Dr Mohamed Salah Ben Ammar: Dépasser le déni et aller de l’avant
« Alors que des centaines de fidèles célébraient la fin du pèlerinage juif annuel dans la synagogue de la Ghriba, un homme a ouvert le feu sur la foule mardi dernier. Quatre Tunisiens et un Français ont perdu la vie dans la fusillade meurtrière. » Alors que la synagogue, la plus ancienne d'Afrique, était clairement visée par l’assaillant, les autorités tunisiennes refusent pourtant de qualifier cette attaque d’antisémite. Un déni qui ne résiste pas à l’épreuve de l’histoire. Casser le thermomètre ne fait pas baisser la fièvre, parole de médecin.
Il y a un temps pour tout, le temps du deuil d’abord
Nos premières pensées vont aux familles des victimes à qui nous adressons nos condoléances les plus attristées. Il est aussi essentiel de saluer l’intervention rapide des forces de sécurité qui risquent tous les jours leurs vies pour nous protéger de meurtriers fanatisés.
Ce temps du deuil n’a pas été respecté et c'est intolérable. A peine l’information parvenue aux médias que des polémiques inacceptables dans de pareils moments ont surgi. Saison touristique en danger, déni de la réalité des faits, accusations absurdes, bref nous nous sommes offerts en spectacle au monde entier au moment même où nous aurions dû faire preuve de retenue et de compassion. L'irrémédiable a été commis et rien ne pourra le réparer.
Vient ensuite le temps de la colère, non moins important. Il s’agit de la troisième attaque de la synagogue de la Ghriba. Deux des trois attaques ont été l’œuvre d'éléments appartenant aux forces de l’ordre, personnes qui étaient censées protéger les lieux. En 1985, un soldat en faction devant la Ghriba avait ouvert le feu sur les pèlerins tuant cinq personnes. La version officielle de l’époque était déjà celle d’un accès de folie isolé. Puis vint l’attentat d’avril 2002 commis à l’aide d’un camion rempli de bonbonnes de gaz. Les autorités avaient déclaré dans un premier temps qu’il s’agissait d’un accident de la voie publique.
Les modes opératoires changent, le déni reste
Selon Goethe, celui qui oublie son passé est condamné à le répéter. Et l’histoire s’est répétée…
Attentat ou acte isolé d’un fou déséquilibré ? La polémique ravive la douleur. Le meurtrier souffrait-il de troubles mentaux ? Acte criminel ou terrorisme ? On tourne autour du pot.
L’enquête ne le dira jamais mais des médias évoquent déjà l’arrestation de deux complices. Acte antisémite ou non ? Le fait que ce lieu de culte israélite soit la cible d’attaques d’envergure à répétition n’autorise aucun doute, c’est un acte antisémite.
Il n'y a aucun doute sur l’implantation du judaïsme en Tunisie, et ce bien avant l’avènement du Christianisme, ils étaient là avant tout le monde. La répartition des communautés juives sur tout le territoire - de Gabès à Nabeul en passant par Jerba -attestent de l’enracinement de la religion juive en Tunisie. Pas une ville tunisienne n’avait pas sa synagogue et donc sa communauté juive.
Autochtones berbères judaïsés, juifs venus d’Orient après la destruction du Temple de Salomon, d’Andalousie et de Livourne. Ces communautés étaient très différentes dans leurs modes de vie, elles ne se mélangeaient pas mais elles étaient enracinées dans la géographie du pays. Soulignons que mise à part la communauté turque, la répartition de la population Musulmane a suivi la même évolution.
Histoire d'une rupture
La complexité du sujet rend toutes les interprétations hasardeuses. Il est classique de parler de la coexistence pacifique entre Musulmans et Juifs en Afrique du Nord comme d’une période idyllique. Il est vrai qu’il n’y a presque jamais eu en Tunisie d’antisémitisme d’État organisé comme en Europe mais d’après les historiens cette affirmation est à nuancer.
De fait, les Tunisiens Juifs ont bien fait l'objet de brimades et de mesures discriminatoires collectives, les vexations individuelles et les propos anti-juifs étaient quotidiens. Certains diront que ce n’était pas méchant, affectueux même. Je ne sais pas ce qu’en pensent les Tunisiens Juifs ?
