Hajer Gueldich: Tout sur la 43e session ordinaire du Conseil exécutif de l’Union africaine des 13 et 14 juillet 2023 à Nairobi
La 43e session ordinaire du Conseil exécutif de l’Union africaine a eu lieu les 13 et 14 juillet 2023 à Nairobi, la capitale du Kenya. Elle devrait être suivie par la 5e réunion de coordination semestrielle entre l'Union africaine (UA), les Communautés économiques régionales (CER) et les Mécanismes régionaux, précisément demain 16 juillet 2023.
Cette réunion s’est déroulée dans un contexte international particulièrement difficile, marqué par de nombreuses mutations géopolitiques et économiques, combinées à la dégradation de la situation sécuritaire consécutive aux conflits, à la montée en puissance du terrorisme et à l’expansion de l’extrémisme violent, ce qui donne lieu à “un tableau global du continent qui ne prédispose pas à une mise en œuvre optimale de nos programmes et projets de développement”, comme a préconisé Mme Monique NSANZABAGANWA, vice-présidente de la Commission de l’Union africaine.
D’après la vice-présidente de la Commission de l’Union africaine, l’accélération de la mise en œuvre de la ZLECAf reste tributaire, entre autres, de l’opérationnalisation du Fonds d’Ajustement de la Zone, de l’aboutissement des négociations sur les règles d’origine, du renforcement des infrastructures et de l’implication du secteur privé.
Elle a, par ailleurs, souligné que le processus de réforme est entré dans sa phase d’achèvement, avec deux volets en cours de finalisation portant, d’une part, sur la révision des mandats et des structures des organes et institutions et, d’autre part, sur la division du travail entre l’UA, les Communautés économiques régionales (CER), les mécanismes régionaux et les États africains.
S’agissant de l’Agenda 2063 de l’UA, elle a rappelé que la première décennie de mise en œuvre a été finalisée, notant que les enseignements tirés ont servi à préparer la mise en œuvre de la deuxième décennie, selon un processus participatif ouvert aux pays africains et aux acteurs du secteur privé et de la société civile.
La réunion de cette année a examiné et approuvé le budget financier de l'Union africaine pour l’exercice 2024, d’un montant total de 605 756 610 dollars. Elle a aussi permis d'évaluer la mise en œuvre des décisions des organes délibérants et d'adopter de nouvelles décisions sur des questions de fond d'intérêt continental.
Lors de cette session, le Conseil exécutif de l’UA avait examiné, précisément, le rapport de la 46ème session ordinaire du Comité des Représentants permanents (COREP), ainsi que le rapport du Secrétariat de la Zone de libre-échange continental africaine (ZLECAf) sur la mise en œuvre de la Zone et du thème de l’année 2024 relativement à l’éducation.
La réunion a également examiné les rapports des Comités du Conseil exécutif et des Comités ad hoc, la stratégie et le cadre d’orientation des partenariats de l’UA, ainsi que les questions relatives à l’environnement, aux changements climatiques et à l’économie bleue, avec un accent particulier sur les défis et les perspectives pour l’intégration en Afrique, ainsi que la réforme institutionnelle de l’UA, la note conceptuelle et la feuille de route du thème de l’année 2024 de l’UA sur l’éducation.
Les décisions par rapport aux points à l’ordre du jour suivants ont été approuvées:
1. Examen du rapport de la 46e session ordinaire du comite des représentants permanents (COREP)
Après débat, le rapport de la 46e session ordinaire du COREP (qui s’est déroulée du 19 juin au 4 juillet 2023 à Addis abeba) a été approuvé avec les modifications convenues.
2. Examen du rapport du secrétariat de la ZLECAF sur la mise en œuvre de la ZLECAF et du thème de l’année 2023
Après avoir rappelé la décision de la Conférence Assembly/AU/Dec.861(XXXVI) sur le thème de l'année «Accélération de la mise en œuvre de la ZLECAf» et la décision EX.CL/Dec.1202(XLII) sur le rapport du Secrétariat de la ZLECAf de février 2023, le Conseil exécutif a pris note du rapport du Secrétariat de la ZLECAf sur la mise en œuvre de la ZLECAf et la célébration du thème de l'année et des recommandations qu'il contient.
