, rajeunissement et regroupement). Aussi, elle est relativement suffisante pour mener à bien les trois points proposés dans cette feuille de route. Il faut donc foncer rapidement et surtout ne pas perdre du temps car comme on dit "il faut battre le fer tant qu’il est chaud".
Ezedine Hadj-Mabrouk