La dissolution du RCD : un acte de salubrité publique
Jusqu’au 14 janvier, la Tunisie se résumait à ces mots : un parti qui disposait d’un Etat. Au nom des services rendus, le néo-destour et son avatar, le RCD ont dirigé, pendant 55 ans, le pays, pour le meilleur, lors de la lutte de libération nationale et pendant les premières années de l’indépendance, pour le pire, après, c'est à dire depuis les années 70. Parti monolithique, bâti selon le modèle stalinien, où « la contradiction dialectique » était totalement absente, « Le Parti » comme on l’appelait, après avoir été l'artisan principal de l'édification du nouvel Etat s’était ankylosé au fil des années au fur et mesure de l’aggravation de l’état de santé de Bourguiba, pour devenir sous Ben Ali, une coquille vide, un ramassis d’opportunistes et de supplétifs de l’appareil sécuritaire, à quelques exceptions près, un syndicat du pouvoir et le point de passage obligé de tous les carriéristes pressés d’accéder aux plus hauts postes alors que les vrais militants étaient mis au rancart et confinés à des postes subalternes.
Pourtant, même dans leurs rêves les plus fous, les adversaires de ce parti n'envisageaient pas sa dissolution. Car avec le temps, on avait fini par s’y habituer, comme on s’habitue à une maladie chronique. Le parti ne servait plus à rien, mais, il faisait parti du décor et on s’en accommodait tant bien que mal, comme des vieilles reliques, témoins d'un passé prestigieux. De fait, du haut du building de l’avenue Mohamed V, c’était un siècle d’histoire de la Tunisie et sans doute la plus féconde qui nous contemplait avec ses temps forts, ses grands hommes et un parti qui en imposait à tous. Malheureusement, il y a loin de Bourguiba à Ben Ali , comme il y a loin du Néo Destour des années 50 et 60 au RCD. C'est pourquoi, cette dissolution est venue à point nommé. En définitive, c'est un acte de salubrité publique. Encore une fois, rendons hommage à nos martyrs qui en ont été l'élément déclencheur. Il n’y a que les révolutions qui permettent des ruptures aussi radicales avec le passé, qui rendent les rêves les plus fous réalisables.
Au passage, le tribunal de première instance a été bien inspiré de reporter son jugement du 2 mars (qui coïncide avec l’anniversaire de la création du néo destour en 1934) au 9 mars. Car le RCD a beau se réclamer du parti de Thaalbi et Bourguiba, il n’en est, que l’altération, la caricature. Tout comme l'a été le verdict de ce tribunal de liquider les biens et fonds de ce parti. Car en matière de gaspillage des deniers publics, le RCD est passé maître : mauvaise gestion, personnel pléthorique, journaux déficitaires et j'en passe pour un budget gardé secret mais qui doit se chiffrer à des dizaines de millions de dinars. Et tout cela, pour mobiliser les brigades d'acclamation lors des meetings présidentiels.
Le RCD a vécu. Faisons en sorte que ses pratiques qui avaient pollué la vie politique pendant des décennies le rejoignent dans les poubelles de l'Histoire.
H. Béhi