Opinions - 18.04.2011

Inéligibilité des ex-Responsables RCD à la Constituante

Aux termes de la proposition de la Haute Instance quant d'exclure des élections à l'Assemblée Constituante les ex-Responsables RCD, ayant exercé durant une période s’étalant sur les 23 ans de règne de BenAli, le Président de la République sera appelé ce vendredi à trancher définitivement ce point, dans le cadre du décret-loi électoral.
 
Il y a lieu de rappeler que suite au premier référendum de l'histoire du pays tenu le 26 mai 2002, le Régime a supprimé, le 1er juin 2002, la limite du nombre de mandats présidentiels, a allongé l'âge limite pour déposer une candidature à la présidence, et a instauré une immunité judiciaire pour le président (durant et après l'exercice de ses fonctions).
 
L’objet de cette réflexion consiste à identifier une alternative à ladite proposition de la Haute Instance, selon des critères bien définis :

1) RCDistes sujets de procès judiciaires, ou entachés de soupçons confirmables
2) RCDistes incorruptibles ayant poursuivi l’exercice de leurs responsabilités au-delà de Juin 2002
3) RCDistes honnêtes ayant interrompu leur coopération avec le régime bien avant Juin 2002
 
Pourquoi Juin 2002 ? C’est la date qui a marqué la grande inflexion dans l’autocratie, c'est-à-dire la date à laquelle on ait décidé de malmener le Destour. Ceux qui ont poursuivi leur collaboration avec le Système BenAli sont perçus par certains compatriotes comme complices au Dictateur.
 
1) Les RCDites poursuivis judiciairement ou entachés de soupçons confirmables
 
Je voudrais éviter de développer le cas des Personnalités ex-RCDistes ayant profité du Système Tyrannique et Corrompu de BenAli, pour causer beaucoup de dégâts à la Nation : soutien inconditionnel de BenAli, assistance illégale au profit de sa famille, abus de pouvoirs, trafic d’influence, détournement de fonds, délits d’initiés, pots de vin, favoritisme, diverses malversations, …
 
Naturellement, la Justice est le seul organe compétent à juger de leur intégrité et de leur éligibilité quant à la poursuite de leur activité politique. Encore faut-il hâter les procédures afin d’écourter la période de suspicion et d’incertitude.
 
A ces concitoyens, je leur recommande d’entreprendre la démarche salutaire minimaliste suivante :

1. annoncer la suspension de toute activité politique,
2. reconnaître leurs délits,
3. rendre les droits confisqués à leurs concernés,
4. réparer les préjudices moraux et financiers causés à autrui,
5. se confier à leurs avocats pour se livrer à la justice,
6. demander pardon à leurs victimes,
7. demander pardon à la Tunisie, etc…
 
Certes, ce sont-là de nombreuses procédures, nécessitant de la patience et du courage pour optimiser les conditions de délibération du tribunal et de réconciliation éventuelle.
 
2) Les RCDites incorruptibles et demeurant actifs sous les commandes de BenAli au-delà de Juin 2002
 
Mon propos s’adresse à la deuxième catégorie de RCDistes, ayant poursuivi leurs fonctions et activités au-delà de Juin 2002. Elle mérite à mon avis une appréciation moins controversée, dans la mesure où elle est constituée des ex-Responsables RCDistes, n’ayant pas abusé de leur appartenance au parti de BenAli. Leur seul tord est d’avoir fermé les yeux et gardé le silence face aux dérapages criminels orchestrés par BenAli et sa famille.
 
Par son silence et son refus de démissionner, le plus gentil des RCDistes a indirectement soutenu le régime despotique et corrompu de ZABA : poursuite de l’exécution de décisions injustes, orientation des discours selon le sens favorable du Despote, intimidation de la résistance, etc… Comment alors oserait-il candidater aux prochaines élections ? Comment pourrait-on voter pour lui pour représenter l’électorat à la Constituante ? ...
 
