Allons-nous sortir de l'ornière ?
Plus de deux semaines sont passées depuis les élections historiques du 23 octobre et l’Assemblée constituante n’est pas encore en session. Nous sommes encore dans le provisoire qui, à l’évidence, dure ! Il est vrai, qu’entretemps, il y a eu les inondations, les recours au Tribunal administratif et la fête de l’Aïd.
Ce qui est préoccupant c’est que les négociations entre les partis de la future majorité semblent s’enliser sur la répartition des fauteuils de la Présidence de la République, du Conseil des ministres et de l’Assemblée. Jusqu’à quand ? D’ici à ce que ces négociations aboutissent, d’autres inondations, plus destructrices encore, risquent d’emporter les fruits de la Révolution.
Alors que les jeunes, qui ont fait la Révolution et se sont mobilisés en masse pour voter, attendent des actions des responsables des destinées du pays. Faut-il rappeler que cette attente des actions de la part des responsables se manifeste depuis janvier dernier ? Quelle est la faute du jeune, surtout diplômé, qui attend un emploi depuis des années, si les responsables du pays ne lui offrent pas d’emploi ? Quelle est la faute du jeune, qui attend depuis des années, s’il ne voit pas une lueur d’espoir au bout du tunnel ?
Peut-on encore attendre la sortie de l’ornière, alors que des échéances importantes sont immédiates ? La première est la préparation d’un nouveau budget qui, en principe, doit refléter les priorités stratégiques de la nouvelle équipe au pouvoir. En effet, c’est par le budget, instrument par excellence des choix primordiaux, que le nouveau modèle de développement commencera à être mis en œuvre. Va-t-on reconduire le budget 2011 en 2012 sans impact sur les investissements, la politique des revenus, les incitations à l’épargne et à l’orientation des actions de création de valeur ajoutée, le développement rural et le rééquilibrage socio-économique des régions ?
L’année 2012 devra être l’année des réformes de structures nécessaires pour redresser la situation économique, sociale et culturelle de notre pays. Or, pour mettre en place les équipes politiques et techniques qui vont préparer ces réformes et les discuter en profondeur avec les organisations nationales et les représentants de la société civile dans toutes les régions, il faut une équipe gouvernementale pour les constituer.
Troisième échéance, le service de la dette alors que les horizons se ferment autour de nous. On se frotte les mains en disant que les exportations de certaines industries ont enregistré des chiffres records quand on voit l’Europe s’écrouler sous le poids des dettes souveraines. Après la Grèce, pratiquement en faillite, c’est l’Italie dont la dette dépasse 2.6 mille milliards d’euros qui voit son économie déstabilisée par les marchés financiers internationaux lesquels lui infligent des taux d’intérêt usuraires que son budget ne saurait supporter. Plus tard, ce sera l’Espagne avec, elle aussi, une dette supérieure à 2 mille milliards d’euros. Et la France n’est pas encore très loin, malgré les efforts remarquables du Président Sarkozy. A qui va-t-on exporter pour assurer le service de notre dette extérieure ? De quels pays viendront les touristes, s’ils peuvent s’offrir ce luxe de voyager, pour soutenir notre balance des paiements ? Les promesses du G8 faites à Deauville, à Marseille et à Tunis seront-elles tenues dans une telle conjoncture ? Mieux vaut regarder du côté des organisations financières internationales, y compris la Banque islamique, le Fonds arabe de développement et les fonds souverains koweïtien, émirati, qatari, et saoudien de nos frères du Golfe.
Toutes ces actions sont d’une extrême urgence et n’attendent pas les conciliabules interminables des chercheurs de fauteuils. De grâce, mettez en place les structures de bonne gouvernance de la Tunisie le plus rapidement possible ! Il y va de l’intérêt supérieur de notre pays.
Dr. Moncef Guen