Jalloul Ayed : «Mon dernier discours de ministre…» ?
« C’est avec un pincement au cœur que je m’adresse à vous dans cette enceinte financière, mon petit doigt me dit que c’est mon dernier discours de ministre des Finances ». En show man qui sait briser la glace et rallier à lui l’audience, le ministre Jalloul Ayed avait bien commencé son intervention, samedi, lors de la clôture de la conférence du Forex Club de Tunisie sur le marché des capitaux. Mais, très rapidement, il a été vers la substance, évoquant en toute franchise ce qui lui semble être le plus utile au pays, et recommandable pour ses successeurs à mettre en œuvre.
Le ministre sortant reconnaît l’existence de plusieurs carences, à commencer par l’inexistence d’un marché de capitaux, appuyé par des investisseurs professionnels et des gestionnaires de fonds à mêmes d’accompagner l’entreprise durant tous ces cycles, l’inexistence aussi de la micro-finance, à ne pas confondre avec le microcrédit, la non-consolidation du système bancaire à commencer par des banques publiques pour créer des champions nationaux et le gap effarant entre banques publiques et banques privées, jusqu’à la rémunération de leurs cadres.
Revenant sur les dispositifs stratégiques mis en place, notamment la Caisse de Dépôts et Consignation et le fonds intergénérationnel Ajiel, le ministre Ayed, a souligné l’effet multiplicateur que pourrait procurer la cession totale ou partielle des actions détenues par l’Etat dans nombre d’entreprises publiques ainsi que des entreprises récemment confisquées, en investissant leurs revenus, à travers ces fonds, dans le capital de nouvelles entreprises leur permettant ainsi de mieux se financer. « Ce que peut rapporter à l’Etat, en dividendes, explique-t-il, sa participation au capital de la Régie du Tabac, ou telle autre entreprise, en espérant que celle-ci soit bénéficiaire, est bien dérisoire, par rapport au rendement direct et indirect de l’investissement du même montant au capital d’autres nouvelles entreprises qui ainsi capitalisée, peuvent accéder à d’autres ressources sur le marché financier, créer plus d’emplois et se développer. »
"Je suis pour ..."
Le ministre des Finances sortant affirme clairement ses convictions : «Je suis pour la création d’un marché de capitaux, avec un marché primaire des valeurs du Trésor », mais aussi « je suis pour une nouvelle vision du rôle des banques commerciales en tant que véritables agents de changement », «je suis pour un développement plus important de la Bourse», «je suis pour qu’une bonne partie des entreprises publiques qui s’y prêtent, soient introduites en bourse», « je suis pour qu’une partie, ne serait-ce que minime de 10 à 15% du capital des opérateurs de télécom soit mise en Bourse», «je suis pour le développement de la finance islamique et d’ailleurs le projet de nouvelle loi de finance aligne le traitement fiscal des produits islamiques sur les autres», «je suis pour la revalorisation des rémunérations dans les banques publiques, à l’instar des banques privées, sur la base de performance accomplie »…
La salle applaudit. Indéniablement. Après l’analyse très bien inquiétante de la situation économique dans le pays, par le Gouverneur de la Banque Centrale de Tunisie, M. Mustapha Kamel Ennabli, qui a interpellé les présents quant aux insuffisances à rattraper et aux menaces qui pèsent sur l’économie, le ministre des Finances a voulu être, comme dans une parfaite répartition des tâches, plus optimiste
Sur le podium, Houssein Mouelhi, président du Forex Club, ne pouvait, avec ses coéquipiers du bureau directeur, espérer mieux, comme discours officiels. A ses côtés, Manfred Wiebogen, président de l’Association internationale des Cambistes regroupant 65 associations dans le monde fortes de plus 13000 adhérents, et qui a fait spécialement le déplacement à Tunis, était ravi de la réussite de cette manifestation.