Abdelaziz Barrouhi, notre confrère de Jeune Afrique : Ah, les risques du métier!
"Vieux baroudeur" du journalisme, Abdelaziz Barrouhi, notre confrère de Jeune Afrique a été souvent confronté à des situations difficiles lors de ses reportages. Car des émotions fortes, il en a connu au cours d'une longue et riche carrière. Que ce soit en Afrique, au Moyen Orient ou dans les autres points chauds du globe. Dire qu'il y allait le coeur léger, indifférend aux risques qu il encourait, c'était peut-être exagéré. Mais rien qu'à l'idée qu'il pouvait en ramenait des scoops, ou recueillir des interviews exclusives atténuait sa peur. Le grand mot est lâché : la peur, il en a éprouvé quelquefois au point de lui faire maudir le jour où il avait choisi ce métier. Son signe avant-coureur : des goutelettes de sueur qui perlent sur son front. Comme celles qu'il a eues dernièrement à El Ayoune au Sahara.
Appelé par la rédaction de son journal à Paris pour couvrir les évènements de Gdeim Izik, un immense camp dressé par des milliers de Sahraouis à quelque vingt kilomètres de la ville, il s'y rend, toutes affaires cessantes, par le premier avion, via Casablanca. Leaders l'a rencontré à son retour. Ecoutons Abdelaziz Barouhi le rapporter comme il l'a écrit dans son hebdomadaire:
"Le 2 novembre, en milieu de matinée, je prends la route menant à Smara. Après avoir franchi trois barrages de contrôle des forces de sécurité marocaines, mon chauffeur s’engage sur une piste en direction du camp, dont l’entrée est à portée de vue. Je lui demande de me laisser poursuivre à pied les quelque 300 à 400 m qui me séparent d’un petit groupe de Sahraouis, lesquels contrôlent le flux de véhicules pleins à craquer qui entrent et sortent du camp. Cagoulés, jeunes pour la plupart, pour certains munis de jumelles, ils se précipitent vers moi et m’encerclent. Après un long conciliabule au cours duquel je décline ma qualité de journaliste de Jeune Afrique, ma nationalité tunisienne, et leur explique que je me rends en reportage à l’intérieur du camp, ils me conduisent manu militari vers une tente de fortune et m’ordonnent d’y entrer."
Suit un interrogatoire. On l'accuse d'espionnage, de trahison. On se fait plus menaçant. On le filme avec une petite caméra. Les gardes qui l'entourent sont cagoulés. Soudain son juge ôte sa cagoule. Les goutelettes font leur apparition. Il échange quelques mots avec ses compagnons. Puis le verdict tombe: indésirable au camp, il est aussitôt expulsé. Le procès a duré quelques minutes qui ont paru une éternité pour Abdelaziz. Il en est quitte avec la peur. Il n'a pas pu réaliser son reportage dans le camp. Faisant contre mauvaise fortune, bon coeur, il se contentera cette fois-ci de faire un papier sur son arrestation. Hamdoullah! Dur métier de journaliste!
(Lire le reportage dans le numéro 2600 de Jeune Afrique en date du 7 au 13 novembre 2010)