Colloque Tunisie – Union européenne: La migration et les aspects politiques et économiques
Faire le point sur les relations entre la Tunisie et l’Union européenne, avec un questionnement urgent à propos de la crise migratoire, vient au bon moment en ce début de l’année 2024. Un regard croisé, académique, mais aussi diplomatique, et sociétal est nécessaire. C’est le Laboratoire de recherche en droit international et européen et des relations Maghreb/Europe, dirigé par la professeure Salwa Hamrouni, professeure de droit public qui en a pris l’heureuse initiative. Deux jours durant, ces jeudi 8 et vendredi 9 février 2024,à la faculté des sciences juridiques, politiques et sociales de Tunis,un colloque planchera sur ce bilan, à travers ses dimensions politiques et économiques, ainsi que la question migratoire. Placé en hommage au professeur Joël Rideau, éminent juriste français récemment décédé, il réunira des universitaires des deux bords, mais aussi des ambassadeurs européens, la représentante résidente du PNUD, des diplomates tunisiens et des acteurs de la société civile. Le colloque sera ouvert par Mounir Ben Rejiba, secrétaire d'Etat auprès du ministre des Affaires étrangères, de la Migration et des Tunisiens à l'étranger. (Programme)
« L'échec des négociations sur I'ALECA, les retombées du conflit russo-ukrainien, la guerre menée contre Gaza et dans les territoires palestiniens occupés, la crise énergétique ainsi que l'aggravation de la crise migratoire entre les deux rives de la méditerranée, placent les deux partenaires devant leurs responsabilités, lit-on dans l’argumentaire. La Tunisie et l'Union Européenne signent le 16 juillet 2023 un Mémorandum d'entente sur un partenariat stratégique et global. Le mémorandum n'est pas contraignant et ne crée pas d'obligations en soi. Il présente toutefois une série de plans d'action qui seront progressivement étoffés, transformés en instruments juridiques et approuvés par les états membres avant d'être mis en œuvre. Les plans sont divisés en cinq piliers: la stabilité macroéconomique, l'économie et le commerce, la transition verte, les contacts interpersonnels et lesmigrations.»
La migration: un questionnement urgent
Les deux panels, qui succèderont à ceux des questions politiques et économiques, sont à point nommé. Ils portent sur le contrôle aux frontières extérieures et accès au territoire, et la mobilité et accès aux droits fondamentaux. Modéré par le professeur Slim Laghmani, le panel contrôle aux frontières comprendra des thèmes d’actualité:
• Le défi migratoire dans les relations entre l'UE et la Tunisie, par NeilaDorraJaibi,maître-assistante en droit public à la FSJPST,
• Les accords informels et mécanismes para-légaux dans la coopération UE-Tunisie en matière de migration, par Sylvie Sarolea, professeure de droit à l'UC Louvain, Belgique
• Le rôle des agences de l'UE dans la gestion intégrée des frontières: l'exemple de la coopération entre Frontex et la Tunisie, par Sophie Perez, professeure de droit à la Faculté de droit de l'Université de Toulon, France.
Quant au panel sur la mobilité et l’accès aux droits fondamentaux qui sera modéré par la professeure Salwa Hamrouni, il portera sur les aspects suivants :
• Traite des personnes, demandeurs d'asile et accès à la protection, par Francesca Raimondo, Chercheuse post-doc à PUC Louvain, Belgique,
• Droits de l'enfant en situation de migration internationale, par Hatem Kotrane, professeur de droit privé à la FSJPST,
• Le droit des migrants à l'emploi dans les relations entre la Tunisie et l'Union européenne, par Farah Becheikh, maître-assistante en droit public à la Faculté de droit et de sciences politiques de Tunis.
Argumentaire
Les relations Tunisie/Union Européenne constituent un axe élémentaire et récurrent dans les travaux du Laboratoire de recherche en droit international et européen et des relations Maghreb/Europe depuis sa création. Un premier bilan des dix premières années de l'accord d'association fut dressé lors du colloque organisé à Tunis en 2005. Un second bilan des vingt ans d'association fut établi lors du colloque organisé à Paris en 2015. Trois ans après, le laboratoire a organisé un troisième colloque à Tunis sur les négociations de l'accord de libre-échange complet et approfondi (ALECA). Les bilans dressés jusque-là, notamment dans les deux premiers colloques, ont été conçus selon une approche multisectorielle ciblant les différents volets couverts par l'accord d'association. Les analyses sont souvent nuancées; les bilans sont forcément mitigés. Les acquis et les succès de ce «partenariat privilégié » sont nombreux, mais les carences et les échecs sont fréquents et paralysants. Les relations entre la Tunisie et l'Union et ses Etats membres de pendent des intérêts des uns et des autres, des enjeux et des nouveaux de fis.
