Encore une journée de tous les rebondissements en Tunisie
Alors que la reprise du travail et de l'approvisionnement se faisait encore plus forte ce mardi matin, la journée aura été marquée par des rebondissements politiques successifs et une nouvelle série de manifestations dans les rues de la capitale ainsi qu’à l’intérieur. A peine formé, le nouveau gouvernement d’unité nationale subissait sa première fronde avec la démission des trois représentants de l’UGTT (Dimassi, Bedoui et Ben Kaddour), alors que le Dr Mustapha Ben Jaafar, le leader du Forum démocratique pour le travail et la liberté (FDTL), s’est abstenu de prêter serment, demandant un délai supplémentaire de réflexion et de concertation.
Au Palais de Kasbah, les membres du gouvernement étaient réunis à 13h pour prêter serment devant le Président par intérim, M. Foued Mbazaa, pour tenir, sous la présidence de M. Mohamed Ghannouchi le premier conseil des ministres de la transition. Un conseil qui s’est poursuivi toute l’après-midi, jusqu’à l’heure du couvre-feu.
A peine libéré de prison, sans costume sombre, ni cravate, le bloggeur Slim Amamou, qui devient Secrétaire d’État à la Jeunesse, tranchait déjà dans le décor: Veste en velours simple, pull col V et jean, l'uniforme de la jeunesse. « Un casting très fort, twitteront ses fans. » Il découvrait à cet instant les lieux du pouvoir, faisait connaissance avec ses nouveaux collègues et notamment son coéquipier, le Dr Mohamed Aloulou, ministre de la Jeunesse et du Sport. Dès mercredi matin, ils se mettront à la tâche. Slim Chaker était arrivé à 12H30 à Tunis pour se rendre directement à la Kasbah. Quant à Moufida Tlatli, donnée démissionnaire, ne cachait pas son sens de la responsabilité qui lui incombe désormais.
Au nom du Parti Attajdid, Ahmed Brahim confirme sa participation mais réclame la démission des ministres reconduits de renoncer à leur appartenance au RCD.
Déjà, MM. Foued Mbazaa et Mohamed Ghannouchi ont annoncé leur démission du RCD.
Quant à Ahmed Néjib Chebbi, il affiche une haute idée du moment historique que vit la Tunisie. « J’en suis pleinement conscient, c’est pourquoi nous engageons de toutes nos énergies dans ce grand processus salutaire que nous ne devons pas rater, affirmera-t-il. Nous sommes un gouvernement de transition et tous ceux qui ont font partie, anciens et nouveaux, sont aussi intègres que patriotes. Nous n’avons qu’un seul objectif : réussir ».
Avenue Mohamed V, le RCD donne après de longues journées d’un encylographe quasi-plat, un premier signe. Il annonce la radiation de Ben Ali, Abdallah Kallel, Abdelaziz Ben Dhia, Abdelwaheb Abdallah, Ahmed Iyadh Ouderni, Rafik Belhaj Kacem, Belhassen Trabelsi et Mohamed Sakher El Materi. Conséquence immédiate, Abdallah Kallel quittera-t-il, le perchoir de la Chambre des Conseillers?
A l’Utica, en pleine réunion du bureau exécutif, un groupe de chefs d’entreprise, fait irruption au siège de la centrale patronale, sommant Hédi Djilani de remettre sa démission « dans l’intérêt de l’organisation ». Les Ben Yaghlane, Fourati, et autres Nabli, se font pressants. Djilani ne se cramponne pas au poste, mais entend en trancher avec les instances représentatives.
Place Mohamed Ali, la commission administrative tempête, pressant Abdessalem Jerad de retirer les représentants de l’UGTT du gouvernement.
La journée est loin de se terminer, l’aéroport de Tunis-Carthage, ce n’est pas le panier à salade qui accueille les anciens opposants de retour au pays, mais des foules nombreuses venues acclamer Moncef Marzouki et Kamel Jendoubi. Le Dr Marzouki filera directement à Sid Bouzid.
A 13 heures, c'est l'heure de point dans les grands hôtels de la capitale où sont descendus les envoyés spéciaux de la presse internationale transformés en centres de presse. Les dirigeants des partis politiques, syndicats et de la société civile, s’y relaient en road-show.
Sur les stations radios, comme les plateaux TV, débats, reportages et micro-trottoir ne s’arrêtent pas. Le soir, Nessma accueillera Marwane Ben Yahmed, envoyé spécial de Jeune-Afrique, Bourguiba Ben Rejeb et Bochra Belhaj Hmida. Alors que sur Tunisie TV, Taieb Baccouche, Ahmed Nejib Chebbi, Ahmed Brahim et Neji Baghouri sont en débat. Au téléphone, le Pr Yadh Ben Achour, les éclairera de son érudition juridique.
A Paris, François Fillon et Michelle Alliot-Marie redoublent d'attention et de soutien à la Tunisie. Au même moment, des économistes tunisiens s’inquiètent gravement des conséquences de la dégradation significative de deux plots, de la notation souveraine de la Tunisie par des agences internationales de notation.
La nuit tombe sur la Tunisie. Encore une nuit d’angoisse et d’espoir. La transition doit réussir. « Vous vous imaginez combien nous en gagnerons tous si ce vrai miracle se réalise, déclare à Leaders un universitaire indépendant. Nous offrirons le meilleur modèle au monde arabe et nous réaliserons de plain pied notre association avec l’Europe. Imaginez alors tout le retard qui sera rattrapé, toute la prospérité qui profitera à tous et dans quel climat de liberté et de démocratie nous vivrons dans cette merveilleuse Tunisie ».