Opinions - 28.06.2011

Les Tunisiens à l'étranger: un trésor perdu et retrouvé

Le sujet Tunisiens à l’étranger nous touche  dans nos fibres et nos sentiments. Abordons-le donc par les chiffres. Ils sont plus de 1100000 (dernier chiffre connu 1090000 en 2009)et s’accroissent d’au moins 50000 unités par l’émigration selon l’Institut National des Statistiques et plus si l’on compte aussi les naissances hors du sol tunisien. Ils sont donc plus de 10% du total et augmentent cinq fois plus vite que les tunisiens du « continent »ce qu’illustre ce paradoxe d’une croissance annuelle de 50000 pour un million de tunisiens émigrés et de 100000 pour 10000000 d’habitants sur le territoire national.Ce mouvement  varie selon les années mais est constant au moins sur les huit dernières années où la croissance varie de 3,8 à 6,2% entre 2002  et 2009.

En France mais pas seulement. Il y a quelques décennies et jusqu’aux années 90  du siècle dernier, émigration voulait dire France d’abord et cela semblait « la » destination du tunisien quittant son pays .Les liens « historiques » et la scolarisation massive bilingue des tunisiens ainsi que les besoins d’une économie française en pleine expansion ayant un large besoin de bras dans les différents secteurs de l’économie, industries de montage, bâtiment et agriculture en faisaient la destination presqu’exclusive en Europe avec en plus une destination allemande refuge d’excellents ouvriers qualifiés originaires de la région de Bizerte captés par l’industrie automobile.

Aujourd’hui, tout en restant européenne dans sa très grande majorité (85%) est de plus en plus équilibrée et sur la période déjà citée, la part relative de la France passe de 60 à 54% alors que celle de l’Italie passe au même moment de 11 à 14% .D’autres réalités émergent entre temps, particulièrement le Canada et les Etats-Unis.

Si loin, si près !

Le tunisien est historiquement un être domestique, très attaché à son quartier, sa ville, et par conséquent sa patrie.Tout en exprimant ces sentiments pacifiquement, il les manifeste très fort. La Tunisie est dès les années 1920 le berceau d’un des deux plus vieux partis  nationalistes de masse du monde arabe, le Destour tunisien et le  Wafd égyptien. Le tunisien est parti de son pays  plus tard que les autres ressortissants maghrébins et a été le plus réticent à demander une  nationalité étrangère au point d’en être handicapé dans sa vie professionnelle et privée.S’étant construit un nid là où il était, ses liens avec le pays sont restés forts, manifestés spectaculairement chaque été par les retours  qui étaient la vraie saison des fêtes .Au fil des ans, cette réalité s’est diversifiée,des tunisiens sont nés à l’étranger, d’autres sont partis à l’âge adulte après leurs études universitaires pour compléter leurs études et  y sont restés pour se réaliser en tant que hauts cadres de grandes entreprises ; d’autres sont partis par amour vrai ou feint (ils sont 16 en Argentine,le pays des tangos langoureux !)

Notre Révolution est pour eux et par eux !

Au fil des ans, le régime en place a construit autour de cette communauté une politique de plus en plus inadaptée et a transformé les droits de cette communauté aux services administratifs et sociaux en privilèges, et parfois même en objet de chantage. Ayant joué un rôle actif dans la résistance, manifesté par les associations fondées tout d’abord par la Gauche mais aussi en 2010 par la campagne contre la censure sur internet. Les évènements de décembre dernier ont été l’occasion d’une participation active via internet, sur les places et devant les consulats, haut-lieux d’un encadrement « consulat-RCD-Police »objet du rejet généralisé de la communauté tunisienne.Certains ont dès le 15 janvier, plié bagages et « retourné voir » pour participer à la Tunisie nouvelle d’après la Révolution.

Cette option extrême ne peut être celle de tous. Diverses façons s’offrent à eux pour servir leur pays,les vacances passées en tunisie malgré les rumeurs fantaisistes sur l’insécurité et l’incitation de leur entourage à faire de même sont, pour cet été ,le moyen le plus efficace pour y contribuer. Préparer les élections de la Constituante qui sera la première instance instance souveraine où ils électeurs et éligibles en tant que tels (19 sièges leur sont exclusivement réservés) en s’inscrivant sur les listes consulaires, en s’informant chacun et en diffusant l’information recueillie sera l’occasion historique de participer à l’élaboration d’une Constitution qui ne pourra pas les oublier, eux qui appartiennent incontestablement à ce grand petit pays,la TUNISIE.
   
Tarek Châabouni
Mouvement Ettajdîd
Responsable Relations Internationales, Partis et Institutions européennes