L’électricien palestinien abattu par un de ces «héros» israéliens jouissant d’une totale impunité
Par Mohamed Larbi Bouguerra - Les «héros» d’Israël sont si nombreux ! Ils ornent les timbres postaux. Ils se recrutent parmi les ministres comme parmi les gardes-frontières. Le 24 mars 2016, Elor Azaria, un Franco-Israélien qui a tiré une balle dans la tête de Abdelfattah Chérif blessé et à terre est un «héros» fêté sur les plateaux de télévision et dans les festivités locales. Autre «héros», ce soldat qui a mit fin aux jours de Shireen Abou Akleh à Jénine le 11 mai 2023 malgré sa veste de journaliste bien visible…. «héros» également aussi ces agents israéliens qui ont failli faire tomber par terre son cercueil recouvert du drapeau palestinien à l’entrée de l’église! Et sans oublier Baruch Goldstein, cet Américano-israélien qui a assassiné 29 Palestiniens en prière à l’aube, en février 1994 à Hébron et qu’adore Ben-Gvir qui expose une immense photo de ce meurtrier dans son salon, «cet ancien voyou devenu ministre de la police passé maître dans l’art de la provocation» (Le Monde, 27-28 août 2023, p.3)
Benny Gantz, le palestinien et la justice hollandaise
Le ministre Benny Gantz est un autre «héros» d’Israël, tueur de femmes et d’enfants sans armes: Ismail Ziada, qui avait saisi la justice néerlandaise en septembre 2019, dit avoir perdu six membres de sa famille (sa mère, trois frères, une belle-sœur et un jeune neveu) ainsi qu'un ami dans un raid aérien de l'armée israélienne sur le camp de réfugiés d'Al-Bureij, dans la bande de Gaza, le 20 juillet 2014, dans le cadre de l'opération "Bordure protectrice".
Ismail Ziada tient Benny Gantz, ministre de la Défense de l’Etat sioniste à l’époque, pour responsable de la mort de ses proches dans un raid sur Gaza en 2014.
La Cour suprême néerlandaise a débouté vendredi 25 août 2023 un Palestinien, également citoyen néerlandais, de son appel contre ce criminel de guerre.
Entre Occidentaux, on se soutient. Les BRICS mettront-ils bon ordre bientôt à ces injustices flagrantes?
Aux Pays-Bas en effet, on protège l’Etat sioniste: le 4 octobre 1992, le gouvernement hollandais a caché le fait que le Boeing 747 cargo de la compagnie israélienne El Al qui s’est crashé sur un immeuble d’Amsterdam - faisant une quarantaine de morts- transportait un composé chimique nécessaire à la production du sarin, un gaz de combat interdit par les conventions internationales aussi bien en Israël que dans la Syrie du Dr Bachar el Assad. Le produit venait des Etats Unis et était destiné à l’Institut israélien de recherche biologique près de Tel Aviv, producteur d’armes chimiques malgré la signature d’Israël sur le traité les bannissant.
Les «héros» d’Israël sont si nombreux: en juillet 2023, des dizaines de députés israéliens ont voté une loi permettant aux communautés coopératives de refuser de louer leurs appartements à des non-juifs. Avez-vous oublié qu’Israël est la seule «démocratie» du Moyen-Orient et que la Palestine est le seul territoire occupé en ce XXIème siècle? «En Israël, si vous n’êtes pas juif, vous n’êtes pas accepté.» écrit l’éditorialiste de Haaretz (27 juillet 2023). De son côté, Amiram Levin, ancien directeur adjoint du Mossad et un ancien commandant de Tsahal reconnaît : «L’apartheid en Cisjordanie est exactement celui du temps de l’Allemagne nazie. En 57 ans, il n’y a pas eu de démocratie. Il y a eu là un apartheid absolu.» (Haaretz, 13 juillet 2023).
Impunité absolue des assassins de palestiniens
Gideon Levy écrit dans le quotidien israélien Haaretz (24 août 2023) et fustige le silence des médias et des Israéliens face à des meurtres de sang froid commis par la police et l’armée sur des Palestiniens:
«Le clip vidéo est horrible. Un groupe de jeunes hommes s’occupe d’un homme blessé qui est allongé sur la route, on entend les cris de personnes vivant à proximité en arrière-plan. Un homme vêtu d’une chemise blanche est vu courant vers la personne blessée. Une ambulance fait retentir sa sirène. Et puis, soudain, l’horreur. Un coup de feu est entendu et une balle atteint l’homme en chemise blanche, qui est abattu par derrière. Il tombe sur son visage.