3) Les RCDites honnêtes mettant fin à leur coopération avec BenAli bien avant Juin 2002
 
Ces ex-Responsables ont quitté le pouvoir bien avant qu’il soit décidé de malmener le Destour, en introduisant les réformes de taille évoquées plus haut : illimitation de mandats présidentiels, allongement de l'âge limite de candidature à la présidence, instauration d’immunité judiciaire pour le président.
 
Parmi cette catégorie figurent des personnalités notoires connues pour leur intégrité et compétence, dont je citerai à titre indicatif : Mr Mustapha Kamel Nabli et Mr Mohamed Jégham, ayant respectivement quitté le régime de BenAli en 1995 et en 2001, et ce, pour des raisons de non convergence de vues avec le Dictateur.
 
4) Spectre des avis sur le projet d’exclusion
 
L’écrasante majorité des membres de la Haute Instance considère qu’il faudrait décréter l’inéligibilité aux élections de la Constituante à la première catégorie citée plus haut.
 
Ensuite, les moins modérés ont prôné l’élargissement du périmètre d’exclusion à Ceux ayant conservé leur activité partisane avec BenAli dans le cadre du RCD, pendant les 10 dernières années.
 
Enfin, les plus intransigeants, ils ont appelé à l’exclusion des Responsables et Personnalités ayant endossé une fonction au sein du RCD pendant une période quelconque des 23 ans de règne de BenAli, sans distinction de sa durée ni de son positionnement (au début ou à la fin du règne).
 
Le sondage informel d’opinions publiques révèle une volonté de réconciliation nationale, épicée par un sentiment d’injustice si l’on acceptait de : Aligner les ‘‘collabos de ZABA’’ aux ‘‘torturés de son régime’’. Je citerais quelques commentaires et interrogations de citoyens, de différentes catégories socioprofessionnelles, citations interceptées lors de diverses discussions réelles et virtuelles: « ….
 

  • Comment voulez-vous élire un ‘‘Bon Élève’’ de Ben'Ali à l’Assemblée Constituante, censée être l’organe légitime habilité à élaborer le Destour de la 2ème République devant être valable pour plusieurs générations ?
  • Comment voulez-vous léser des Compétences Patriotiques ayant rejeté le principe de travailler sous les ordres de ZABA, en les alignant aux Collabos de ZABA ?
  • Pourquoi voulez-vous gratifier les Loyalistes de Ben Ali en les assimilant à des citoyens ordinaires, alors que des compétences équivalentes ont refusé de coopérer avec le régime despotique et corrompu de Ben Ali ?
  • Pourquoi faire appel à Eux, alors que le pays regorge de Compétences Politiques, Économiques et Techniques, pour pouvoir conduire le pays dans de meilleures conditions ?
  • Homme d'État Intelligent et Concilient, Monsieur le Premier Ministre a confié hier le sujet aux Gouverneurs pour exprimer leurs avis. Comment ont-ils alors réagi ?
  • Ne devrions-nous pas manifester à Monsieur le Premier Ministre notre acceptation de la proposition de l'inéligibilité des ex-Responsables RCD aux élections de la Constituante ?
  • Mr le Premier Ministre n’attendrait-il pas de nous une confirmation puissante quant à notre soutien à la proposition de la Haute Instance : ‘’Inéligibilité des ex-Responsables RCD à la candidature pour les élections de la Constituante’’ ?
  • Ne devrions-nous pas maintenir la pression par toutes les voies permises et tous les canaux admis : INTERNET, FACEBOOK, MÉDIA ÉLECTRONIQUE, MÉDIA ÉCRIT, RADIO & TV, RUE et KASBAH 3 si nécessaire ?
  • Ne faudrait-il pas commencer à exiger des comptes pour des Journalistes Serviteurs de BenAli, modus aux mensonges & manipulations, dans une perspective de purification de l’environnement journalistique et d’établissement de ''Médias d'Analyse'' Fiables + Sincères + Objectifs + Constructifs ?
  • Jamais je ne pardonnerais aux RCDeistes : ils ont eu beaucoup plus qu'ils ne méritaient et ils n'osent même pas demander le pardon que personnellement je n'accepterai jamais. Aussi, ils devraient-pas s'estimer heureux pour ne pas être poursuivis en justice ou lynché par les révolutionnaires comme ça été fait dans autres pays.
  • Certains veulent nous faire peur par le risque de prise de pouvoir par les Nahdhaouis, pour légitimer certains actes et faire revenir les ex-RCD.  Je suis musulman et je ne voterai jamais Ennahdha, sans avoir la trouille du destin.
  • Au moins Ennahdha a des principes que je ne partage pas, mais les RCDistes n'ont aucun principe. Oubliez un peu le langage de mesquinerie "Tolérance, amour, réconciliation’’ vis à vis de ces salauds qui ont détruit notre pays, notre identité, nos ressources, nos valeurs, notre environnement, notre jeunesse, notre avenir.
  • Je serais le premier à sortir pour une nouvelle révolution, si BCE donne le droit au RCDistes de se représenter pour les élections de la constituante ; et j'appelle tous les Tunisiens à se mobiliser pour que ce Monsieur comprenne une fois pour toute qu'il est là pour appliquer la volonté du peuple et non pas ses propres volontés.
  • Je soutiens toute action qui vise à empêcher les Responsables du RCD à jouer un rôle quelconque au niveau de la Constituante.
  • Je serais très heureux de signer une pétition à cet effet. Le RCD a fait trop de mal pour notre pays, et je ne pense pas qu’il faut hésiter la moindre minute pour barrer la route à ceux qui ont occupé une fonction au sein de cet ex-parti.
  • ….. ».