Le Conseil exécutif a aussi demandé au Secrétariat de la ZLECAf de continuer à soutenir la négociation des instruments juridiques en suspens, de mettre en œuvre la Stratégie du secteur privé de la ZLECAf, ainsi que l'Accord de siège avec le pays hôte et a chargé le Secrétariat de la ZLECAf de s'engager dans des activités génératrices de recettes et de mobilisation de ressources pour faciliter la mise en œuvre intégrale de la Zone de libre-échange continentale et de faire rapport, tel que le précise le Règlement financier révisé.
En outre, il a chargé le Secrétariat de la ZLECAf de continuer à suivre la mise en œuvre de la Zone de libre-échange continentale et de présenter un rapport actualisé à la 44e session ordinaire du Conseil exécutif en février 2024.
3. examen de la note conceptuelle et de la feuille de route du thème de l’année 2024 de l’union africaine sur l'éducation
Le thème proposé pour l’année 2024 s’articule comme suit: «Éduquer une Afrique adaptée au 21e siècle : Construire des systèmes éducatifs résilients pour un accès accru à un apprentissage inclusif, qualitatif, tout au long de la vie et pertinent pour l’Afrique».
Des activités nationales, régionales, continentales et mondiales seront mises en œuvre tout au long de l'année pour commémorer le thème de l'UA pour l'année 2024. Ces actions commémoratives seront l'occasion de réaffirmer l'engagement politique des gouvernements africains en faveur de l'éducation.
En outre, le fait que l'éducation soit le thème de l'année 2024 permettra de renforcer la dynamique créée lors du Sommet sur la transformation de l'éducation (TES) et, en collaboration avec les États membres et les partenaires, de mettre l'accent, à l'échelle du continent, sur le redressement après le COVID-19 et sur la mise en place de systèmes résilients permettant d'améliorer l'accès à une éducation inclusive, de qualité et adaptée aux besoins de l’Afrique.
Cela se fera par le biais d'actions concrètes à mettre en œuvre au sein des États membres de l'Union africaine en vue de la transformation de l'éducation en Afrique.
4. Examen des rapports des comités du conseil exécutif et des comités ad hoc
a) Rapport de la réunion conjointe du Comité ministériel sur le barème des contributions et les contributions et du Comité F15
• Incidences financières de l'ajout du poste de vice-recteur à la structure de l'Université panafricaine : Il a été rappelé la Décision de la Conférence Assembly/AU/Dec.589(XXVI) de janvier 2016 qui approuve les Statuts amendés de l'Université panafricaine et l'article 13 qui prévoit deux postes de vice-recteur, à savoir (i) un vice-recteur aux affaires académiques et étudiantes et (ii) un vice-recteur à la recherche, au développement et à la coopération ; tout en approuvant les incidences financières encourues par la création du poste permanent supplémentaire de vice-recteur à la recherche, au développement et à la coopération.
• Incidences financières des modifications aux structures du Centre africain de prévention et de lutte contre les maladies (CDC-Afrique): Il a été rappelé le recrutement destiné à pourvoir 72 postes dans le cadre des fonds actuellement disponibles provenant des contributions des États membres et a été approuvé le recrutement de personnel sous contrat à durée déterminée pour les 83 postes restants à titre exceptionnel, grâce à un financement sur cinq ans des partenaires internationaux conformément à la durée des subventions des partenaires. Il a, en outre, affirmé que cette approbation est une mesure extraordinaire et ponctuelle et qu'elle ne crée pas de précédent auquel d'autres organes de l'Union pourraient se référer.
b) Rapport du sous-comité sur la réforme des structures - EX.CL/1435(XLIII)
• Création du Fonds de pension du personnel de l'Union africaine
Le Conseil exécutif a approuvé la création du Secrétariat du Conseil d'administration du Fonds de pension du personnel, au sein de la Direction de la gestion des ressources humaines, sans coût supplémentaire pour les États membres, et qui devrait être conforme aux Statut et Règlement du personnel.