Au-delà d'un état des lieux des relations tuniso-européennes, le laboratoire et la délégation de l'Union Européenne à Tunis entendent aujourd'hui, par ce Colloque international, engager une réflexion associant le milieu académique et les acteurs de terrain sur l'amélioration de la coopération entre la Tunisie et l'Union européenne dans les domaines couverts par l'accord d'association, et ce à la lumière de l'actualité tunisienne, européenne et de la conjoncture régionale et mondiale. Le cours des événements en Tunisie comme dans le cadre européen influence clairement sur les priorités stratégiques et les différents plans d'action.
Cette lecture croisée étayée par des juristes tunisiens et européens, s'adresse principalement au monde académique universitaire (étudiant(e)s, enseignant(e)s, chercheuses et chercheurs intéresse(e)s par les relations tuniso-européennes). L'objectif ultime du laboratoire étant d'alimenter la réflexion objective autour des différents axes de ce Partenariat et d'offrir de nouvelles pistes de recherche scientifique.
Le premier axe de ce colloque est de die aux relations politiques et institutionnelles entre la Tunisie et l'Union Européenne. Il s'agit de vérifier à quel point ce dialogue est structurant et constructif ou s'il est générateur de tensions diplomatiques. En effet, l'Union tend à s'adapter aux mutations profondes du paysage politique tunisien depuis la révolution jusqu'à l'accès s du Président Kais Saïed au pouvoir. Dès le lendemain de la Révolution de 2011, l'UE s'est engagée à soutenir la transition entamée par le peuple tunisien vers plus de démocratie, de liberté et de justice sociale. Partenaires naturels au regard de la géographie et de liens historiques, culturels et économiques, l'UE et la Tunisie ont, dans ce nouveau contexte, conclu en novembre 2012 un accord de partenariat privilégie, accompagné d'un ambitieux Plan d'Actions pour la période 2013-2017.
Le statut différencié et accordé à la Tunisie à reflète l'engagement résolu de l'UE à soutenir la transition tunisienne face à des de fis multiples. En revanche, il semble que le renversement de la situation constitutionnelle et donc politique depuis le 25 juillet 2021 à brouille le paysage politique tunisien et à suscite des inquiétudes chez le partenaire européen. Au moment de la mise en œuvre de l'état d'exception l'Union a déploré la régression démocratique et à formule des craintes quant à la stabilité politique en Tunisie. Les recommandations européennes n'ont pas été prises en considération par le Président Saïed. Suite à l'adoption de la constitution de 2022 et l'organisation des élections législatives, l'Union a dû assouplir ses positions.
L'échec des négociations sur I'ALECA, les retombe es du conflit russo-ukrainien, la guerre menée contre Gaza dans les territoires palestiniens occupés, la crise énergétique ainsi que l'aggravation de la crise migratoire entre les deux rives de la méditerrané e, placent les deux partenaires devant leurs responsabilités. La Tunisie et l'Union Européenne signent le 16 juillet 2023 un Mémorandum d'entente sur un partenariat stratégique et global. Le mémorandum n'est pas contraignant et ne crée pas d'obligations en soi. Il présente toutefois une série de plans d'action qui seront progressivement étoffés, transformés en instruments juridiques et approuvés par les états membres avant d'être mis en œuvre. Les plans sont divisés en cinq piliers: la stabilité macroéconomique, l'économie et le commerce, la transition verte, les contacts interpersonnels et les migrations.
La mutation que la Tunisie a connue depuis 2011 sur le plan du profil migratoire, impose de nouveaux de fis. D'un pays d'émigration, la Tunisie devient un pays de transit et de destination. La coopération dans le domaine migratoire devient un axe fondamental des relations entre l'Union européenne et la Tunisie. Entre la lutte contre l'immigration irrégulière et la protection des droits humains des migrants, l'état tunisien se voit confronte au même de fi qui s'est impose à son partenaire: l'équilibre entre liberté et sécurité.
C'est donc à l'ensemble de ces questions que le laboratoire entend donner la parole aux juristes, expertes et responsables des relations UE-Tunisie.