Le nouvel ambassadeur de France : un nouveau style
A peine arrivé mercredi matin à Tunis, Boris Boillon, nouvel ambassadeur de France n’a pas perdu une minute : rapide prise de contact avec les membres de l’ambassade, remise d’une copie figurée de ses lettres de créances, au Secrétaire d’Etat aux Affaires Etrangères, une première interview à la chaîne Nessma, en langue arabe, et une série de contacts tout au long de la soirée. Dès jeudi matin, il a été reçu par le Premier Ministre, M. Mohamed Ghannouchi. Courte pause pour rencontrer un premier groupe de journalistes, avant de courir, rendre visite, l’après-midi, aux dirigeants de la Ligue Tunisienne des Droits de l’Homme, puis à l’Association Tunisienne des Femmes Démocrates, marquant ainsi la symbolique de ses premiers gestes.
Aux journalistes, il dira surtout qu’il entend bâtir avec les médias, mais aussi tous ses interlocuteurs, un contrat de confiance, sur la base d’un autre style et d’une approche, indiquant qu’il compte aller à la rencontre des représentants de la société civile et de toutes les forces politiques. «La Tunisie, dit-il, vit des conditions exceptionnelles, ne soyons pas avares, disons qu’elles sont historiques et nous devons nous y adapter, lui apporter un soutien sans faille, faisant une totale confiance à ce pays et à ce peuple qui a fait montre de grande maturité. L’Etat fonctionne normalement, ses institutions aussi, ce qui m’a permis d’entrer immédiatement en fonction, dès mon arrivée.»
La leçon d'espoir de la Tunisie
Pour le nouvel ambassadeur de France, «la Tunisie est le pays des miracles qui donne aujourd’hui une leçon universelle d’espoir et d’espérance, pour la conquête des valeurs de liberté et de démocratie, inspirant l’ensemble du monde arabe. La France lui témoigne de son plein soutien, compte participer activement à la Conférence de Carthage et s’emploie à appuyer fortement ses démarches pour le statut de pays avancé avec l’Union européenne et pourquoi pas plus. »
De nombreuses délégations françaises, gouvernementales, parlementaires, d’hommes d’affaires et autres se succèderont tout prochainement à Tunis, a-t-il, indiqué. C’est ainsi que Christine Lagarde, ministre de l’Economie, des Finances et de l’Industrie, se rendra à Tunis, ce mardi 22 février et sera accompagnée par deux autres membres du gouvernement, aux charges significatives, à savoir Laurent Wauquiez, Ministre auprès de la ministre d’Etat, ministre des Affaires étrangères et européennes, chargé des Affaires européennes et Frédéric Lefebvre, Secrétaire d’Etat auprès de la ministre de l’Economie, des Finances et de l’Industrie, chargé du Commerce, de l’Artisanat, des Petites et Moyennes Entreprises, du Tourisme, des Services, des Professions libérales et de la Consommation. L’accent est ainsi mis sur la volonté de la France d’être au premier rang à côté de la Tunisie et d’agir à différents niveaux. A l’échelle européenne, elle entend être son premier avocat, et pour le tourisme elle œuvre à une reprise rapide. Une campagne promotionnelle sera bientôt lancée en France, avec comme slogan : « Bronzez Citoyen ! »
Rappelant le plan d’action concerté, arrêté d’un commun accord avec les autorités tunisiennes, Boris Boillon a indiqué que ses efforts porteront sur le renforcement des liens entre les sociétés civiles des deux pays et la promotion de la coopération décentralisée entre les régions. Il a indiqué qu’il envisage l’organisation à cet effet, d’assises franco-tunisiennes d’ONG et de collectivités locales. La contribution à la modernisation de l’économie et le développement de l’emploi, saluant à cet égard les 1250 entreprises françaises opérant en Tunisie et qui emploient plus de 100 000 personnes, et l’accompagnement à l’instauration d’un état de droit. « Le moment est venu d’être beaucoup plus imaginatif que par le passé et de répondre aux nouvelles aspirations », a-t-il indiqué se déclarant ouvert à toutes propositions.
Les flux migratoires ? «Il faut que plus de Tunisiens puissent venir en France et en Europe sans susciter des drames ou des humiliations»; les erreurs d'appréciation de son prédécesseur sur la Tunisie ? «Il ne faut pas personnaliser. M. Ménat est un homme tout à fait respectable»; le temps de latence mis par la France pour condamner la répression des manifestations sous Ben Ali ? «Le président Sarkozy s'est résolu à faire un mea culpa public, admettant que la France a sous estimé les aspirations du peuple tunisien à la liberté. »
De son entretien avec M. Ghannouchi, il garde une excellente impression: «ce fut une rencontre amicale, chaleureuse et fructueuse, dit-il. J’ai trouvé un homme d’Etat de grande dignité et qui fait de grands efforts. Pendant une heure, nous avons passé en revue l’ensemble de la situation et il m’a affirmé que nos deux pays sont liés par l’histoire, comme par la géographie. Comme lui, je pense que deux bons voisins, ne changent pas d’adresse, et ne feront que cultiver ces liens, encore plus en ce moment.