• Réorganisation de la structure de l'AUDA-NEPAD
Le Conseil exécutif a demandé à l'AUDA-NEPAD d'accélérer la mise en œuvre de la réorganisation interne en cours de son modèle d'exécution et d'explorer avec les États membres la possibilité d'étendre sa présence, aux niveaux national et régional, afin d'accélérer la mise en œuvre des programmes prioritaires de l'Agenda 2063 et a approuvé la réorganisation de la structure de l'Agence, qui sera financée par les ressources existantes et n'entraînera aucun coût supplémentaire pour les États membres.
c) Rapport du Sous-comité du COREP sur les questions d'Audit
Le Conseil exécutif a approuvé les rapports d'Audit interne sur l'exécution budgétaire des organes de l'UA (CAFDHP, CCUAC, ZLECAf, AUDA-NEPAD, ECOSOCC, PAP, CADHP, MAEP, CAEDBE, CDC et CUA) pour l'exercice clos le 31 décembre 2022, ainsi que les recommandations qu’il contient, tout en se déclarant préoccupé par le faible taux d’exécution des programmes au sein de la plupart des organes.
Il a, en outre, demandé à tous les responsables de veiller à ce que la planification budgétaire et l'exécution des programmes soient améliorées, conformément aux décisions précédentes du Conseil exécutif EX.CL/Dec.1143 et EX.CL/Dec.1168.
d) Rapport du Comité ministériel sur les candidatures africaines au sein du système international
Le rapport sur les candidatures africaines au sein du système international a été examiné et entériné par le Conseil exécutif, après avoir été longuement débattu en plénière.
e) Rapport du Comité ministériel sur les défis de la ratification/adhésion et de la mise en œuvre des Traités de l’OUA/UA
Le Conseil exécutif a pris bonne note du rapport intérimaire du Comité ministériel sur les défis liés à la ratification/adhésion et à la mise en œuvre des traités de l'OUA/UA, et des recommandations qui y figurent et a encouragé les États membres à ratifier tous les traités de l'OUA/UA ou à y adhérer, afin d'assurer leur ratification universelle, leur entrée en vigueur et leur mise en œuvre. Il a été demandé aux organes de l'UA et à la Commission en particulier de:
1. Veillé à ce que les avant-projets de traités soient techniquement corrects et cohérents;
2. Consacrer suffisamment de temps à l'élaboration des traités et à la recherche d'un consensus par le biais de consultations;
3. Convoquer une réunion d'experts des États membres pour élaborer des lignes directrices de l'UA sur l'élaboration des traités et examiner tous les traités de l'OUA/UA qui se chevauchent et les soumettre au CTS Justice et affaires juridiques pour examen, en vue de leur adoption par l'organe délibérant compétent.
4. Il a aussi été demandé à tous les Comités techniques spécialisés (CTS) d'inscrire la question de l'état de ratification / adhésion et de mise en œuvre des traités de l'OUA / UA relevant de leur compétence, et au Bureau du Conseiller juridique de fournir l'appui nécessaire à cet égard.
5. Examen de la stratégie et du cadre d’orientation des partenariats de l’UA
La question des partenariats a été abordée de façon critique, surtout suite à l’interrogation de l’Afrique du Sud relativement au contrôle et au suivi des partenariats, des montants promis par les partenaires et de la manière à exécuter ces programmes. Il a été proposé notamment de penser à des mécanismes de suivi de la mobilisation effective de ces fonds et de ces ressources au profit de l’Afrique et de la population africaine.
A. Partenariat UA-UE
Le Conseil exécutif a demandé au COREP, en étroite collaboration avec la Commission et l'UE, de convenir des dates de la 3ème réunion ministérielle UA-UE qui se tiendra à Bruxelles (Belgique), immédiatement après la 1ère réunion du comité ministériel de suivi UA-UE; et en étroite collaboration avec la Commission et l'UE, à entamer le processus préparatoire et l'élaboration des documents finals pour les réunions ministérielles UA-UE.
B. Partenariat Afrique – Monde arabe
Le Conseil exécutif a demandé au COREP et à la Commission de fixer les dates exactes de la tenue du 5e Sommet Afrique-Monde Arabe en novembre 2023 à Riyad (Royaume d'Arabie saoudite) et de coordonner avec la Ligue des États arabes et le pays hôte le processus préparatoire dudit Sommet et, en étroite collaboration avec la Commission, d'informer le Royaume d'Arabie saoudite de la décision EX.CL/Dec.397 (XII) du Conseil exécutif, qui demande un moratoire sur les nouveaux partenariats.