5) Pistes de recommandations
 
Concernant la première catégorie formée de RCDistes entachés de soupçons, je ne suis pas compétent pour donner un avis. C’est à la Justice de se prononcer le plus rapidement possible. Entre temps, l’éligibilité doit être évidemment levée.
 
Pour ce qui est de la seconde caste, formée des RCDistes n’ayant pas profité du système BenAli ni causé de dégâts au pays ou aux tunisiens mais ayant poursuivi la collaboration avec le Tyran après Juin 2002,  je les invite à entreprendre une démarche civique de demande de PARDON à la Tunisie. Ensuite, c’est à la Commission d’Organisation et de Contrôle des Elections, récemment créée, de se prononcer sur l’éligibilité de chacun d’Eux.
A ceux qui recommandent de tourner la page et d'offrir le PARDON aux ex-Responsables RCD d’après Juin 2002 sans l’avoir demandé, je dirais: ‘‘c'est à Eux de commencer, c'est à Eux de faire le 1er pas, et le Tunisien saura pardonner’’. En effet, dans notre religion, il faut que l'être humain, primo reconnaisse la faute, secundo regrette de l’avoir commise, tertio s’engage de ne plus récidiver, avant de demander PARDON à DIEU, pour espérer le MISERICORDE du TOUT PUISSANT.

En dépit des injustices commises et des maux subis dans leurs voisinages à des degrés plus ou moins différents, je pense que les Tunisiens seraient prêts à catalyser la Réaction de ‘‘Réconciliation Nationale’’. Mais, la démarche du PARDON doit être initiée par les ‘‘accusés’’ et non par les ‘‘victimes’’. Comme les Tunisiens sont majoritairement attachés aux valeurs humaines prônées par l'Islam (Tempérance, Tolérance et Médiation), nous saurons réussir la Réconciliation. Encore faut-il qu'ils commencent par Reconnaître, Regretter, S’engager et solliciter le Pardon.

Enfin, concernant le 3ème groupe, je considère que les ex-RCDistes ayant quitté le Régime bien avant Juin 2002, n’ont pas trahi leurs pays, bien au contraire, ils ont su résister aux pratiques du Despote par leur refus de se soumettre à ses ordres avant de s’éclipser. Par conséquent, je pense qu’il serait légitime de leur rendre hommage pour leur comportement patriotique, et de confirmer leur éligibilité à la candidature aux élections des représentants à l’Assemblée Constituante. Donc, M. Mohamed Jegham, a fortiori M.M. Mohamed Ennacer et Mustapha Kamel Nabli, devraient logiquement recouvrer son droit à la candidature aux prochaines élections, à moins que la Justice ne soit pas de cet avis.

Mohamed Chawki ABID