Nouvel hôpital militaire universitaire de Sfax: Une ambition d’excellence
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Sfax en avait grandement besoin. Le nouvel hôpital militaire universitaire de Sfax (HMUS) tant attendu est en plein déploiement. Aussi les consultations externes, les explorations, les interventions chirurgicales, les hospitalisations ont-ils commencé. Les services d’urgences le seront dans un futur proche. Avec 240 lits d’hospitalisation, un bloc chirurgical de 5 salles d’opération et 11 lits de réanimation, il vient renforcer les deux hôpitaux universitaires de la région, Hédi-Chaker et Habib-Bourguiba, submergés par une forte pression. Ses équipes sont déterminées à apporter des nouveautés significatives tant en matière de soins que d’enseignement supérieur et de formation. Ouvert aux militaires et, depuis ce mois de février, aux assurés sociaux civils, il peut bénéficier utilement à des patients de toute la région s’étendant du Centre au Sud du pays.
Sa conception architecturale, la technologie de pointe de ses équipements et son concept d’hôpital intelligent et vert lui confèrent une importance particulière. D’emblée, le hall d’accueil central, avec son large desk circulaire et ses escalators sur les côtés, donne le ton.
Visite guidée.
Le site est bien choisi. A 11 km du centre-ville de Sfax, sur la route de Gabès, au croisement avec la route périphérique (la rocade N°11), il bénéficie d’un accès rapide à partir des autres routes (de Gafsa, Sidi Bouzid, Kasserine, Kairouan et le littoral), ainsi que de l’autoroute. Sa proximité de l’aéroport s’ajoute à son emplacement stratégique. L’hôpital est construit sur un terrain de 12 ha. Cinq grands bâtiments sont édifiés, pour la plupart en R+2, avec un système de patios et des passerelles. La surface couverte est de 26.000 m2. Ils sont dédiés à la psychiatrie, à l’administration, aux activités médicales, à l’hospitalisation et à la logistique. Une extension est d’ores et déjà prévue. Elle porte notamment sur des salles de cardiologie interventionnelle et une unité pour les grands brûlés.
La vue surplombe merveilleusement, d’un côté, la mer, le phare de Thyna et, de l’autre, des oliveraies. Don de la Chine, la construction et les premiers équipements auront coûté pas moins de 150 millions de dinars. Le budget de l’Etat tunisien a pris le relais.
La Direction générale de la santé militaire a fourni un grand nombre d’équipements, indique à Leaders le colonel-major Slim Essafi, directeur général de l’hôpital. Le concours des ministères de la Défense nationale et des Finances a été précieux pour mobiliser les crédits budgétaires appropriés, qui ont atteint 30 millions de dinars en 2024, à parité entre fonctionnement et investissement. Ils seront augmentés pour 2025. Le partenariat avec le ministère de la Santé publique est solidement scellé. C’est ainsi que 13 médecins de différentes spécialités ont été affectés à l’hôpital militaire universitaire de Sfax.Les effectifs étaient au départ de près de 400 personnes. Ils doivent atteindre, en régime de croisière, 1 200 personnes, avec 400 nouveaux recrutements par an, à compter de ce mois de février. Tous les cadres paramédicaux sont des militaires, alors que le corps médical est composé de militaires et de civils. La symbiose entre les équipes est totale.