Ainsi à titre d’illustration seulement, on relève que le système judiciaire, à l'exception toutefois des tribunaux Hanafites plus tolérants, a souvent été partial envers eux. La fameuse affaire Batou Sfez en 1857 en est la criante illustration. Les Juifs étaient traités en Dhimmi dans leur propre pays, ils étaient ainsi astreints au paiement d’une taxe appelée la jizya, et les plus pauvres d’entre eux étaient en cas de besoin affectés à des travaux forcés d’utilité publique. Les Juifs devaient aussi porter des signes vestimentaires distinctifs, ils n’avaient, par exemple, pas le droit de porter des chechias rouges comme leurs compatriotes musulmans, leurs chechias et leurs turbans devaient être de couleur noire.
Il est presque indécent de le préciser mais les Tunisiens Juifs avaient la même langue, les mêmes expressions, les mêmes superstitions, les mêmes habits, la même nourriture, la même musique, les mêmes origines ethniques, bref exactement la même culture que le reste de la population. « Telle proximité, telle ressemblance me troublaient : je me demandais où logeaient l’identité et la différence. Était-ce la même prière dans une autre langue ? Et ces juifs que je voyais au quotidien portaient aussi en eux à la fois ce qui me les rendait semblables et différents. C’est cette différence dans la ressemblance qui me troublait. » Disait ainsi feu Abdelwahab Meddeb dans son Histoire des Relations entre Juifs et Musulmans des Origines à nos Jours. Nous le verrons plus loin, l’exploitation du rejet de la dimension d’altérité de l’autre, celui qui nous ressemble tellement sera exploité.
En Tunisie, après l’indépendance, les manifestations anti-juives ont été rares au début mais pas exceptionnelles. En 1961, lors de la bataille de Bizerte, en pleine guerre d’Algérie, une rumeur prétend que la population juive de Bizerte aide les troupes françaises. Quelques manifestations anti-juives spontanées, dénoncées par le pouvoir s’organisent. On y entend des slogans tels que « Mort aux juifs ». Le parti destourien eut beau réaffirmer que les juifs sont des citoyens à part entière et que le pouvoir a confiance en leur loyauté, un climat d'insécurité́ et d'inquiétude s’est installé dans les différentes communautés juives tunisiennes.
Le génie incompris de Bourguiba
Au fil du temps, ce mal ne fera que s’amplifier. Après la guerre de juin 1967 des dizaines de magasins appartenant à des juifs et des synagogues furent incendiés ou mis à sac. Signe très significatif, Bourguiba qui était au summum de sa gloire n’est pourtant pas arrivé à calmer la foule. Il condamna violemment à la radio et à la Télévision « ces énergumènes irresponsables qui méritent la potence... » Mais n’est pas entendu par la population. Plusieurs dizaines de milliers de nos compatriotes juifs, dont de nombreux intellectuels, quittèrent, la mort dans l’âme leur pays. Du simple vendeur de casse-croûte au professeur en médecine, jamais ils n’ont réussi à faire leur deuil d’un pays qu’ils ont adoré jusqu’à leur dernier souffle.
1954, le président Bourguiba avait anticipé, il avait déclaré : « Les Néo-Destouriens s'opposent entièrement à l'antisémitisme et à la discrimination envers les Juifs de Tunisie. Ils sont pour l'égalité totale des droits […] Le gouvernement tunisien et les Néo-Destouriens feront tout pour assurer le bien-être des Juifs, mais si certains Juifs préfèrent émigrer pour telle ou telle raison en Israël, nous ne leur ferons aucune difficulté » et après l’indépendance un bureau tenu par l’Alliance Israelite Internationale a été ouvert à Tunis pour organiser le départ vers Israël des Juifs qui souhaitaient partir. Pour Bourguiba, le patriote pragmatique, l’intérêt de la Tunisie primait. Il voulait rassurer car il savait que son pays serait le grand perdant si cette élite partait.
