Noureddine Bhiri Ministre de la Justice : La fin des intouchables
Trois fronts sont à la fois prioritaires pour le ministre de la Justice, Noureddine Bhiri. D’abord, renforcer les aspects logistiques et matériels pour permettre aux tribunaux, aux magistrats et aux agents ainsi qu’aux auxiliaires de justice de pouvoir s’acquitter au mieux de leur mission, dans de bonnes conditions qui agréent aux justiciables.
Mais, aussi, toute la réhabilitation des maisons d’arrêt et centres de détention afin de les rendre conformes aux normes internationales et respectueux de la dignité humaine. Ensuite, soumettre à l’Assemblée nationale constituante les divers projets de textes relatifs au Haut Comité de la magistrature et à la révision de nombre de textes rendus obsolètes après la révolution tels que ceux concernant la lutte contre le terrorisme ou la pénalisation sous l’ancien régime des déclarations aux médias étrangers, ou encore ceux devant préciser davantage les conditions et la durée de la garde à vue.
Et, enfin, créer un climat de confiance et de sérénité pour que les magistrats puissent se prononcer en toute indépendance et rendre justice, sans la moindre tutelle ou pression, d’aucune partie que ce soit.
Pour le ministre Bhiri, «c’est cette nouvelle culture de confiance en la justice, de respect de ses décisions et verdicts et de la suprématie de la loi au dessus de tous les pouvoirs et contre-pouvoirs, qui est fondamentale pour marquer la rupture effective avec le régime déchu.
Cette bataille que l’ensemble de la société tunisienne doit livrer ne peut s’accomplir qu’avec le concours des médias qui auront un rôle important à jouer pour expliquer ces enjeux et oeuvrer pour désamorcer les tensions et apaiser les esprits.
Il s’agit surtout de mettre fin à toutes ces campagnes de pression qui s’exercent sur les magistrats et de leur permettre de reprendre confiance en eux-mêmes et de rendre justice, telle qu’ils la conçoivent. Nul ne pouvant se prévaloir d’une quelconque immunité qui le fait échapper à la justice, il s’agit là d’un nouvel esprit qui doit s’ancrer dans la société. Ni vengeance, ni rancune, mais aussi ni complaisance, ni passe-droit : une justice indépendante et équitable, pilier de la démocratie et des libertés ».
Au chapitre des aspects logistiques et moyens humains et financiers, les besoins sont importants. D’abord procéder aux nominations dans de nombreux postes vacants à la tête de tribunaux, chambres et parquets. Il s’agit aussi d’accélérer la réhabilitation des tribunaux endommagés lors des évènements survenus au lendemain de la révolution et d’ouvrir rapidement de nouveaux tribunaux. La promulgation des nouveaux statuts des personnels des tribunaux et ceux des services pénitentiaires et la revalorisation des rémunérations sont non moins urgentes. Tout comme le redéploiement d’un système d’information moderne et performant, la mise en place d’un dispositif permettant l’accélération de la saisie des jugements et la modernisation de l’ensemble des moyens bureautiques et informatiques. Aussi, l’effectif des magistrats sera renforcé par l’ouverture du recrutement, durant l’année en cours, de 120 à 150 nouveaux magistrats.
Le nombre des huissiers de justice et notaires admissibles aux concours sera lui aussi augmenté.
Le nerf de la guerre, pour les aspects logistiques et ressources est sans doute le budget. Les crédits affectés au ministère de la Justice, dans le cadre du budget complémentaire pour l’année 2012, seront augmentés de pas moins de 20%.
En outre, les contributions au titre de l’assistance technique et financière bilatérale et multilatérales fourniront un appoint substantiel qui portera la croissance du budget de l’année 2012 à 30%, voire 40%. «Nous avons pris beaucoup de retard en matière de bâtiments, d’effectifs et de moyens, que nous devons rattraper rapidement pour garantir de bonnes conditions à une justice à la hauteur de nos ambitions après la révolution», affirme Bhiri.