Une mission d’envergure
C’est en décembre 2020, en pleine pandémie de Covid-19, que l’hôpital a été établi, sur instructions présidentielles, en centre de prise en charge de personnes infectées par le virus et déployé en hôpital de campagne, relevant du ministère de la Défense nationale. Le défi n’était pas facile à relever, surtout avec des pointes d’arrivée massive atteignant parfois 50 patients en une seule journée. Mission accomplie. Décision sera alors prise par le président de la République de le transformer en hôpital militaire universitaire. Un décret (N° 2023 -294 du 19 avril 2023) viendra officialiser sa création en tant qu’établissement public de santé, fixer son organisation administrative, financière et structurelle. Un arrêté du ministre de la Défense nationale, en date du 3 novembre 2023, portera création des pôles, services et unités hospitalo-universitaires. Les préparatifs bien engagés, le démarrage a été immédiat.L’hôpital militaire universitaire de Sfax est à la fois un établissement de première ligne (médecine générale et de famille), de spécialités et des urgences. Ses missions sont multiples : les soins, l’enseignement, la formation, la recherche scientifique, l’appui aux unités opérationnelles, la participation à des actions humanitaires en Tunisie et à l’étranger, le secours, la prévention, l’éducation sanitaire…
La gouvernance de l’hôpital repose sur un conseil d’administration, un directeur général et une commission consultative appelée comité médical. Le conseil d’administration est présidé par le général de brigade médecin Mounir Azaiez, directeur général de la santé militaire au ministère de la Défense nationale. Le directeur général de l’hôpital est le colonel-major Slim Essafi. Diplômé de l’Académie militaire et de l’École des hautes études en santé publique de Rennes, il aligne une longue expérience en administration de la santé publique et en gestion des hôpitaux militaires.
L’hôpital comprend des services spécialisés, des services et des unités médicaux communs. Par souci d’efficacité et d’optimisation, trois pôles médicaux ont été créés : chirurgie, anesthésie-réanimation et urgences, spécialités médicales et réadaptation fonctionnelle.
Le bâtiment central est réservé aux spécialités médicales. Première surprise en franchissant le seuil, un vaste hall ultramoderne, avec au centre un large desk d’accueil circulaire. De part et d’autre, des escaliers roulants pour accéder aux étages. Bienvenue dans ce nouveau temple de la médecine.
Un projet, une ambition
«Quel est votre projet médical, ici à l’Hôpital ? Quel est le rêve que vous voulez réaliser ?» Ce sont les premières questions posées lors de l’entretien de recrutement des médecins. La réponse permettra de mesurer le niveau d’ambition et la capacité d’engagement. La sélection est en effet rigoureuse. L’Hôpital cherche à attirer les meilleurs et à leur offrir de bonnes conditions de travail et d’accomplissement. Les équipes sont jeunes, alliant une solide formation et un brillant parcours scientifique et médical. Ecouter les médecins spécialistes Ben Amar (chirurgie générale), Ben Jemaa (chirurgie orthopédique), Ammar (neurochirurgie), Ketata (neurologie), Mnif (endocrinologie- diabétologie), Trigui (orthopédie),Koubaa (acupuncture), Maktouf (anesthésie - réanimation), Hentati (radiologie), Ben Thabet (psychiatrie), Hammami (cardiologie) et d’autres de leurs confrères parler de leur engagement est une véritable leçon de compétence et de patriotisme.Il en va de même pour toutes les autres équipes d’appui, de gestion et d’administration. Un large potentiel de progression se dégage.
Le bloc opératoire mérite une mention spéciale. Se prêtant à la chirurgie générale, à la chirurgie orthopédique et traumatique et à la neurochirurgie, il comprend cinq salles d’opération, ainsi que des salles de préparation des patients et de réveil. Les équipements sont de pointe. Quant au service de réanimation, il compte 11 lits, avec la possibilité d’aller jusqu’à 17 lits en cas de besoin.L’ingénierie générale a été soigneusement réfléchie, explique à Leaders le colonel médecin Imed Kanoun. Le service des urgences dispose de différentes salles et de tous les équipements nécessaires. Celui des consultations externes est structuré en box par spécialité, jouxtant des unités d’exploration. Chaque médecin bénéficie ainsi de cette proximité pour mener à bien ses consultations. Dans les unités d’hospitalisation, les chambres de garde sont aménagées au sein même de chaque unité.
