Caïd Essebsi sur France 24: « pas inquiet, mais vigilant »
«Je ne suis pas inquiet, mais vigilant, ce qui n’est pas la même chose » répond l’ancien premier ministre Béji Caïd Essebsi, interrogé par France 24, sur la situation en Tunisie. Ce qui le « dérange », c’est que la Constituante élue pour rédiger la Constitution, n’a pas encore commencé à le faire depuis 3 mois, ni engagé les préparatifs nécessaires pour les élections, « notamment l’inscription de tous ceux qui en ont le droit », alors que « le temps est fixé à l’avance, le tout devant se terminer dans l’année ». Ca ne va assez vite ? « Ca ne va pas du tout, souligne t-il, puisqu’ils n’ont pas commencé à étudier la Constitution».
Celui que son interviewer considère comme « l'homme qui joue l’éternel retour », et se présente comme « une conscience », dénie toute nouvelle ambition. Il s’estime concerné par l’avenir de la Tunisie, ce qui l’incite à veiller à la réunion des bonnes conditions de l’alternance démocratique et se déclare clairement contre le regroupement d’une majorité (la Troïka), qui « marginalise les autres partis».
A quoi imputer ce retard pris et y voit-il une mauvaise volonté de la part du gouvernement ? « Je ne le pense pas, dit-il avant d’ajouter, mais, il y un constat de fait : depuis 3 mois nous n’avons pas fait de grands progrès… Nous n’avons fait que la moitié du chemin. Il m’importe de faire la deuxième moitié qui doit mener aux prochaines élections. Le gouvernement actuel, peut gouverner aussi, mais sa mission principale, c’est de rédiger la Constitution».
Se considère-t-il, comme citoyen, dans l’opposition ? « Pas du tout, » affirme-t-il. Est-ce qu’il lance un appel à l’opposition pour qu’elle se fédère ? Il s’agit pour lui de «créer les conditions de l’alternance. «Je considère que ces conditions ne sont pas réunies. Il y a de grandes disparités dans le paysage politique. Il y a un parti important qui a pris de l’avance. Il n’a pas la majorité mais le plus grand nombre de voix et après cela, il y a un kaléidoscope de partis mineurs, 16 partis qui n’ont qu’un seul élu ».
A 86 ans, pense-t-il jouer un rôle politique ? Béji Caïd Essebsi est catégorique. « Pas du tout ! Je n’aspire pas à le faire. Je n’ai pas été candidat à la présidence, ni à l’Assemblée et je vais continuer à ne pas l’être. J’ai fini mes quartiers d'hiver. Mon avenir est derrière moi, mais l’avenir de la Tunisie m’intéresse ». Alors quels sont ses moyens d’action ? « C’est la confiance que j’inspire à ceux qui m’écoutent ».
Certains partis ont préféré gouverner avec Ennahda. Est-ce une bonne chose ? « Moi, je suis contre ce regroupement. Parce que, pratiquement, ils ont la majorité absolue et dans l’exercice de cette majorité, tous les autres partis se trouvent marginalisés. En réalité, on a fait cette Troïka uniquement pour accéder au pouvoir et on s’est désintéressé de la situation ».