Comme si vous étiez avec Caïd Essebsi à la Haute Instance, au Bardo
« Rester (assis), je ne peux plus le supporter (el qaad, maadech ennjoumou) » : Prenant le micro debout au podium, le Premier ministre, M. Béji Caïd Essebsi, lance d’emblée sa première boutade. A double sens. Il est vrai qu’il ne peut se contenter d’un fauteuil confortable et le voilà contraint d’agir, de se déplacer. Rien que durant la semaine écoulée, il s’était rendu dès le dimanche 3 juillet en périple express dans 3 pays du Golfe, puis, à peine rentré, il était reparti à Aix-en-Provence, participer dimanche 10 juillet, aux Rencontres Economiques…
Mais, malgré la fatigue due à tous ces déplacements, le stress en plus, il essaye de garder le sourire, restant vif dans ses répliques, cherchant à désamorcer toute tension.
Une autre membre se retire? Lamia Farhani n’a pas attendu le début des questions réponses pour élever sa protestation et demander à prendre la parole. En préparation de cette séance de questions réponses, chacun des groupes constituant la Haute Instance, à savoir, les partis, les régions, les personnalités indépendantes et la société civile (ainsi que les jeunes), devait élire un porte-parole devant interroger le Premier ministre. N’ayant pas été choisie par ses pairs, Mme Farhani a essayé de protester bruyamment, dès l’ouverture de la séance par M. Yadh Ben Achour. Celui-ci voulait au départ l’éconduire, puis lui avait laissé entendre qu’il lui accorderait la parole, mais, en signe de protestation, elle a décidé de quitter la salle. Retrait définitif ? Simple coup de colère qui finira par passer, certainement.
Juger les assassins. A peine le Premier ministre a-t-il fait son entrée dans la salle que Me Samir Ben Amor brandit avec une collègue, une affiche sur laquelle avaient été collées deux photos de martyrs. Un slogan sous forme de revendication : « le peuple veut le jugement des assassins ». Cameramen et photographes ne ratent pas l’occasion…
Pourquoi les membres du gouvernement ne viennent-ils pas chez la Haute Instance? Le reproche prend forme de revendication. En dehors de M. Mohamed Ennaceur, ministre des Affaires Sociales, aucun autre ministre ne s’est présenté devant les membres de la Haute Instance pour les écouter et répondre à leurs questions. « Je n’y vois aucun inconvénient » répondu le Premier ministre, je vais voir ça de près. « Heureusement que vous au moins, vous venez nous voir ! » lui ont lancé les membres, en hommage respectueux.
Effets de manches. Avocat de profession, M. Caïd Essebsi ne peut s’empêcher parfois de faire usage des fameux effets de manche. Dans l’un de ses gestes, par un moment de haussement de ton, sa main a effleuré le verre d’eau posé sur le pupitre qui a chancelé avant de se briser. Les appariteurs se sont empressés de retirer les débris de verre et nettoyer le pupitre… alors que le Premier ministre, sans s’en soucier, poursuivait son intervention.
« Ijéni l’houni, enti ! » Le Dr Mohamed Attya, militant démocrate de Mahdia (et secrétaire général régional de la LTDH), n’en croyait pas ses oreilles. Ayant chahuté le Premier ministre de son siège au fond de la salle, celui-ci lui intime l’ordre de venir auprès de lui. Lentement, il s’avance jusqu’aux premiers rangs et y prend place sagement, le temps que M. Caïd Essebsi termine sa première série de réponses. Puis, le rejoignant sur le podium, c’est à une accolade chaleureuse entre les deux hommes qu’assistent les membres de la Haute Instance.
Que sont-ils dits ? « Le Premier ministre a été très courtois et compréhensif, rapporte à Leaders, le Dr Attia. J’ai attiré son attention sur certaines récentes nominations au sein du gouvernement, notamment celle du Secrétaire d’Etat Khemaies Jehinaoui. Il m’a dit d’ailleurs qu’il ne le connaissait pas personnellement, le considérant comme un diplomate de carrière qui n’a fait qu’obéir à une assignation dans un poste à l’étranger. Et il m’a demandé de passer le voir à la Kasbah, ce que je ferai avec plaisir pour l’entretenir de tant d’autres questions. »
Pas de normalisation ! Alors qu’il s’apprêtait à quitter la salle, le Premier ministre a vu venir vers lui une bonne vingtaine de membres de la Haute Instance, chacun l’interpellant sur une question. Puis, tous se sont mis à scander des slogans contre la normalisation avec l’Etat d’Israël. Sans se départir de son sourire, il les a salués puis s’est dirigé vers la sortie.
Trente minutes de plus. Commencée à 10 heures précises, la séance a dépassé de 30 minutes les deux heures prévues. L’ambiance générale était bonne et les échanges courtois et respectueux, malgré la gravité de certaines questions posées. Le Premier ministre y était accompagné par son staff rapproché, composé du ministre délégué, M. Ridha Belhadj, du directeur de Cabinet, M. Taieb Youssefi et de son Conseiller à la Communication, M. Moez Sinaoui.