Le choix des équipements a été minutieusement décidé, en étroite coordination avec les usagers eux-mêmes, souligne de son côté le colonel Sami Zitouni, ingénieur biomédical, en charge des équipements et de la maintenance. Performance et technologie de pointe ont été privilégiées. C’est ainsi que l’HMUS compte parmi ses équipements les plus innovants, un microscope opératoire en 3D, le premier du genre en Afrique. Autant l’acquisition et la mise en marche sont assurées avec attention, autant la maintenance est hissée au premier plan, insiste-t-il.
Une grande priorité est accordée à l’hygiène, ajoute pour sa part le colonel médecin Chawki Baccari qui veille au grain. Limiter le risque infectieux, le prévenir et tout contrôler s’érige en discipline rigoureuse, affirme-t-il. Un dispositif bien défini est mis en place à tous les niveaux.
La détermination est forte pour faire de l’HMUS un pôle d’excellence. Dès à présent, on prépare l’accréditation par l’instance nationale d’évaluation et d’accréditation en santé, un projet commun porté par tous.
Un hôpital vert
Le cadre naturel entre mer et oliveraies s’y prête déjà. La notion d’hôpital vert (Green Hospital) s’accomplit au quotidien. Une station de traitement des eaux usées permettant leur réutilisation, notamment pour l’arrosage, une unité de gestion des déchets et bientôt un parc d’énergie photovoltaïque, parmi les sites pilotes retenus par l’ANME : la démarche se concrétise. Pour les déchets, il s’agit de gérer des déchets végétaux, domestiques, de soins, et chimiques, tous pris en charge séparément.
Un effort particulier est en outre fourni pour la réduction de l’empreinte carbone à tous les niveaux. La numérisation de la gestion limite l’utilisation du papier et de l’impression. Un souci est également porté à l’économie de toutes les énergies.
Tout autour des bâtiments, des jardins sont en cours d’aménagement, alors qu’on ne cesse de planter des arbres, notamment des oliviers. Dans cet effort, la société civile apporte son concours. Le Lion’s Club ainsi que l’Union des petites et moyennes industries (UPMI) ont, dès l’ouverture de l’hôpital lors de la période du Covid-19, multiplié leurs contributions sous diverses formes.
Des valeurs à incarner
La devise choisie par l’HMUS repose sur trois fondements : humanisme, enseignement et excellence. C’est en effet l’humain qui est érigé en primauté et placé au centre de toute l’attention. Le préserver, le respecter et s’y dédier est une conviction profonde qui doit animer tout un chacun. L’enseignement, c’est le savoir, son acquisition, son développement et son partage. Quant à l’excellence, c’est une ambition de chaque instant, une volonté réelle et une conduite en exemplarité.
Cette devise est illustrée en «armoiries» par le phare de Thyna entouré d’un serpent (rappelant le caducée emblématique du corps médical).
L’intelligence au cœur de l’hôpital
Le data center est une véritable pièce maîtresse du dispositif. Doté d’une grande capacité d’hébergement, d’équipements et de systèmes de technologies très avancées, il est le cœur battant des connexions et des flux, et la mémoire de toutes les informations. Les usagers en mesurent la performance à travers les différentes applications déployées. Tout est informatisé. Les données du patient sont enregistrées dès son arrivée et son dossier ainsi numérisé le suivra à chaque consultation, exploration, admission ou intervention. Un bracelet d’identification lui sera mis au poignet lors de son hospitalisation.
Ce bracelet sera précieux, notamment lorsqu’il s’agira bientôt d’utiliser le système de pharmacie intelligente. Une petite boîte pharmaceutique intelligente sera attribuée à chaque patient, contenant ses médicaments pour la journée. Elle ne s’ouvre que par le code inscrit sur le bracelet. Ce système permet une vigilance quant à l’administration des médicaments et une économie dans leur consommation. Pour les consultations externes, les rendez-vous sont fixés par SMS, ce qui réduit les délais d’attente et évite l’encombrement des salles d’accueil.