Amid Bani Shamsa, un électricien de 33 ans, père de trois enfants, est hospitalisé dans un état critique. Mardi 22 août, il a été transféré de l’hôpital Rafidiya de Naplouse à l’hôpital Istishari de Ramallah, mais son état reste critique….. Israêl a à peine entendu parler de [l’assassinat de sang froid par un policier des frontières] de Bani Shamsa.
Bani Shamsa a été victime d’une tentative d’exécution Il n’y a pas d’autre façon de décrire les circonstances de cette fusillade criminelle et répugnante. Un homme non armé va aider un homme blessé allongé sur la route, et un tireur d’élite vise sa tête et fait feu à distance. C’est le moment de déplorer le fait qu’il n’y a (encore) pas de peine de mort en Israël. S’il y en avait eu, peut-être que Bani Shamsa aurait au moins été exécuté après une procédure judiciaire.
En attendant, on peut procéder à des exécutions sans procès, sans raison, juste pour l’enfer. Peut-être pour satisfaire la soif de tir ou le désir de vengeance des soldats et des gardes-frontières israéliens. Peut-être voulaient-ils dire comment ils avaient tué un terroriste quand ils seront rentrés chez eux. Peut-être était-ce parce qu’ils savaient qu’aucun mal ne leur arriverait s’ils tiraient une balle dans la tête d’un Palestinien.
Tirer sur quelqu’un qui tente de donner les premiers soins à une personne blessée est un crime de guerre du plus haut degré. J’espère qu’à la suite de la révision judiciaire, les gardes-frontières comme celui qui a tiré dans la tête de l’électricien de Beita seront désormais poursuivi devant de la Cour pénale internationale de La Haye. C’est seulement devant cette juridiction qu’il y a une chance qu’ils paient pour leurs crimes. Ici, en Israël, ils seront considérés comme des héros.
Leur victime n’a menacé personne, il n’était pas armé, et on peut supposer qu’il n’a pas pris part à la résistance légitime des résidents palestiniens à l’invasion de leur village de Beita par la police des frontières. Beita se bat depuis de nombreux mois contre le vol de leurs terres par l’avant-poste insolent et maléfique des colons d’Evyatar. Amid, n’est pas la première victime de ce village ni la dernière. Il n’est pas non plus la première ni la dernière victime d’une exécution ces dernières semaines.
Cette semaine, j’étais à Jéricho pour enregistrer les circonstances de la mort d’un jeune de 16 ans, qui se trouvait sur son scooter dans le camp de réfugiés adjacent d’Aqbat Jaber. Lui aussi a été abattu par un garde-frontière, à distance, non pas dans la tête mais dans la poitrine, un petit changement tactique. Cela aussi était une exécution.
La semaine dernière, nous avons raconté la fusillade folle sur une voiture qui roulait innocemment, sans raison. Un étudiant a été tué et son ami a été blessé. Un mois plus tôt, une autre fusillade folle sur une voiture en mouvement. Cette fois, la fusillade a laissé deux jeunes handicapés. Qu’en est-il du soldat de Nabi Saleh, qui a tiré à distance, touchant Mohammed Tamimi, âgé de deux ans et demi, à la tête et le tuant en juin? N’était-ce pas une exécution ? Lorsque vous tirez une rafale sur une voiture garée, dans laquelle un bébé vient d’être placé, vous l’exécutez.
Dans la réalité actuelle, de telles exécutions ne feront qu’augmenter. Les médias israéliens ne les rapportent presque jamais. Personne, aucun Israélien, ne serait troublé même s’ils étaient dûment signalés…… Quand tout est enveloppé dans le cadre d’une guerre contre le terrorisme, avec seulement des Palestiniens considérés comme terroristes**, avec l’armée et la police procédant à des exécutions sans être désignées comme les agences de mise à mort d’un État terroriste; lorsque les attaques sont définies comme des attaques terroristes uniquement lorsque des Palestiniens tuent des Juifs – il n’est pas étonnant que l’histoire de la tentative d’exécution d’un électricien de Beita ait été publiée presque exclusivement dans Haaretz. Après tout, qui s’intéresse à ce que quelqu’un se fasse tirer une balle dans la tête, comme ça, comme si ce n’était rien?»
Mohamed Larbi Bouguerra
** En fermant les yeux sur le terrorisme des colons contre les villages palestinien- avec la protection de l’armée.