C. Conférence internationale de Tokyo sur le développement de l'Afrique (TICAD)
Le Conseil exécutif a approuvé la proposition faite par le Gouvernement japonais de tenir la prochaine réunion ministérielle de la TICAD à Tokyo (Japon), à une date appropriée en 2024 et, en étroite collaboration avec la Commission et le gouvernement du Japon, de convenir des dates exactes en 2024 pour la tenue de la réunion ministérielle de la TICAD à Tokyo (Japon) et d'entamer tous les processus préparatoires nécessaires.
D. Afrique – Inde
Le Conseil exécutif a demandé au COREP, en étroite collaboration avec la Commission et l'Inde, de convenir des dates exactes du 4e sommet Afrique-Inde qui se tiendra au 4e trimestre de 2023 à Addis-Abeba (Éthiopie).
E. Partenariat Afrique-Corée:
Le Conseil exécutif a demandé au COREP, en étroite collaboration avec la Commission, d'informer la Corée de la décision EX.CL/Dec.397 XII) du Conseil exécutif, qui demande un moratoire sur les nouveaux partenariats.
6. Les élections
Le Conseil exécutif avait, en outre, élu les membres suivants:
a) Pour la Commission africaine des droits de l'Homme et des peuples (CADHP) pour un mandat de 6 ans : M. Remy NGOY LUMBU (RDC), Salma SASSI SAFFER (Algérie), Hatem ESSAIEM (Tunisie), Maria Teresa MANUELA (Angola).
b) Pour le Conseil consultatif de l'Union africaine contre la corruption (CCUAC) pour un mandat allant d'octobre 2023 à juillet 2025 : Mme. Marthe DORKAGOUM BOULARANGA (Tchad), M. Principe NTIBASUME (Burundi), Mme. Abeba Embiale MENEGSTE (Ethiopie), M. Cheikh Baba AHMED (Mauritanie), Mme. Erica Tshenolo NDLOVU (Botswana).
c) Pour le Comité d'experts de l'Union africaine sur les droits et le bien-être de l'enfant (CAEDBE) pour un mandat de 5 ans: M. Ghislain ROCH ETSAN (Congo), Mme. Sabrina GAHAR (Algérie), Mme. Poloko Nuggert NTSHWARANG MMONADIBE (Botswana),
d) Pour la Commission de l’Union africaine pour le droit international (CUADI) pour un mandat de 5 ans: M. Kevin Ferdinand NDJIMBA (Gabon), Mme. Samia BOUROUBA (Algérie), Mme. Sindisio Ngatsha SICHONE (Zambie), M. Alain Didier OLINGA (Cameroun).
En conclusion
Le projet de décisions de la 43e session ordinaire du Conseil exécutif de l’Union africaine a été discuté jusqu’à très tard la nuit du 14 au 15 juillet 2023, après de longues heures de débat, comme c’est à l’accoutumé au sein de l’organisation panafricaine.
En préparation de la 5e réunion de coordination entre l'UA, les CER et les mécanismes régionaux du 16 juillet 2023, un projet de déclaration a aussi été discuté. Cette dernière réunion devrait porter sur les points suivants:
1. Examen du Rapport du Président de la Commission de l’UA;
2. Examen du Rapport sur la ZLECAf;
3. Etat de l’intégration régionale par les CER ;
4. Examen du rapport sur la division du travail;
5. Examen d’exemples de réussite de coopération entre UA et CER et entre CER dans le cadre de l’Agenda de l’intégration;
6. Examen des questions relatives à l’environnement, aux changements climatiques et à l’économie bleue;
7. Briefing sur la médiation en Ukraine et en Russie;
8. Initiatives continentales de la BAD;
9. Examen et adoption du projet de déclaration de la 5e réunion de coordination entre UR, CER et mécanismes régionaux.
Par Hajer Gueldich
Professeure agrégée des Universités à la Faculté des sciences juridiques, politiques et sociales de Tunis- Université de Carthage, Directrice du Master de recherche en droit et politiques de l’Union africaine et Présidente de la Commission de l’Union africaine pour le droit international