News - 15.01.2012
Dissensions au sein de la Troïka ? Nullement, réfute Marzouki, c'est une affaire d'Hommes !
« Fissures, fractures, dissension, divergences » et autres reviennent pour qualifier les relations au sein des trois dirigeants de la Troïka : Marzouki, Jebali et Ben Jaafar. Avec une focalisation sur les deux premiers, notamment pour ce qui est des prérogatives en matière de relations extérieures de la Tunisie. Interrogé à ce sujet, le président Marzouki a essayé de les balayer toutes, dans sa réponse à notre confrère, Mohamed Bahghali, envoyé spécial du quotidien algérois Al Khabar, révélant qu’un diner hebdomadaire de concertation et d’échange réunit chaque mardi soir les trois présidents. Quant au pacte scellé avec Ennahdha, il a précisé que c’était le seul choix possible et que des lignes rouges ont été fixées de part et d’autres.
Au cours de cette même interview, le Dr Marzouki est revenu sur les relations avec l’Arabie Saoudite qualifié de « grand pays arabe frère et nous tenons a entretenir avec lui des relations privilégiées » . Il a cependant réitéré la demande d’extradition du président déchu « qui doit nous indiquer où il avait planqué les richesses pillées. » Il a par ailleurs révélé que dans un geste « humaniste », il avait accédé favorablement à la demande de Ben Ali pour récupérer le livret scolaire de son fils.
Interrogé sur la Syrie, le président de la République a marqué sa nette opposition de toute intervention étrangère qui risque à son avis d’ouvrir la voie à toutes les interventions et de déclencher une guerre dans la région. Extraits.
« Vous ne trouverez pas un trio plus harmonieux »
« J’ai pris mes fonctions il y a 30 jours, a-t-il déclaré, et je me suis déjà entretenu avec le Chef du gouvernement trois fois au moins d’autant plus que nous avons convenu ensemble et avec le Dr Ben Jaafar, président de l’Assemblée constituante de nous retrouver chaque mardi, en dîner privé, de concertation et d’échange. Vous savez que ce trio qui gouverne aujourd’hui la Tunisie se distingue par deux caractéristiques : la première, c’est que nous avons tous été victimes de Ben Ali et la seconde, nous sommes des amis de longue date et cela fait plus de 30 ans que nous nous connaissons bien et nous nous respectons. Lors de notre diner d’hier soir, par exemple, nous n’étions pas tous d’accord sur certaines questions comme la Syrie ou la sécurité, mais nous avons essayé de rapprocher nos points de vue. C’est pourquoi, je tiens à vous affirmer que tout ce qui se dit sur des dissensions n’a aucun fondement. Nous avons bâti une coalition solide pour mettre en œuvre nos engagements, c’est une question de « Rejoulia », jusqu’à conduire le pays vers les prochaines élections. Croyez-moi que vous ne trouverez par un trio harmonieux comme celui qui gouverne la Tunisie aujourd’hui. »
« Garantir le droit de celle qui porte le Niqab et celle qui ne le porte pas »
« Nous avons scellé ce pacte parce que nous n’avions pas d’autre choix. Le contraire serait une guerre civile politique. Les Islamistes ne peuvent pas gouverner seuls, les laïcs aussi. Et lorsque nous avons entamé nos discussions, nous avons fixé, le Dr Ben Jaafar et moi, les lignes rouges qui portent sur les droits de la femme, les droits de l’Homme, les libertés individuelles et publiques, l’alternance au pouvoir et la répartition équitable des richesses, ce qui est conforme aux principes qui ont toujours été au cœur de nos combats. Nos partenaires d’Ennahdha n’y ont pas vu le moindre problème et ont dessiné, de leur côté, des lignes rouges que sont les questions de l’identité arabe et musulmane. Là aussi, il n’y avait pas de différend entre nous ».
Peut-on parler d’identité arabo-musulmane sans évoquer l’obligation du port du voile, l’interdiction de vente d’alcool, etc. et autres revendications des Islamistes ?
«N’oubliez pas que lorsque nous avions évoqué l’identité, c’était dans le cadre du respect des droits et libertés. Nous sommes certes un peuple arabe et musulman, mais nous reconnaissons en même temps les droits individuels et collectifs. Nous nous sommes dits que nous n’allons pas édifier ni un état religieux, ni un état laïque à la française, mais un Etat civil. C’est celui qui garantit le droit de la femme qui porte le Niqab comme celle qui ne le porte pas, le droit du croyant comme celui du non-croyant… »
Rendez-nous Ben Ali
« L'Arabie saoudite est un grand pays arabe frère et nous tenons a entretenir avec lui des relations privilégiées. Mais en contrepartie, nous espérons que nos frères saoudiens comprennent notre demande d’extradition de Ben Ali, qui est une légitime revendication du peuple tunisien. L’Islam n’autorise pas d’accueillir les despotes qui se sont attaqués à la religion et versé du sang. Nous voulons aussi que ce fugitif nous indique où ont été planquées les richesses pillées des Tunisiens. Le Conseiller juridique à la Présidence de la République vient de m’informer que le déchu a demandé qu’on lui remette le livret scolaire de son fils. J’ai donné mon accord pour qu’on le lui transmette, s’agissant d’une question humaine et parce que son enfant qui n’a pas dépassé les 6 ans n’est pas coupable de ce que son père avait perpétré. »
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