La triennale de l'éducation : pourquoi la Tunisie a-t-elle boudé la conférence ?
Ouagadougou – Correspondance spéciale pour Leaders - La communauté africaine, venue de tous les horizons, s’est rassemblée du 11 au 18 février, à Ouagadougou au Burkina Faso, pour participer à la triennale de l’éducation organisée par l'Association pour le Développement de l'Education en Afrique (ADEA). Ce rendez-vous est devenu tri-annuel après la dernière biennale organisée à Maputo en 2008.
La dernière session a permis de relever à la fois des progrès importants en matière d’accès à l’éducation mais aussi un manque de maîtrise des compétences critiques et un faible niveau d’aptitude chez les jeunes. Ce constat a orienté les objectifs de la triennale 2012, qui s’est focalisée sur la conception des dispositifs permettant d’améliorer la qualité des systèmes éducatifs qui répondent aux besoins du marché du travail et développer l’économie africaine.
La triennale est avant tout un espace de dialogue et de concertation qui a regroupé plus de 1000 participants venant de plus de 70 pays. Ce forum a vu la présence de 6 chefs d’état, plus de 30 ministres, 40 délégations officielles, des représentants du secteur privé, des agences de développement, des experts de l’éducation, des organisations de la société civile, des jeunes et des autres parties prenantes concernées.
Le thème de la triennale était : Promouvoir les connaissances, compétences et qualifications critiques pour le développement durable de l’Afrique : comment édifier et concevoir une réponse efficace des systèmes d’éducation et de formation ? Ce thème reflète une prise de conscience des véritables défis auxquels sont confrontés les pays africains. En effet, la population africaine se caractérise par sa jeunesse. Elle compte plus de 200 millions de jeunes de 15 à 24 ans qui représentent près du tiers de la population en âge de travail. Aussi, environ trois cinquièmes des chômeurs sont des jeunes dont un nombre d’important des diplômés de l’enseignement supérieur. Cela souligne l’adéquation entre le système éducatif et le marché de l’emploi.
La triennale a permis aux participants de partager leurs expériences pour mettre en place des systèmes d’éducation et des formations qui répondent le mieux aux attentes des jeunes en matière d’emploi et adaptés au contexte démographique et économique pour assurer un développement durable.
Cet évènement était aussi un rendez-vous économique qui mettait en relation les acteurs privés et publics pour présenter leurs produits et services et convenir des modalités de collaboration. En effet, le marché de l’éducation en Afrique se chiffre à plusieurs dizaines de milliards d’euros. Et, rares sont les occasions où il est possible de rencontrer des décideurs, de premier plan, réunis au même endroit, sur une semaine.
Il faut déplorer l’absence inexpliquée des ministres tunisiens qui n'ont cru bon se déplacer. La délégation tunisienne officielle était formée de Zied Hamdi responsable des affaires économiques auprès de l’Ambassade de Tunisie au Mali et Khaled Raouani représentant du ministère de la formation professionnelle qui ont redoublé d’efforts pour combler l’absence d’une délégation plus importante. A l’heure où la Tunisie se tourne vers le marché africain, à l’heure où la situation économique est plus qu’inquiétante et au vu des opportunités qui s’ouvrent à nos entreprises, la présence de responsables de haut grade aurait été la bienvenue. En effet, les ministres avaient un rôle très important pour appuyer les acteurs privés venus présenter des produits purement tunisiens et à forte valeur ajoutée tels que les villages éducatifs de M2A ou les systèmes intelligents d’éducation de PRODIT (deux entreprises qui se développent fortement sur le continent).
Toutefois, il faut relever la forte mobilisation tunisienne pour la triennale avec plus d’une trentaine de participants et près de la moitié du comité d’organisation. Avec une note particulière à Tarek Chehidi qui a joué un rôle important dans la mise en valeur des entreprises et compétences tunisiennes présentes à la triennale. Le sujet de l’éducation est un chantier permanent partout dans le monde. Toutefois, il apparait clairement que la marge d’amélioration reste très importante en Afrique. En Tunisie, nous avons réalisé des progrès très importants et nous avons une certaine avance sur la majorité des pays sub-sahariens. Ne devons-nous pas en profiter pour partager notre savoir faire et exporter nos compétences. Pouvons-nous mettre en place des accords de coopérations interafricains pour faciliter l’embauche de nos diplômés du supérieur dans la formation et l’éducation ? Il est temps pour l’Ifriquia de se tourner vers l’Afrique.
Wassim DAOUD
Pour African Consulting Network