Jalila Hafsia, la journaliste, la romancière et la féministe qui nous quitte
Figure de proue de la vie culturelle tunisienne dès l’aube de l’indépendance, Jalila Hafsia s’est éteinte à l’âge de 95 ans. Longtemps au ministère des Affaires culturelles, elle avait été notamment à la tête du Club Taher Haddad, en pleine médina de Tunis, à l’Espace de la Place Pasteur puis à celui de Sophonisbe à Carthage. Avant-gardiste, elle y invitait tout ce que le milieu des arts et des lettres comptait en talents, animait des débats de qualité et organisait des manifestations attractives.
Jalila Hafsia était aussi une grande journaliste culturelle, gratifiant les lecteurs du quotidien La Presse d’articles, d'interviews et de reportages prisés. Pas une exposition d’art, un concert, une représentation théâtrale, une projection d’un nouveau film tunisien, ou un festival, où Jalila n’était pas présente. Ses critiques, parfois controversées, étaient suivies de près et appréciées.
Tôt, Jalila Hafsia révèlera ses talents de romancière. Elle sera la première femme tunisienne à publier un roman en langue française. On lui doit cinq ouvrages entre romans, entretiens, nouvelles et chroniques familiales :
• Cendre à l'aube (roman), Tunis, Maison tunisienne de l'édition, 1975 (réimpr. 1978);
• Visage et rencontres (correspondance ou entretiens), Tunis, Maison tunisienne de l'édition, 1981;
• La Plume en liberté (essai avec dessins de Chedly Belkhamsa), Tunis, Société d'arts graphiques, d'édition et de presse, 1983;
• Soudain, la vie (nouvelles et textes courts), Tunis, Chama, 1992;
• Instants de vie (chronique familière), Tunis, 2007-2015.
Engagée depuis sa jeunesse dans l’action féministe, elle sera parmi les premières femmes tunisiennes à saluer les nouvelles mesures prises par Bourguiba, dès les premières semaines de l’indépendance en faveur de la femme. Depuis lors, leurs relations ont été très proches.
Jalila Hafsia aura été une grande mémoire de la vie culturelle tunisienne durant ces dernières décennies, connaissant tous les acteurs et ayant vécu ses grands moments.
Allah Yerhamha.