L’ile du pardon: Le dernier chef-d’œuvre mondial de Ridha Béhi
Par Khadija Taoufik Moalla - Le sentiment que j’ai eu tout au long des deux heures de conduite pour rentrer chez moi, ce soir, était un sentiment de fierté! La fierté que dans mon pays existe des géants du cinéma tel que Ridha Béhi, capable de produire des films d’une rare beauté: «L’ile du pardon», quelle chance… quel plaisir… quelle joie d’avoir eu le privilège d’y assister!!!
Ce film est d’une telle profondeur que derrière chaque phrase du script, j’avais envie de dire au metteur en scène, stop… arrête toi, dis-moi plus… continu… tu n’as pas tout dit. Un scenario d’une profondeur pareille est très rare… Il dénote d’un très grand courage, d’une lucidité, d’un patriotisme aussi sans égal. Je pourrai écrire un livre rien que pour analyser chaque phrase, chaque geste, chaque regard… chaque mot prononcé et les centaines de mots non-dits…
Je ne suis pas une critique cinématographique, ni littéraire, mais un film pareil doit être enseigné non seulement dans tous les cours de cinéma, mais aussi dans les facultés, de droit, de sciences politiques, de lettres, d’histoire… Pourquoi?
Simplement parce que Si Ridha a eu le courage d’aborder un sujet très complexe, très profond, presque tabou: le pardon! Comment pardonner, pourquoi pardonner, à qui pardonner…or il n’y a pas de réponses à ces questions, car le pardon est une affaire tellement personnelle, tellement privée… tellement intime… et pourtant Ridha Béhi a osé les poser… ces questions très intimes, et en osant, il a tendu la main de part et d’autre de la Méditerranée…
Ce film n’est pas destiné au public Tunisien, il est aussi destiné au public Européen et pas seulement français ou Italien… c’est un film qui amorce courageusement une conversation qui est tellement en retard que presque personne n’a plus le courage d’avoir… et pourtant, nous ne pouvons pas tourner la page, passer au chapitre suivant, si nous sommes incapables d’analyser ce qui s’est passé, tout ce qui s’est passé… Nous le devons à nous-mêmes, à nos parents tout autant qu’à nos enfants et à nos petits enfants!
Ce film est un film mondial qui nous réconcilie avec nous-mêmes et notre histoire… je n’y suis pas et pourtant quelque part, je m’y retrouve… les lieux, les images, les lumières… tout y est. Pas une seule fausse note, pas un mot de trop ni en moins, pas une scène de plus, ou en moins… ce film nous interpelle toutes et tous car il nous oblige à ouvrir les blessures de nos ancêtres, à les nettoyer afin de pouvoir les refermer à jamais, comme le ferait un bon psychanalyste!
C’est à notre psychanalyse collective que Ridha Béhi nous invite, mais il y invite aussi ceux de la rive Nord… auront-ils l’intelligence émotionnelle de répondre présents… auront-ils le courage de tendre aussi la main… je ne sais pas… mais je l’espère en tout cas car il y va de notre avenir et du leur tout autant!
Khadija Taoufik Moalla