La traçabilité informatisée des instruments utilisés figure, elle aussi, parmi les applications qui seront bientôt mises en œuvre. Grâce à une gravure au laser, chaque instrument est attribué à une boîte, un service, une salle et autres. Il sera tracé jusqu’à sa stérilisation et son retour. Aussi, le respect des règles d’hygiène (lavage des mains…), le suivi des sonneries, le contrôle des accès et autres sont-ils pris en compte.
Des circuits bien déterminés
Un principe de base institué : la séparation des circuits qui sont clairement déterminés. L’accès des patients au bloc opératoire est différent de celui du personnel. Partout dans les services, le circuit du linge entrant est séparé de celui souillé. La prise en charge dans la buanderie est également en sens unique.
A l’arrivée, les ambulances qui emmènent des malades sortiront par un autre parcours balisé et une autre porte. Les véhicules qui embarquent les déchets quittent par une sortie éloignée.
Image projetée à la fin de la plantation
Dans un souci d’efficacité et pour ne pas surcharger le personnel paramédical, un service de coursiers sera mis en place, afin de transmettre certains documents, de service en service. Une autre équipe de brancardiers se chargera des patients. Un réseau d’envoi par tubes pneumatiques a été également installé. Autant de gain de temps.
La première opération neurochirurgicale
Dans ce nouveau centre chirurgical flambant neuf, chaque première opération est célébrée non sans émotion. Le coup d’envoi a été donné le 12 décembre 2024 par le médecin-colonel Ben Chaabane (orthopédie). Un mois plus tard, le mercredi 23 janvier, le service de neurochirurgie, dirigé par le médecin-commandant Hichem Ammar, devait assurer une importante opération. Il s’agit d’une intervention sur une hernie discale cervicale en utilisant le microscope opératoire 3D, le premier microscope de ce genre en Afrique, en étroite collaboration avec l’équipe d’anesthésie dirigée par le Dr Yassine Maktouf.L’opération a coïncidé avec le passage de témoin entre des générations d’éminents spécialistes. Le médecin-général de brigade Mondher Yedes a, en effet, effectué le déplacement à Sfax, avec une équipe du service de neurochirurgie de l’Hôpital militaire principal d’instruction de Tunis, que dirige le médecin-colonel Ridha Chekili.
«Plus on rapproche les prestations du patient, meilleurs seront les résultats», souligne le médecin-général de brigade Mondher Yedes, qui a félicité le ministère de la Défense, la santé militaire et la ville de Sfax pour cette nouvelle institution de santé et ce service de pointe. Il s’est déclaré très fier de toute l’équipe médicale et paramédicale ainsi que des structures en appui pour la qualité des prestations et la prise en charge des patients dans de très bonnes conditions. Un hommage a été rendu au médecin-général de brigade Mondher Yedes, fondateur du service de neurochirurgie à l’Hôpital militaire. «Un médecin de tous les combats, dira le commandant médecin Ammar, et une véritable école. Il vous transmet ce qui ne figure dans aucun manuel et vous encourage sans cesse à aller encore plus de l’avant.»
Des services du CHU Hédi Chaker délocalisés
Initialement destiné à la psychiatrie, un pavillon distinct au sein de l’HMUS a été mis à la disposition du CHU Hédi-Chaker pour y délocaliser en hospitalisation certains de ses services. Hôpital historique de la région, le Hédi-Chaker, d’une capacité de près de 1.200 lits, résiste difficilement à la vétusté de ses locaux et à son encombrement. Décision a été prise pour la reconstruction de son bâtiment central pour un coût de près de 103 millions de dinars. Inscrit parmi les grands projets stratégiques prioritaire, il a été approuvé lors du Conseil ministériel réuni le 15 janvier dernier lors duquel des instructions ont été données afin d’élaborer un plan de financement et d’accélérer les études. C’est ainsi que trois services ont été transférés au bâtiment psychiatrie de l’HMUS, d’une capacité de 120 lits. Il s’agit de ceux de l’endocrinologie, des maladies infectieuses et de la médecine interne, ainsi qu’une pharmacie.
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