Des trésors de la diplomatie tunisienne, en son 68ème anniversaire (Album photos)
Évocations, analyses et enseignements : la journée d’étude consacrée samedi à « La Contribution de la diplomatie Tunisie dans l’édification de l’Etat de l’indépendance » a tenu toutes ses promesses. D’abord par la qualité des participants, de diverses générations : Taher Sioud, Salah Ladgham, Ahmed Ounaïes, Habib Ben Yahya, M’hammed Jnifene, Ezzeddine Kerkeni, Mohamed Lessir, Sémia Elarbi, Sadok Fayala, Hédi Jalleb, Salem Fourati, Ghazi Jomaa, Mohamed Hassairi, Hafedh Bejjar, Moncef Baati, Néjib Mnif, Hédi Ben Nasr, Abderrazak Landoulsi, Taoufik Jabeur, Chedli Neffati, Slaheddine Dhrif, Kamel Hadj Sassi, Mohamed Ali Nafti, Elyes Ghariani, Abdelmajid Ferchichi, Abdelwaheb Jemel, Tarek Esssaadi, Badie Kedadi, Mounir Miladi, et autres illustres figures (Voir l’album photos). L’initiative prise par l’Association tunisienne des anciens ambassadeurs et consuls généraux, en collaboration avec l’Association des anciens élèves de l’ENA et les Archives nationales, pour célébrer le 68ème anniversaire du rétablissement du ministère des Affaires étrangères, aura été une réussite. L'exposition de documents historiques, montée par les Archives et y ajoutera une note très appréciée.
Les témoignages apportés pour la première fois sur certaines grandes questions ont retenu l’attention de l’auditoire. Comment avaient débuté les relations avec Nelson Mandela, alors en lutte pour l’indépendance de son pays ? Comment la position de la Tunisie a « évolué » à l’égard de l’agression de l’Irak contre le Koweït et quelle était la teneur des entretiens des envoyés spéciaux (Chedli Neffati, Habib Ben Yahya…) dépêchés par Ben Ali auprès de Saddam, pour qu’il renonce à l’annexion de son voisin ? Ou encore, comment la Tunisie a su tirer profit de ses relations avec l’Union européenne ? Sans parler du rôle jouée au sein de l’ONU…
Le haut niveau des interventions a été impressionnant. Écouter Ahmed Ounaïes retracer les débuts de la diplomatie tunisienne au lendemain de l’indépendance, c’est relire des pages glorieuses. Tout comme la présentation très documentée du professeur Hédi Jalleb, directeur général des Archives nationales. Commentant de précieux documents, il a affirmé que la Tunisie s’est toujours distinguée par son indépendance, sans jamais rallier un camp ou un autre, prenant souvent des positions avant-gardistes.
Un grand défi était, dès le rétablissement, le 3 mai 1956 du ministère des Affaires étrangères, après 75 ans d’éclipse sous le protectorat français, de prendre en main avec succès sa diplomatie. C’est grâce à l’expérience acquise par de jeunes militants formés dès les années 1940, dans les bureaux ouverts au Caire, à New-Delhi, à Jakarta, à New York, à Paris et d’autres capitales. Les Taïeb Slim, Mongi Slim, Rachid Driss, Bahi Ladgham, Mohamed Masmoudi et autres militants étaient déjà rôdés aux arcanes des relations extérieures. Ils ont été rejoints par des jeunes formés en France et aux Etats-Unis d’Amérique, réunis autour de Khemaïes Hajeri, cheville ouvrière du Département rétabli.
Des témoignages seront précieux, particulièrement ceux relatifs de la position de la Tunisie suite à l’attaque du Koweït par l’Irak. Au départ, un attachement par principe au respect de la souveraineté d’un Etat légitime dans ses droits, comme en témoignera M’hammed Jnifene, alors membre de la délégation tunisienne conduite par le ministre Ismail Khelil, la réunion au Caire des ministres des Affaires étrangères. Mais, édifié par le soutien massif et grandissant de l’opinion publique tunisienne en faveur de l’Irak et l’héroïsation de Saddam Hussein, Ben Ali surfera sur la vague populaire. Chedli Neffati rapportera comment il a été dépêché par Ben Ali auprès de Saddam et soulignera la teneur de leurs entretiens. De son côté, Habib Ben Yahya, ancien ministre des Affaires étrangères, témoignera de ses trois visites en Irak et de ses longs entretiens avec Saddam Hussein.
Petit pays, grande voix
Dans un autre registre, l’ancienne ambassadrice (à Bucarest) Sémia El Arbi, qui avait été en poste à Bruxelles, et consule générale à Strasbourg, évoquera des moments forts des relations de la Tunisie avec l’Union européenne. Une équipe réduite, avec des moyens très limités, mais sous la conduite de grands ambassadeurs, a su déployer une intense activité et obtenir des résultats politiques et économiques significatifs.
Béchir Guellouz n’est pas venu les mains vides. Il vient de publier un nouvel ouvrage intitulé « Le Département et les ministres des Affaires étrangères, 1956 – 2010). Une véritable mine d’informations, avec des documents historiques de première mains. Lire ce livre, c’est revisiter un motif de grande fierté.
Petit pays, par sa géographie, mais grande voix, la Tunisie, servie par une diplomatie performante a été un grand acteur de la scène internationale.