Déplacer la Faculté de Médecine de Monastir: la Proposition de Trop du PDP!
Le Parti Démocratique Progressiste –PDP- a fait, il y a quelques mois, une entrée bien réussie dans la ville de Monastir. Bien préparée en collaboration de bien de Monastiriens, elle promettait une belle victoire de la liste de ce Parti dans cette ville restée dans une très large proportion fidèle à la mémoire du Combattant Suprême. En venant à Monastir prononcer son discours, Mohamed Néjib Chebbi n’a pas omis de rendre un vibrant hommage au bâtisseur de la Tunisie moderne malgré quelques réserves qu’il avait soulignées avec force détails. On ne lui en voudra pas. Dans la ville de Bourguiba, la tolérance et la démocratie n’ont jamais fait défaut quoi qu'en disent les mauvaises langues.
Mieux. Quand en plein discours, il a été interrompu par les « sitineurs » de l’aéroport International Habib Bourguiba de Monastir, Chabbi, avec beaucoup de sang froid et autant de savoir-faire, les a laissé faire tout en promettant de passer les voir avant de repartir de Monastir. Bien qu’il fût à la hauteur de sa promesse, il n’a pu résoudre aucun problème. On ne lui en voudra pas non plus sachant la difficulté à démêler cet imbroglio juridique.
Selon bien de participants, Chebbi s’en était bien tiré. Il a eu droit à une invitation le soir même de son arrivée à un dîner-gala organisé par le Rotary Club. Tout comme il a eu droit à une réunion préliminaire avec quelques hommes d’affaires de la région. Bref, un départ prometteur que la personnalité de Chebbi a favorisé. Homme ayant derrière lui plusieurs années de lutte pour la démocratisation de la société tunisienne, il a su par un discours à la fois modéré et percutant recueillir autour de lui plusieurs sympathisants, voire adhérents. D’autres partis n’ont pas eu la même chance. Nous ne citerons que le Parti Ennahda qui a eu maille à partir avec les habitants de cette ville comptant pourtant plusieurs sympathisants islamistes.
A quelques semaines des élections de la constituante, le PDP partait favori jusqu’au jour où le même Parti publiait sur Internet son Programme électoral en 120 points dont celui, portant le n° 78, traite du projet de redéploiement des structures hospitalo-universitaire. Le 28 août dernier, le quotidien « Le Temps » s'en fait l’écho dans une synthèse signée Hassine Bouazra, un journaliste qui connait bien son métier. De quoi s’agit-il ? Il s’agit de réaménager les structures sanitaires actuelles du pays. Objectif : des soins plus efficients. Cela se traduirait, selon le PDP, par le déplacement de la faculté de médecine de Monastir à Gafsa ou à Kasserine en octroyant des avantages financiers et administratifs pour ceux qui veulent bien aller y travailler. Quant à la faculté de médecine dentaire de Monastir, elle sera sous la tutelle du pôle de Sousse-Sahloul. « A peine croyable », note le Pr Ali Chadli, doyen de la faculté de médecine de Monastir.
Cette proposition appelle au moins trois remarques essentielles. Mais auparavant il faut faire un rappel historique qui n’aurait pas du échapper aux politiciens du PDP. Cette faculté créée en 1980, avait fait l'objet dans les années 90, d'une campagne pour sa fermeture pure et simple. La faculté comptait à l’époque 700 étudiants. Une sorte de cellule de crise s’était cristallisée autour du Pr. Mohamed Habib Ben Farhat, doyen de la faculté à l’époque pour défendre cet acquis. Le Premier Ministre en charge de ce dossier devait tenir une ultime réunion en présence des principaux intéressés. Mohamed Charfi, alors ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique résuma la situation et mit fin à cette situation par une simple phrase : « A un moment où le Département dont j’ai la charge cherche désespérément à répondre aux désirs des étudiants dont le nombre ne cessait de croitre d’année en année, vous me suggérez la fermeture d’une faculté. Mais c’est de l’incohérence ». Cette intervention aussi brève que concise a eu le mérite de mettre fin à toutes les discussions. La décision fut reportée sine die. Plus personne ne parlera de fermeture… jusqu’au jour où le PDP nous parla de transfert. Un léger mieux, il faut l’avouer !!!
Quoi de plus normal qu’un tel projet provoque un véritable tollé à Monastir. Cette ville qui a souffert le martyre sous la dictature de Ben Ali, n’est pas prête, aujourd’hui, à revivre d’autres situations cauchemardesques. Et croyez-moi les dégâts causés par ce despote-ignorant sont incalculables. Nous n’en citerons que quelques uns : Fermeture de la SOGITEX, de la SHTT et de Skanès-meubles. La ville a livré en pâture à la famille du « Roi » déchu. Le Palais présidentiel de Skanès viabilisé et les terrains vendus pour grossir la fortune des Trabelsi. On pourrait multiplier les exemples. Devons-nous poursuivre cette énumération ? Certainement pas. Un parti qui se respecte doit être au fait des choses avant de se prononcer sur tel ou tel projet. C’est notre première remarque au PDP.
La deuxième remarque est toute simple et fait partie des principes de base de toute action politique d’un Parti qui se doit de consolider les acquis et d’en créer d’autres. Aussi, la proposition de transfert de la faculté de médecine de Monastir est-elle de trop ?
Enfin, lorsque le chef de fil de ce Parti promet de faire paraître un démenti, il faut que cela intervienne dans les heures qui suivent. On attend toujours le démenti promis par Chebbi sur les ondes de Radio-Monastir, bien que sur son site, le PDP a fait paraître un démenti qui a été réitéré au cours de la dernière conférence de presse de Maya Jeribi en réponse à la question d’un journaliste. Manque de professionnalisme ou volonté délibérée de ne pas accorder à cette question plus qu’elle ne mérite. Mais la réunion annoncée à Monastir dimanche 4 septembre à l’hôtel Habib pour débattre de cette question a été purement et simplement annulée.
Bref, ce démenti en bonne et due forme ne viendra pas. On a compris. Et on en tirera les enseignements qu’il faut au moment qu’il faut.
Mohamed Bergaoui
Journaliste et écrivain