Habib Ben Salha - À la mémoire de Adel Mégdiche: une conversation entre le noir du tableau et l'arbitraire du blues
Ceci doit être considéré comme une conversation entre le noir du tableau et l’arbitraire du blues…
O.T : Vivre en avance, refaire l’arc-en-ciel, monter la lune comme une fleur de sable, c’est prendre des risques ; monter à l’assaut des songes, c’est recueillir le vide au bout de chaque attrait…
A.M : Que voulez-vous que j’y fasse ? J’ai essayé de tirer au clair les étoiles filantes…
O.T : … Tu as surtout noyé la géométrie pointilleuse !
A.M : On ne sait plus à quel sein se vouer (pas de confusion s’il vous plaît ! Mon orthographe est pure et ciseleuse...)
O.T : Ouvrons les tablettes insoumises. Voici : le beau ou la belle ou l’affreusement bonne et peut-être même la rebelle ou la cendrée à l’extrême, disons l’une et l’autre et encore toutes les formes intermédiaires respirent l’irréel. Tu as le sentiment vif de l’imparfait. Tu as vu, vécu, entendu quoi ? On ne sait pas ; l’as-tu su toi-même ?
A.M : Je sais qu’entre les lignes le subjonctif évite les caprices du pinceau. L’encre des mamelonnades n’est pas nomade ! Je hais les mirages durcis des barbes d’aujourd’hui, passe pour une barbichette ; le léger est mon aise. N’insultez pas la vapeur. Quand je m’ennuie, je me promène dans la gueule des Gouls et dans la liesse des Goulettes…
O.T : Venu le temps d’être vacant. Qui a dit : Adel avec un accent très ouvert, encore des efforts, oui, c'est ça ? Gardez la bouche –crinière au galop. Il a toujours cherché de l’oxygène dans les éclairs en colère, de l’impossible dans les idées qui passent. L'instant dort-il vraiment dans la cendre du buisson fiévreux ? (aucune confusion, n’est-ce pas, ta grammaire est circonvolutionnelle)
A.M : Je n’ai jamais eu recours à la couleur ou à la blancheur impudique de la surface ; le brasier maghrébin aux étincelles chevalines, aux traces berbères m’a brûlé : l’écheveau de la chevelure –fleuve d’Eljazia, les nébuleuses de la Kahina en fuite, l’amer de la reine des reines vagabondes Alyssa et les fenêtres de l’incandescence marine…
O.T : Doucement, tu vas tout défaire en provoquant de nouvelles turbulences ! Tu serpentes à l’infini…
A.M : Non, rassurez-vous, je ne suis qu’un point à la recherche de…
De…
O.T : De quoi ? Pas d’interrogation oblique. Pour finir, encore un mot, ce sera le dernier.
A.M :… je suis l’exclamation de moi-même…
Habib Ben Salha
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