Mohamed Amouri: Une leçon de vie
Vision, élégance et rigueur: Mohamed Amouri, pionnier de l’hôtellerie de luxe et de la thalassothérapie de haut standing en Tunisie, était tout cela à la fois. La générosité de l’âme en plus et un grand sens de l’hospitalité. Décédé le 12 septembre dernier à l’âge de 85 ans, le bâtisseur de l’enseigne Hasdrubal, incrustée au fronton de la chaîne d’hôtels déployée à Sousse El Kantaoui, Yasmine Hammamet et Djerba, a créé une véritable référence.
Mohamed Amouri est aussi un esthète raffiné, doublé d’un mécène passionné de culture. Son courage entrepreneurial et sa persévérance constituent une véritable leçon de détermination.
Sa fondation, l’Association Hasdrubal pour la culture et les arts Mohamed-Amouri, et sa superbe collection riche de plus de 2 000 œuvres d’art, témoignent de sa passion pour la création artistique et son encouragement en faveur des talents.
Ce qu’il lègue le plus, c’est la réputation d’un homme de parole, le souci d’explorer de nouvelles perspectives, quitte à prendre de grands risques, et l’attachement au travail.
Visionnaire, Mohamed Amouri l’a toujours été. Lorsque le moment viendra pour lui de faire un choix crucial, il n’hésitera pas à se lancer dans la construction en 1981 de son propre hôtel à Port El Kantaoui. La station touristique était alors toute naissante, la rentabilité était incertaine, et ses propres moyens bien maigres. Pourtant, il y a cru, voyant grand, voyant beau. Son pari s’avèrera juste. Quelques années plus tard, une autre nouvelle station touristique devait émerger à Yasmine Hammamet. Tout n’était que sur plans, autour d’une marina et des résidences. Mohamed Amouri s’y engagera, voyant cette fois-ci beaucoup plus grand et plus majestueux, adossant à son hôtel un centre de thalasso de première envergure. Quitte à prendre un grand risque. Du matin au soir, il sera à pied d’œuvre sur le chantier, entraînant avec lui son fils Raouf. Ce sera une grande réussite, une immense fierté.
Dur comme fer, Mohamed Amouri croyait en la marina. Des difficultés surgiront lors de sa construction, compliquée et coûteuse. Alors que d’autres marquent un pas en arrière, esquivant toute charge, il n’hésitera pas, lui, à accepter d’en prendre les commandes, arbitrant de grandes décisions architecturales, techniques et financières, mobilisant les bailleurs de fonds et les autorités, et favorisant l’aménagement d’une magnifique marina, avec son port de plaisance, ses quais, ses attractivités et ses résidences. L’histoire lui donnera raison.
Il ira ensuite à Djerba, l’île de ses débuts, où il édifie une troisième unité. On croyait l’île surencombrée, saturée, épuisée. Mohamed Amouri créera une dimension innovante, attractive.
Chaque hôtel débutera comme une « aventure », et s’imposera comme une excellence encore plus renouvelée. Sa vision a été confirmée.
Elégant, Mohamed Amouri a toujours veillé à son allure, comme à sa posture. Depuis son jeune âge, il consacrait une large partie de son modeste salaire à l’achat de costumes bien taillés, de belles chemises et cravates, prêtant attention à sa coiffure, et s’assurant que ses souliers sont bien cirés. C’est pour lui une forme de respect à l’égard de ses clients, et d’exemple pour ses collaborateurs. Le sens de l’hospitalité de tout hôtelier se mesure aussi dans une tenue soignée et la courtoisie. Cette élégance est aussi synonyme de raffinement dans tous les choix à accomplir : du style architectural aux matériaux à utiliser, et aux mets à offrir. Mohamed Amouri veille à y imprimer une signature tunisienne, émanant d’un Tunisien, un style épuré, témoignant de la richesse de notre patrimoine et du talent de nos différents corps de métiers. La rigueur aura été une seconde nature pour Mohamed Amouri. Ponctualité, attention aux détails, respect des délais et des engagements et une dédicace totale au service du client ont revêtu pour lui une grande importance. Une rigueur dictée par l’ampleur des défis à relever, qui n’éteint guère le sourire et la bienveillance.
La générosité et la grandeur d’âme de Mohamed Amouri, ce sont ses collaborateurs qui en témoignent. Son management exigeant n’excluait pas une proximité de ses équipes, une attention à leurs propres soucis et une action discrète, personnelle, pour chacun.
Ses derniers vœux à son fils Raouf, avant de décéder, n’étaient-ils pas de faire du bien et prendre soin, non pas de ses unités, mais de ses collaborateurs.
Son jardin secret, c’est sa famille. Mohamed Amouri, très pris par son travail, trouvait refuge et réconfort auprès de son épouse Faouzia (née Msadek), de ses trois enfants, Raouf, Rim et Dora, et de ses petits-enfants, restant proche de tous les parents, ici et là. Pleinement dévouée, attentionnée, et inlassable, Mme Amouri sera exemplaire jusqu’au dernier soupir. Raouf, Rim, Dora et les petits enfants, présents autour de lui, l'entouraient de leur émouvante affection. C’est son véritable trésor.
Faire du bien, prendre soin des siens, et œuvrer pour le pays : une véritable leçon de vie...
Lire aussi
Décès de Mohamed Amouri, un illustre pionnier du tourisme tunisien