Presse écrite en Tunisie: Silence, on coule
La presse écrite manque de papier
L’un après l’autre, quotidiens, hebdomadaires et autres périodiques tirent leur révérence. Le verrouillage des abonnements publics et de la publicité tant publique que commerciale, la hausse vertigineuse du prix du papier (+40% depuis janvier 2022) et des autres charges, et l’érosion des ventes au numéro les condamnent quasiment tous à l’extinction. Ne parvenant ni à se réinventer, ni à bénéficier d’un soutien public au titre de la pluralité des expressions, la presse écrite se meurt. Quel dommage !
… Et Al Anwar cessa de paraître
Le doyen des hebdomadaires tunisiens en langue arabe a fini par rendre l’âme, mi-septembre dernier. Al Anwar, fondé il y a quarante ans par Béchir Salem Belkhiria, Amor Belkhiria, Habib Bouslama et Slah El Amri (qui a par la suite racheté les parts de ses actionnaires), a été emporté par la grave crise qui frappe les médias, la presse écrite particulièrement. Cet hebdomadaire, qui avait donné naissance au quotidien Echourouk, se voulait dans un style libanais, très populaire, privilégiant des articles courts et traitant de thèmes variés, avec une bonne place au sport.
Le groupe Dar El Anwar se dotera d’un autre titre, Al Moussawar, paraissant le lundi, et dont la «déclaration» de parution était établie au nom d’Amor Touil. Lui aussi cessera de paraître il y a quelques années en silence, comme Assabah El Ousboui, Assada, Al Bayane, Al Ilane, et autres hebdomadaires nés avant 2011. Parmi ceux parus depuis lors, seuls quelques rares titres résistent encore, très difficilement.
Adossé à Echourouk, qui demeure le premier quotidien tunisien, Al Anwar avait théoriquement de bonnes chances de survie, grâce à la mutualisation des charges communes. Mais, la vérité des chiffres financiers finira par le condamner à la disparition. Déplorant vivement cette extinction, le syndicat national des journalistes tire la sonnette d’alarme. «Les pouvoirs publics doivent cesser de considérer les entreprises de presse comme des entreprises à but lucratif et leur consentir une fiscalité avantageuse, lancer tout un programme de soutien, souscrire en nombre suffisant des abonnements, subventionner le papier, créer un organisme chargé de la programmation de la publicité publique, et régler les arriérés dus aux médias.» De son côté, la fédération tunisienne des directeurs de journaux déplore le rétrécissement des espaces d’expression et de débat, met en garde contre la descente aux enfers des journaux et appel à une action gouvernementale énergique de sauvetage du secteur.
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