De fait, au lendemain de l’indépendance et malgré les appels du pied d’Israël, nombreux sont les Juifs qui sont restés et ont eu à cœur de servir leur patrie. Albert Bessis a ainsi occupé le poste de ministre de la santé et le militant destourien André Barrouch, celui de la reconstruction et du plan, Henri Smadja dirigeait le journal « La Presse » et Simon Zana « Le Petit Matin ». « Les professeurs juifs que nous avions eus au collège, au lycée, puis à l’université, nous parlaient en tant que Tunisiens, vecteurs de la modernité. Je pense notamment à Marcel Maarek, professeur de mathématiques ; à Jean-Pierre Darmon ou Juliette Bessis, professeurs d’histoire, et tant d’autres, les Boulakia, Naccache, Perez, Bellaïche, Slama, Valensi, Sebag, etc. Nous percevions en eux des maîtres proches, alliés, aînés, amis qui nous initiaient à l’esprit critique, à la liberté, qui nous aidaient à nous configurer dans la conscience de soi. ». A. Meddeb
Faut-il rappeler que la vie académique, scientifique, culturelle du pays était pour beaucoup animée par ces monuments, chacun dans son domaine, le peintre Moses Levy, l’unique, l’exceptionnel Albert Memmi qui enseignait au Lycée Carnot, l’immense linguiste Claude Hagège y était surveillant, le peintre Victor Sarfati enseignait le dessin à Sadiki, le père de l’ophtalmologie tunisienne Dr Roger Nataf, Dr André Salomon Corcos, Maitre Claude Sitbon, Dr Daniel Uzan…et même la vie politique par d’autres comme Paul Sebag, les militants Georges et Gladys Adda, Béatrice Slama, Juliette Bessis, la grande et Giséle Halimi, le camarade Gilbert Naccache… Ils nous ont montré, ce que beaucoup ont encore du mal à admettre, il est possible d’être tunisien et moderne. « Ils tiraient la Tunisie vers le nord mais après leur départ la Tunisie s’est mise à dériver vers l’Est » disait A. Meddeb. Bourguiba ne disait pas autre chose. Durant la seconde guerre mondiale il a été avec Mohamed V les seuls leaders arabes à prendre position contre le nazisme.
Prenez le temps de relire la lettre envoyée le 10 août 1942 par Bourguiba au président par intérim du parti destourien Dr Habib Thameur. Bourguiba et ses compagnons venaient d’être libérés par Mussolini de la prison Haut-Fort Saint-Nicolas où les conditions de détention étaient inhumaines. Ils ont failli mourir et en 24 heures ils se sont retrouvés traités comme des rois, Hôtel Negresco de Nice puis au Palais Respighi à Rome… et retour à Tunis. Bourguiba lucide n’a pas été tendre avec Habib Thameur et ses compagnons car il savait que la tentation de soutenir l’Allemagne était grande : « L'ordre, vous est donné, à vous et aux militants, d'entrer en relation avec les Français gaullistes en vue de conjuguer notre action clandestine […] Notre soutien doit être inconditionnel. C'est une question de vie ou de mort pour la Tunisie ». Plus tard Bourguiba le visionnaire sera qualifié de traître par ceux qui n’ont rien compris à l’Histoire.
Nos chemins se séparent ou le refus d’entrer dans la modernité
Comment expliquer que les Tunisiens Juifs que rien ne distingue des autres citoyens à part la religion soient progressivement devenus aux yeux de leurs concitoyens une sorte de cinquième colonne ?
Accuser les minorités d’être au service de l’étranger est une rhétorique bien commode qu’on retrouve régulièrement dans l’histoire. Mais la différence de religion ne peut pas à elle seule tout expliquer.
Osons une hypothèse.
La route des Tunisiens Juifs et Musulmans s’est progressivement séparée. Vers 1860 les écoles de l’Alliance Israelite Universelle ont mis en Tunisie les petites filles et les garçons juifs sur le chemin d’une école gratuite et moderne. Quelques années plus tard, les transformations socio-culturelles et économiques dans la communauté juive n’ont pas tardé à devenir visibles. Disons qu’à travers cette évolution qui a accompagné la colonisation française un fossé s’est ouvert entre les deux communautés. Le refus de la modernité synonyme d’occident face à une soif de modernité synonyme d’émancipation.
Les jeunes Juifs, juristes, médecins, banquiers, professeurs diplômés des universités françaises sont sortis de la Hara, ils ont investi de nouveaux quartiers de la capitale comme Lafayette où de belles villas ont été érigées, ils ont pris des prénoms européens alors que l’immense majorité de leurs parents ne parlaient pas un mot de français. Il faudra bien plus qu’un article pour parler de la naissance de cette élite.
