Les mémoires du Bâtonnier Lazhar Karoui Chabbi: un témoignage précieux (Album photos)
Le Bâtonnier des Avocats de Tunisie (1979 – 1983), Me Lazhar Karoui Chabbi, était ravi de dédicacer dimanche matin à la Librairie Al-Kitab Mutuelleville, devant un public très nombreux, ses mémoires récemment parues aux Editions Arabesques. Sous le titre de « Un tissu de mémoire », l’ancien ministre de la Justice (2011) et ministre-conseiller et représentant personnel du président de la République (Béji Caïd Essebsi, 2015 – 2019), livre un récit de vie et un témoignage de première main sur son parcours personnel, mais aussi près de 60 ans d’exercice au barreau.
Si l’introduction des mémoires a été brillamment rédigée par le professeur Ali Chabbi, ami d’enfance, et ancien ministre des Affaires religieuses, la présentation du livre lors de cette séance de dédicace y a ajouté une touche magnifique, avec le talent de Me Chedly Ben Younes, compagnon d’une bonne partie du parcours professionnel de l’auteur. Homme des médias et du prétoire, Me Ben Younes passera en revue les différentes séquences de l’ouvrage, n’hésitant pas à poser des questions restées sans réponses, rappelant des scènes vécues avec Bourguiba (au sujet de Me Chadly Khalladi), donnant envie de lire le livre et de savourer chacune de ses lignes. Dans une salle réaménagée avec goût par Selma Jabbès, la maîtresse des lieux, un auditoire très fourni, avec la présence notamment du président de l’Assemblée des représentants du peuple, Me Brahim Bouderbala, lui-même ancien Bâtonnier (2019 – 2022), et du nouveau juge à la CPI, Haykel Ben Mahfoudh, a pu savourer une rencontre exceptionnelle.
Les coulisses méconnues
« Plus que l’évocation de souvenirs personnels », dira le professeur Ali Chabbi. « C’est une tranche de notre histoire nationale que revisite le Bâtonnier Lazhar Karoui Chabbi, une terre natale, la Chabbia (Tozeur), et des évènements majeurs vécus. » C’est en effet l’essence et le charme de ces mémoires comme le soulignera Me Ben Younes. Dans une langue poétique raffinée, un style romancé, pour les séquences personnelles, et une sobriété aussi dense que précise, s’agissant de sa « carrière », l’auteur a en effet planté un décor évocateur, introduit les lecteurs dans les coulisses de la magistrature et du barreau, puis dans les arcanes de la politique.
De grands procès
Pour illustrer ses propos, le Bâtonnier Lazhar Karoui Chabbi égrène une série de scènes édifiantes, d’anecdotes qui dénotent son humour naturel malgré son ton ferme et courtois, et de situations très délicates. Les relations entre avocats et magistrats ne sont pas exemptes parfois d’échanges vifs, d’accrochages, voire de suites disciplinaires. Qu’il a su gérer et surmonter. Il y a aussi de grands procès : celui du groupe Perspectives, des nationalistes arabes, des Libyens accusés de vouloir attenter à la vie de Hédi Nouira, des syndicalistes avec leur tête Habib Achour, en 1978, des auteurs du «complot » de Gafsa, et bien d’autres affaires en justice. Mais, aussi les questions internes à l’Ordre national des Avocats, à la profession.
De chaque côté du prétoire
L’auteur a eu le mérite d’adjoindre à son témoignage si riche, une présentation instructive de l’histoire de la justice en Tunisie (et son organisation), et de la profession d’avocat, avec la volonté d’imprimer l’indépendance et l’intégrité de ces deux organes essentiels.
Du boulevard Beb Bnet à Carthage
L’éclairage de la première partie politique militante de Me Lazhar Karoui Chabbi, notamment au sein du secrétariat général du Néo-Destour sous le leadership de Salah Ben Youssef, puis de sa nomination, au lendemain du 14 janvier 2011, ministre de la Justice, ne manque pas d’évocations instructives. Tout comme son engagement aux côtés de son confrère et grand ami, Béji Caïd Essebsi, dans la constitution du mouvement Nidaa Tounes, puis à Carthage.
Un livre bien écrit, charpenté, agréable à lire. Un témoignage précieux. A lire, merveilleusement.
Un tissu de mémoire
de Lazhar Karoui Chabbi
Editions Arabesques, 2023, 340 pages, 38 DT.
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