Blogs - 06.02.2012

La rupture avec la Syrie : était-ce la bonne solution ?

Irréfléchie, dangereuse, précipitée : l’opposition, comme les syndicats n’ont pas de mots assez durs pour  dénoncer la décision du gouvernement d’expulser l’ambassadeur de Syrie.  Cette prise de position  a surpris une bonne partie de l’opinion publique habituée depuis près de soixante ans à une diplomatie toutes en nuances, peu encline aux réactions tranchées et parfois intempestives.

Pourtant, la réunion à Tunis du Conseil National Syrien en présence du président de la république provisoire et les prises de position inhabituelles sur nos relations avec la France, l’Italie  et même les pays voisins auraient dû leur donner un avant-goût  à la fois du style et des orientations de la nouvelle diplomatie tunisienne.  Exit les interminables circonlocutions chères aux diplomates de carrière. Place au parler-franc, quitte à choquer, quitte à se mettre à dos, nos meilleurs amis. On pourra toujours se dédire et on ne s'en est pas privé ces derniers temps. Voilà pour le style. Quant aux orientations, il n’est plus question de se taire sur les injustices où qu’elles se produisent. Rien de ce qui est humain ne nous sera étranger. Que cela se passe au Kamtchatka ou dans notre voisinage immédiat. Nous serons la conscience du monde. Cela part d’un bon sentiment, mais s'est-on interrogé sur le point de savoir si la Tunisie a vraiment les moyens de cette diplomatie ? S'agissant  de la Syrie est-on sûr d'avoir épuisé toutes les démarches avant d'en arriver là ? Et à supposer que cela soit le cas, il y a un minimum d’usages à respecter en matière de relations internationales et des  étapes à franchir, à commencer par le rapatriement de nos ressortissants, avant de rompre nos relations diplomatiques. Cela n'a pas été fait, alors que nous avons 3000 compatriotes dans ce pays. Et puis, on a beau affectionner le parler franc, il y a des précautions de langage à prendre : on « n’expulse » pas un ambassadeur comme on le fait pour un vulgaire malfaiteur. On le déclare « persona non grata ». Le représentant d’un pays étranger et a fortiori arabe a  droit à certains égards. Une énième maladresse dont on aurait pu faire l'économie, d'autant plus que l'ambassade de Syrie serait actuellement dirigée par un chargé d'affaires, l'ambassadeur ayant quitté son poste depuis plus d'un an. Je comprends mieux aujourd'hui les appréhensions des anciens diplomates tunisiens.

Hédi

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