Ahmed Néjib Chebbi déjà en piste pour les présidentielles
Costume bleu acier, veste déboutonnée et micro cravate, Ahmed Néjib Chebbi, 66 ans, assis au premier rang, invité par Maya Jeribi, monte d’un pas assuré au podium pour présenter vendredi après-midi au Sheraton Tunis, devant plus de 500 de ses supporters, son programme électoral. En fond de scène, fini l’ancien logo « bateau », un arbre aux branches rouges et feuillages verts, la nouvelle identité du PDP. La lumière n’éclaire pas le candidat, mais l’arbre. Les communicants d’Ahmed Néjib insistent : « il tient à être simple, décontracté, proche de tous, comme il est en vrai… » précisent-ils.
Dans la salle, l’ambiance est bon enfant. Ni le grand style des campagnes à l’américaine, ni la négligence populiste. Le public est certes, sélect, mais bien diversifié. Essentiellement des quadra et plus, parmi les hommes d’affaires, dirigeants de grands groupes, banquiers « venus à titre personnel, précisent-ils », avocats, experts comptables, médecins et managers. Sans oublier d’anciens ministres et ambassadeurs.
Avec l’arrivée du nerf de la guerre, la scénographie gagne en production. Depuis le dernier meeting tenu à Sfax, samedi 8 mai, le style se confirme : forte signalétique, bonne organisation avec un service d’ordre discret mais efficace, son et lumières soignés, et, surtout un discours qui se précise. Orateur né, Ahmed Néjib Chebbi a hérité de ses années chez les Pères Blancs à El Menzah, de la seconde année du bac au Lycée Carnot et de ses années d’exil à Alger, puis à Paris jusqu’en décembre 1977, un bon accent français qui s’ajoute à sa parfaite maîtrise de l’Arabe, en bon jéridien. Le verbe s’élance tout naturellement, l’argumentation issue d’un long brassage hérité tout au long de ses transhumances idéologiques entre le Baath, l’extrême gauche, le socialisme et, à présent, « la démocratie progressiste », se veut séductrice à large éventail.
Vendredi 20 mai, il n’est en retard que de 3 semaines, sur la date fixée au 3 mai pour l’annonce de son programme devant permettre à son parti d’émerger victorieusement comme il l'espère, des élections de la Constituante. A l’œuvre avec ses experts, il a dû mesurer l’ardeur de la tâche, surtout qu’en se rasant chaque matin, c’est en fait aux présidentielles qu’il pense le plus. Dans son quartier général nouvellement installé au 2ème étage de l’immeuble Studio 38, sur l’avenue Bourguiba, il a continué à plancher toute la nuit sur les dernières touches à apporter. En renfort, il a fait appel à de belles plumes diplômées de Normale Sup. pour donner à son programme, un finish bien soigné. Son "Conseiller politique & co-rédacteur du programme", Samy Ghorbal (Sciences Po et Jeune-Afrique), n'a pas fermé l'oeil, lui aussi. Longtemps plongé dans la lecture chez François Maspero à Paris, mais aussi durant ses deux années de prison à Tunis et ses trois années de clandestinité dans un logement loué par Radhia Nasraoui, il avait beaucoup lu. Cette vaste connaissance acquise et la maîtrise du verbe, lui font exiger des textes de qualité.
Cette fois-ci, l’enjeu est déterminant. Si on connaît bien (ou presque) l’homme, si on reconnaît sa légitimité militante depuis son premier procès en 1966, et ses condamnations totalisant 32 ans de prison, on ignore tout de ses idées pour la nouvelle Tunisie. Aussi, à force d’évoluer entre les groupuscules et structures, les électeurs cherchent à le positionner dans le nouveau paysage, identifier clairement ses prises de positions par rapport aux autres partis et sur les grandes questions, notamment la laïcité, le Niqab, et autres choix fondamentaux. Poussé à se prononcer sans ambages, il essaye de trouver la bonne plate-forme à même de lui rallier le maximum de voix.
Même si cela peut paraître trop tôt, Ahmed Néjib Chebbi, suit semble-t-il les recommandations d’éminents conseillers en communication politique consultés de partout, et entend faire une montée en puissance progressive. Hyper médiatisé les premiers jours de la révolution, allant de plateau télévisé en studio radio, il est quelque peu boudé, depuis son départ du gouvernement le 8 mars. Depuis,La chaîne Watanya TV ne l’a jamais ouvert l’écran, ni en interview, ni en couverture de meeting, comme le déplorent ses communicants. Mais, évidemment, cela ne saurait tarder à se faire.
Le top départ du Présidentiable est ainsi donné, vendredi à Tunis. Le compte à rebours a commencé. Le road-show le mènera partout en Tunisie, mais aussi en France et dans d’autres villes européennes. Ses équipes s’y préparent fébrilement, la logistique s’organise et le discours se précise. « Si vous êtes-là, c’est bon signe », lance l’un de ses fans, chef d’entreprise à un camarade de classe devenu grand ingénieur, retrouvé au Sheraton. » Ce public est conquis, il va falloir rallier les autres. Ce n’est guère aisé, encore moins gagné d’avance.
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