Non assistance à migrants en danger !
Ce qui était vivement souhaité par les autorités françaises est arrivé, à la suite de quelques prétextes fallacieux et mensongers.
Les forces de l’ordre, comme nous le redoutions, ont finalement été lâchées. Elles sont simultanément intervenues pour « déloger » les migrants ayant « élu domicile » dans des jardins ou des lieux de vie improvisés comme celui de Botzaris, propriété de la Tunisie.
Jusqu’ici les autorités françaises avaient joué la montre et tenu un double langage :
Pour des raisons de calendrier et d’arrières pensées politiciennes, il fallait simultanément soutenir et accompagner la jeune révolution tunisienne et rester ferme sur « une bonne gestion des flux migratoires ». Rien à redire a priori.
Mais c’est au pied du mur qu’on voit le maçon, dit le proverbe populaire, plein de sagesse.
Durant des semaines, maintenant quelques mois, les responsables aux commandes ont multiplié les effets de manche, tentant de rassurer une « droite populiste » aux velléités xénophobes, fermant les yeux, le plus souvent possible sur cette venue inopinée de tunisiens en quête d’un avenir.
Bien sur les arrestations sporadiques se soient multipliées, mais elles n’ont connu ni l’ampleur ni le caractère méthodique que l’on observe depuis hier.
Il ne s’agit plus ici et là de simples rafles -pardonnez l’expression- par ailleurs arbitraires mais d’une action délibérée, réfléchie, concertée d’interventions systématiques et coordonnées de répression « en vraie grandeur » du petit collectif de migrants débarqué à Paris.
Cette traque car il s’agit bien de cela aujourd’hui vise à donner un coup de pouce à ce qui ressemblait déjà à une volonté de pourrissement.
Cette attitude nouvelle des autorités -de concert- qui apparaît désormais sans fards et au grand jour est marquée du sceau de la perfidie et de la vilenie : 500 tunisiens à Paris, quelques milliers en France, c’est encore trop…dispersé dans la nature, le problème -médias muets aidant- disparaitra.
Non comptant de bafouer les textes supranationaux (Schengen) et bilatéraux (convention franco-tunisienne portant sur un quota de 9000 travailleurs non utilisé), les responsables politiques s’arrogent un « droit de poursuite », illégal et usurpatoire, consistant à « chasser » les migrants jusqu’à ce qu’ils se fondent dans la masse, ou que l’opportunité d’un contexte plus favorable leur permette de reprendre l’ignominieuse et infamante pratique « rodée » des « charters d’immigrés ».
Quel bénéfice réel et tangible les autorités françaises attendent-elles ? Un retour volontaire massif, avec la bénédiction « muette et secrète » des autorités tunisiennes qui semblent avoir d’autres chats à fouetter ? Une dispersion telle que ces migrants n’apparaissent plus, ne soient plus visibles, quitte à les voir se soumettre aux jeux de la clandestinité forte de toutes les tentations illicites et de toutes les turpitudes de la survie à tout prix.
Voilà bien le plus mauvais des calculs.
La désespérance et l’exaspération aidant, ces migrants n’auront d’autres ressources que de sombrer dans le vagabondage et l’errance…pour ne pas évoquer pire.
Posons-nous la question de savoir comment se recrute les comparses de larcins ?
Mais non médiatisé car dispersé, le « problème des migrants » disparaitra…telle est la seule logique qui préside aux derniers choix que l’on ne peut que déplorer -a minima-.
La réponse française est disproportionnée.
Cette répression devenue méthodique et ordonnée tourne tout bonnement à l’oppression. Il y a là une nuance qui n’aura échappé à personne.
Il s’agit bien d’une responsabilité étatique, celle de la non assistance à groupes de personnes en danger, certes non judiciarisée, mais qui relève de la condamnation politique.
Bien malin celui qui pourra en déduire les conséquences néfastes à moyen et long terme sur les relations « franco-tunisiennes ». Mais apparemment ces autorités n’en ont cure et pratique volontiers, ce trait d’humour grinçant et cynique attribué à Louis XV : « après moi le déluge ».
Au lieu de cela et avec une certaine naïveté et une candeur héritées de cette amitié historique, on était en droit de croire que la France saisirait l’occasion, comme elle a pu le faire à plusieurs reprises dans son histoire, d’innover, d’inventer et d’accoucher de solutions inédites, viables, mutuellement avantageuses et librement consenties.
On pouvait penser que de nouvelles formes de coopération et de lutte contre le sous-développement allaient murir. Que l’on pourrait combattre, la précarité et la pauvreté par de nouveaux moyens, de nouveaux agencements institutionnels, de nouvelles techniques.
A l’aide au retour minimaliste et infamante aurait très bien pu se substituer une habile, ingénieuse, et créative solution en devenir : celle de l’articulation des projets personnels pris partiellement en charge par la France et ayant pour contrepartie une réinsertion professionnelle par de nouveaux dispositifs d’accueil en Tunisie.
Il va sans dire que présentée comme ceci « la solution » peut relever de l’utopie, du rêve béat, mais pas si la Tunisie se dote elle aussi, de son coté, de maisons du développement local, de dispositifs de microcrédit ou de crédit-relais réservés au TPE, et d’autres formes qui restent à définir, comme des emplois « programmés » liés la montée en puissance de la ré-industrialisation faites de plans-filières de production : autour de l’informatique industrielle (où excelle déjà quelques entreprises esseulées), des biotechnologies accessibles…que sais-je encore.
Schématiquement : « A la France, une partie de la formation professionnelle qualifiante », pourquoi par sous la forme connue de l’alternance (travail – formation) ; « A la Tunisie de nouvelles structures d’insertion ou de réinsertion professionnelle ».
Soyons réaliste demandons l’impossible. Cette période est propice au murissement de solutions alternatives.
« Dignité, travail, liberté » restent les maitres mots communément partagés…si la France veut bien y souscrire en lieu et place d’offrir le budget de son 14 Juillet à une association caritative…poudre aux yeux…et consacrer son « aide pluriannuelle mais maitrisée » à l’effort de reconstruction que la Tunisie va entreprendre.
Hédi Sraieb