Fraichement diplômés, ils sont revenus au pays et se sont engagés dans l’effort de modernisation de leur pays, mais ils étaient tourmentés. Ils n'étaient pas naïfs, ils étaient conscients qu’une Tunisie indépendante pouvait, avec le temps, être tentée de les exclure. Le choix n’était pas facile mais beaucoup ont eu le courage de rester et de servir.
Il est facile d’accuser, de juger et de condamner les autres mais tous ceux qui crient haut et fort aujourd’hui contre ce qu’ils qualifient de double allégeance ou de traîtrise devraient prendre le temps de s’interroger sur la position qu’ils auraient adopté s’ils avaient été Tunisiens Juifs en 1956 ?
Évidemment, il y a eu des prises de positions moins vertueuses. En 1954 Charles Haddad, président de la communauté israélite de Tunis (que Bourguiba avait reçu à plusieurs reprises), s'est prononcé dans un discours public en faveur du maintien de la présence française. La suspicion toujours quiescente, envers la communauté juive a trouvé de quoi se nourrir. La puissance occupante qui a toujours joué sur les différences, l’exemple le plus criant est le décret Crémieux - qui octroie aux juifs d’Algérie la nationalité française contrairement aux musulmans. Même s’il n’a jamais été appliqué en Tunisie – diviser pour régner a été la politique des puissances coloniales.
Et puis comment oublier 1948 et la création d’Israël et l’expulsion des Palestiniens de leurs terres. Il était demandé aux Tunisiens Juifs de choisir « entre la justice et leur mère ». Humainement, ce choix était impossible à faire pour des personnes qui durant 3000 ans ont récité à la fin des prières cette petite phrase : " l'an prochain à Jérusalem ".
Avec la création de l’État d’Israël, toute manifestation de sympathie ou acte de soutien envers Israël devenait synonyme de double allégeance, pire de traîtrise. Un dilemme insolvable. L’histoire est tragique.
Le déni, jusqu’à quand ?
Le déni est la limite de la dimension paranoïaque. Nous sommes ciblés, l’étranger et les traîtres locaux vous mentent, soit ! Mais objectivement, très récemment encore, le pays a dû affronter une vague de racisme anti-noir. Le sujet était les personnes qui étaient entrées en Tunisie clandestinement mais il se trouve qu’elles étaient majoritairement noires et il se trouve que les racistes ont profité de l’occasion pour donner libre cours à leurs instincts les plus bas. Malgré de nombreuses attaques - parfois à l’arme blanche - émaillées d’insultes anti-noirs, nous avons minoré ou nié l’existence de racisme chez nous. Malgré la levée de boucliers des ONG de défense des droits de l’homme et de la communauté internationale, nous avons assuré que la négrophobie n’existait pas en Tunisie. Circulez, il n’y a rien à voir. Était-ce la meilleure façon de rendre notre société plus humaine ?
Le problème est que la diabolisation du Juif a des racines profondes et différentes, il a eu lieu après leur départ mais il n’en est pas moins réel. Le déni dérive d’une interprétation qui refuse à chaque fois de prendre en compte la réalité des faits. La haine s’est amplifiée au fil des années.
Nous aurons beau crier haut et fort au monde entier qu’étant nous-mêmes sémites nous ne pouvons pas être qualifiés antisémites, cela n’y changera rien.
Nos concitoyens, surtout ceux qui comme moi ont eu à côtoyer nos compatriotes Juifs, parlent d’une vie commune les larmes aux yeux. Ils rejettent cette analyse des faits. La solidarité entre les deux communautés n’est pas une vue de l’esprit, même aujourd’hui elle reste forte. Presque hebdomadairement quand ma mère cuisinait un plat spécial je devais traverser notre rue avec un couffin plein pour l’amener chez nos voisins juifs, la réciproque était tout aussi vraie. Mes amis, mes complices de jeux étaient aussi bien musulmans que juifs. Les immigrés le savent bien, nos jeunes diplômés à l’étranger le vivent au quotidien, rencontrer et travailler avec un compatriote Juif est souvent une chance.
Pas d’amalgames, des meurtriers antisémites
Reconnaître qu’il y a un problème à traiter, accepter de lui attribuer les bons qualificatifs est une étape nécessaire si l’on veut le traiter. Le déni est la limite de la dimension paranoïaque. L’exploitation du rejet de la dimension d’altérité de l’autre, celui qui nous ressemble tellement, n’est pas innocente dans le cas d’espèce. Ils trouvent des arguments dans l’actualité quotidienne en Palestine.
