Erdogan : La Tunisie, comme la Turquie, peut démontrer qu'Islam, démocratie et laïcité ne sont pas incompatibles
« La Tunisie démontrera au monde entier, à l’instar de la Turquie, qu’Islam, démocratie et laïcité ne sont pas incompatibles et que la laïcité de l’Etat constitue un garant de la liberté du culte ». C’est ce qu’a déclaré, le Premier ministre de Turquie, M. Recep Tayyip Erdogan, à l’issue de son entretien jeudi matin à Tunis avec son homologue, M. Béji Caïd Essebsi. « Quelque soit le parti qui accèdera au pouvoir, à l’issue du scrutin du 23 octobre, a-t-i ajouté, nous entretiendrons avec la Tunisie des rapports renforcés et développerons notre coopération bilatérale dans tous les domaines, politique, militaire, économique, social, éducatif et culturel. Nous ne pouvons nous contenter du volume actuel de nos échanges économiques qui se limitent à 1 milliard de dollars et devons encourager nos investisseurs, chefs d’entreprises et touristes à se rendre en Tunisie et promouvoir l’échange des étudiants entre les deux pays. Nous sommes très proches, tout nous rapproche, rien qu’à voir nos deux drapeaux quasi-similaires et nous devons nous rapprocher encore davantage.»
Le Premier ministre a évoqué à cet égard la mise en place d’un programme « Mawlana », pour l’échange d’étudiants, le jumelage entre Tunis et Istanbul, le développement du transport maritime, l’appui au tourisme et la promotion des investissements directs.
Visiblement satisfait de son entretien avec son hôte, le Premier ministre M. Béji Caïd Essebsi s’est félicité, devant la presse, de « la concordance des points de vues tunisiens et turcs sur nombre de questions ». «La Tunisie et la Turquie, a-t-il souligné sont pour la démocratie, la dignité des peuples et leur autodétermination, à commencer par le droit du peuple palestinien à un Etat indépendant, reconnu. Nous avons également évoqué, a-t-il ajouté la relation de la religion avec l’Etat, conscients qu’un Etat juste respecte la liberté des croyances pour tous. Nous sommes aussi convaincus de la nécessité de combattre le terrorisme et l’extrémisme, qu’il soit de droite ou de gauche ».
De son côté, rendant hommage à la révolution tunisienne, M. Erdogan a souligné les valeurs qu’il incarne et des principes de démocratie qu’elle consacre, soulignant que le scrutin du 23 octobre en offrira une belle illustration. « La vraie démocratie, a-t-il déclaré, c’est de laisser la volonté du peuple s’exprimer et de respecter cette expression, sans la moindre remise en question ni contestation des résultats des urnes. Aucune autre velléité ne saurait s’opposer à la volonté du peuple ou lui barrer la route et toute réelle consultation populaire ne peut se limiter à un panel réduit de décideurs politiques, elle ne gagnera sa légitimité que par une large consultation de la base, seule en mesure de porter la voix du peuple. C’est ce qui permettra à la Tunisie d’être toujours plus forte. Je comprends les difficultés rencontrées mais je suis confiant que la Tunisie et la Turquie, ensemble, contribueront à un avenir meilleur. »
Etat et religion
Interrogé sur la relation entre l’Islam et l’Etat, le Premier ministre Turc a déclaré : « si je dois définir la Turquie, je réponds toujours que c’est un Etat démocratique, social, laïque et de droit. Si une personne seule ne peut se proclamer laïque, un Etat, doit l’être. Un musulman peut gérer avec succès un Etat s’il respecte cette laïcité qui se maintient à égale distance de toutes les religions et convictions. C’est là la garantie des libertés ». Quant à sa position à l’égard du mouvement Ennahdha, M. Erdogan a répondu : « nous respectons toutes les opinions tunisiennes et nous nous conformerons aux choix que feront les Tunisiens. Quelque que soit le parti qui sera porté au pouvoir, nous aurons avec lui des relations au plus haut niveau ».
La Palestine et Israël
Pour ce qui est de la cause palestinienne et de l’attaque israélienne contre le navire turc Marmara, le Premier ministre Turc a indiqué que « la Turquie ne peut rester indifférente face aux agressions qui se multiplient contre le peuple palestinien ni accepter cette attaque. Tant qu’Israël n’a pas présenté ses excuses, dédommagé les familles des martyrs et levé l’embargo sur gaza, nous ne pourrons maintenir nos relations avec ce pays au même niveau. Nous avons déjà invité l’ambassadeur de l’Etat hébreu à quitter la Turquie, réduit le niveau de représentation diplomatique entre les deux pays et gelé l’accord de coopération industrielle militaire. Nous défendrons nos intérêts et ceux de nos martyrs et poursuivrons l’Etat d’Israël devant la Cour de La haye et sécuriseront nos navires en méditerranée mais aussi la navigation dans les eaux internationales sans laisser à Israël la liberté de faire ce que bon lui semble. Vous allez voir que nous sommes déterminés à le faire et que nos navires de guerre appareilleront dans la région.