Derna: L’urgence de la reconstruction
L’ampleur de la catastrophe est difficile à réaliser.
La ville de Derna, dans l’Est de la Libye, non loin de Benghazi, ne parvient pas encore à s’en remettre. Des quartiers entiers ont été emportés par les eaux torrentielles déclenchées le 10 septembre dernier, suite au cyclone Daniel. Parmi une population de 100 000 habitants, le nombre de victimes fait controverse: plus de 25 000 morts et disparus au moins. Un chaos général s’est installé.
Dans un pays miné par ses différends politiques et rongé par ses divisions multiples, l’organisation des secours a quasiment échappé, les premiers jours, aux autorités des deux gouvernements, celui de Benghazi et celui de Tripoli. La population locale a dû compter sur ses propres ressources pour affronter ce grand drame humanitaire. L’eau potable et l’électricité sont coupées. Les autres sources d’eau risquent d’être contaminées. Chaque jour, la mer, tumultueuse, rejette de nombreux cadavres. Ils viennent s’ajouter à ceux retirés sous les décombres ou retrouvés ici et là. Tous devaient être inhumés au plus vite, afin d’éviter les épidémies, notamment le choléra.
Près de 50 000 habitants ont été déplacés et des chaînes de solidarité sont organisées.
«Ce que vous avez vu à la télévision et sur les réseaux sociaux ne représente même pas 10% de la réalité», révèle un secouriste tunisien dépêché sur les lieux avec le premier contingent de la Protection civile tunisienne déployé à Derna. Un spectacle d’horreur: des familles décimées, des constructions effondrées, des routes asphaltées arrachées du sol et de très nombreux blessés.
Même la reconstruction sera difficile
Submergés par l’épreuve subie, des rescapés rassemblés au centre-ville de Derna ont crié leur douleur, pointant du doigt l’anarchie régnante depuis ces dernières années, source de leur malheur. Deux revendications étaient portées : la mobilisation des Nations unies pour l’organisation des secours et la réunification du pays en un seul Etat fort et agissant. Si de nombreux pays ont volé au secours de Derna, les agences spécialisées de l’ONU n’ont pas brillé par un déclenchement immédiat. Quant à la réunification, le vœu reste pieux, tant de nombreux obstacles persistent encore. L’horizon d’un consensus politique sur les conditions et les modalités de tenue d’élections législatives et présidentielle ne fait que s’éloigner.Pour faire face à la situation d’urgence, le gouvernement de l’Est de la Libye (Benghazi) a appelé à une conférence internationale pour la reconstruction de Derna, devant s’y tenir le 10 octobre. Les besoins exacts ne sont pas encore exprimés. Mais il s’agit surtout pour les pays et les institutions qui y répondront d’annoncer leurs contributions. «Tout est à reconstruire, dans l’urgence, confie à Leaders un spécialiste. La Libye doit puiser dans ses propres fonds l’essentiel des budgets nécessaires et compter sur une assistance technique qualifiée pour assurer une planification adéquate, choisir des entreprises compétentes et superviser les travaux.»
La Tunisie, qui a été prompte à exprimer sa solidarité avec le peuple libyen, doit s’associer à ce vaste chantier de reconstruction. D’abord, à titre symbolique, en prenant en charge les frais de construction de certains établissements scolaires et sociaux. Et en mettant à la disposition de la partie libyenne les compétences de ses bureaux d’études, entreprises de BTP et différents fournisseurs. Le moment est historique. Notre solidarité doit être totale.