Taïeb Dridi: Toujours à Odessa pour exporter des céréales et des féculents
Taïeb Dridi aligne 35 ans en Ukraine, à Odessa plus précisément. Marié à une Ukrainienne, père de deux enfants et trois fois grand-père, il dirige une entreprise de traitement et d’exportation de produits céréaliers (orge, blé, etc. et des féculents : pois chiches, lentilles, etc.) vers de nombreux pays arabes, y compris la Tunisie. Depuis le déclenchement de l’invasion russe, tout devient subitement difficile. Mais, il ne baisse pas les bras. Il doit maintenir à flot son entreprise, garder sa vingtaine d’employés, protéger ses hangars, et trouver le moyen de continuer ses exportations.
Le port d’Odessa, comme tous les autres ports d’Ukraine, est fermé. La mer est minée. L’unique voie possible est celle du transport terrestre, en passant par la Roumanie, la Bulgarie et d’autres pays proches. A partir de là, il s’agit de convoyer la marchandise vers la Turquie pour entreprendre d’autres circuits terrestres ou maritimes.
Les prix ont tous flambé. Qu’il s’agisse des produits agricoles dans son cas, mais tous les autres aussi, du transport ou de l’assurance. D’ailleurs, les compagnies d’assurances ont en outre suspendu le risque de guerre. Rien que le transport a augmenté d’au moins 3 500 $ par container. Aux commandes, sans relâche, du matin au soir, Taïeb Dridi fait tourner son entreprise à flux tendu, s’appuyant sur ses bureaux de liaison établis en Géorgie et en Bulgarie. Son fils, Mohamed, qui dirige une entreprise de transport, lui prête main-forte.
Tenir bon, ne rien lâcher
Tout a commencé pour Taïeb Dridi, originaire de Boussalem, en 1988, lorsqu’il avait obtenu une bourse d’études en ex-Urss. Titulaire d’un mastère en télécommunications, il rentre en Tunisie et se lance dans un projet de chalutier de pêche. Face aux difficultés rencontrées, il changera de fusil d’épaule et rejoindra le journal La Presse, en 1995, en tant qu’ingénieur informaticien. Près de trois ans après, il se résoudra à repartir pour Odessa, en 1997, monter son entreprise.
«Les premiers jours de l’invasion, confie Taïeb à Leaders, furent terribles pour nous tous. Mais, nous avons dû nous y faire et surtout tenir bon. Pouvais-je laisser tomber mes salariés, mes biens et une partie de ma proche famille implantée en Ukraine ? » Profitant d’un évènement familial et de la fin du ramadan, il est rentré à Tunis pour quelques jours. Une surprise attendait sa femme, Mariana : elle devait obtenir un visant d’entrée bien qu’elle soit mariée à un Tunisien et que son contrat de mariage soit dûment établi en Tunisie et inscrit au registre de l’état civil et celui consulaire. Une semaine lui a été finalement accordée…
Taïeb Dridi et son épouse reprennent donc le chemin d’Odessa par avion via Istanbul puis la Moldavie, et le reste en voiture. Ils ont hâte de retrouver leurs enfants, petits-enfants, employés, compatriotes et amis. La ville ne comptait pas moins de 300 étudiants tunisiens. Si certains ont quitté l’Ukraine, d’autres ont préféré rester à Odessa.
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