Mais il refuse de se poser la question, pourquoi le nombre de Tunisiens Juifs est passé de 150 000 ou 200 000 à, à peine 1500 personnes actuellement. Détrompez-vous, tous ceux qui sont partis ne l’ont pas fait de gaité de cœur et la Tunisie les a perdus. Ils sont partis parce qu’ils ne se sentaient plus en sécurité. Certains diront que personne ne les a obligés à partir ? C’est d’autant plus vrai que les dirigeants de l’époque, l’État n’a su rassurer, n’a pas pu, n’avait pas les moyens d’offrir les garanties de sécurité que tout pouvoir devrait offrir à ses citoyens. Malgré les efforts du gouvernement tunisien de l'époque, la peur probablement alimentée par des mains non innocentes a pris le dessus.
Enfin viendra le temps de l’espoir
Les discours enflammés des dictateurs, le racisme, les actes antisémites font encore beaucoup de mal au monde arabe. La Tunisie qui a toujours essayé de rester à l’écart et ne s’est jamais laissée emporter par la haine et elle ne le fera pas aujourd’hui.
Lutter contre ces démons qui rongent le monde et qui sont les montures des régimes autoritaires. J’ai dit racisme, xénophobie et antisémitisme. Éduquer la jeunesse, punir les actes racistes et antisémites, raconter objectivement l’histoire de ces idéologies qui reviennent en Europe et ailleurs et qui dans le passé ont fait de la haine de l’autre, du voisin, du plus proche, celui qui est comme nous, leur fonds de commerce. Ne pas oublier qu’elles ont fait des millions de morts.
Aujourd’hui la lutte contre le racisme et de l’antisémitisme mérite une réflexion nationale qui devra être suivie de l’élaboration d’un plan national contre toutes les formes de discriminations. C’est une nécessité sociétale.
"Nous ne sommes pas responsables, donc ne pouvons être qualifiés d’antisémites". La dénégation n’est qu’une affirmation déguisée sous la forme de la double négation. Il ne suffit pas de traiter les criminels de terroristes marginaux. Il est temps d’essayer de comprendre pourquoi certains et ils ne sont pas des exceptions malheureusement, sont arrivés à accepter l’idée que tuer des Juifs lors d’un pèlerinage est acte téléguidé pour nous pousser à reconnaître Israël ? N’est-il pas honteux que la lutte du Peuple Palestinien pour ses droits soit à chaque fois associée aux meurtres de Juifs innocents quelque part dans le monde?
Les intolérables injustices faites au Peuple Palestinien sont le fait du gouvernement israélien, on doit s’y opposer de toutes nos forces mais intelligemment pas bassement en justifiant l’injustifiable.
Il faut être aveugle pour ne pas réaliser que nous sommes manipulés depuis 70 ans par des esprits étroits et que les intérêts des dictateurs qui nous ont gouvernés convergent avec ceux du gouvernement israélien.
Des deux bords, l'exploitation politique du désespoir, sème la haine dans une jeunesse qui est naturellement généreuse et aime la paix, elle l’enferme dans un nihilisme dangereux. Que de vies détruites, que de malheurs semés par la bêtise des politiques. C'est insupportable.
Il nous faut de dépasser notre colère et nos préjugés pour voir que la meilleure façon d’aider les Palestiniens, n’est pas de tomber dans le négationnisme ou l’antisémitisme, c’est même exactement le contraire qu’il faut faire.
Affronter la réalité, sortir du déni que les discours démagogiques exploitent, refuser d’amalgamer la défense des droits légitimes des Palestiniens à un État et les actes antisémites. Il faut dénoncer ces dérives destructrices, bêtes et méchantes qui témoignent d’un aveuglement haineux.
Au-delà de l’insupportable spectacle de la violence qui s’exerce à l’encontre des minorités, nous devons garder en tête que la brutalité affecte celui qui en fait les frais comme celui qui la prodigue. La souffrance du premier étant indissociable de l’aliénation du second. Parole d’Albert Memmi. Un Tunisien… juif.
Dr Mohamed Salah Ben Ammar
PS : Article reçu par la rédaction le lundi 15 mai 2023