News - 01.05.2012

UGTT : Un discours musclé de Houcine Abbasi

C‘est un discours ferme et déterminé qu’a prononcé le secrétaire général de l’UGTT, Houcine Abbassi, devant des milliers de syndicalistes rassemblés en ce 1er mai, Place M’hammed Ali, avant d’aller défiler avenue Bourguiba. Dénonciation des dérapages enregistrés, refus des cessions, privatisations des médias publics, mainmise sur l’Administration, accaparement des postes et quotas, condamnation des attaques contre l’UGTT, appel à l’augmentation des salaires,  lutte contre la flambée des prix et à la préservation du pouvoir d’achat et défense des droits des travailleurs : les positions de la centrale syndicale sont nettement affirmées. Sur un plan plus politique, l’UGTT appelle à la réconciliation nationale, après justice, interpelle le gouvernement afin qu’il mette fin à son discours «ambigü» et « s’attaque sans hésitation ni atermoiement à l’essentiel » notamment l’emploi et le développement régional équilibré. Elle rappelle à la Constituante qu’elle doit se consacrer à la rédaction de la Constitution et réclame la réactivation de l’ISIE. Aussi, elle exhorte l’opposition et la société civile à rompre avec leur atomisation et négativisme.

Donnant lecture d'un texte écrit qui avait recueilli l’unanimité des membres du bureau exécutif et s’inscrit dans la même lignée que le manifeste publié à la veille de la célébration de la Fête du Travail, Houcine Abbassi entend surtout rappeler que l’UGTT se pose, en dehors de tout alignement partisan, en véritable conscience nationale, dans le droit fil de son engagement militant historique. Extraits du discours.  

 
Réconciliation. « Autant nous tenons à ce que les coupables rendent compte, autant nous sommes partisans de la réconciliation, car nos traditions syndicales s’élèvent au dessus de la revanche et de la vindicte. Nos racines sociales nous imposent de nous attacher au principe du dialogue et du consensus, autant que cela puisse être possible, mais toujours sur la base de la transparence, de la bonne foi et de l’aptitude au dépassement pour le meilleur ».

Le risque d’un automne sombre. « Nous sommes surpris par ce que nous vivons ces derniers temps en incidents de violence semant la peur, d’attaques contre des lieux de culte, des établissement scolaires et universitaires ainsi que des institutions publiques, de ce que nous entendons comme appels pour la privatisations de médias publics, de ce nous enregistrons comme atteintes délibérées contre la liberté de l’information, de harcèlements, violences et menaces contre des journalistes, des hommes de culture, des militants pour les droits de l’homme et autres attaques contre des syndicalistes, leurs locaux et leurs illustres symboles. A cela s’ajoute les tentatives pour s’accaparer la décision, le déni du droit à la différence, d’appétit pour s’approprier les postes de décision sans tenir compte de la compétence et de l’expérience. Autant de dérapages graves et déstabilisants qui risquent de convertir notre printemps prometteur en réforme et délivrance, en un automne sombre, en une anarchie redoutable et un lourd cauchemar».
 
Le seul agenda. « Face à ces développements et ces déviations, nous affirmons aujourd’hui en public, qu’on ne saurait hypothéquer les objectifs de notre révolution et la récupération des sacrifices de nos martyrs et blessés. Nous refusons que tout cela soit mis à profit pour servir des agendas de catégories ou de convictions, étrangères soient-t-elles ou locales. L’unique agenda qu’a tracé la révolution de la liberté et de la dignité est le droit au travail digne, le droit au développement, le droit à la liberté, le droit à l’égalité, le droit à la participation dans la prise de décision. »
 
Détermination. « Nous ne laisserons pas les groupes de la mort, ennemis de la vie, attenter à l’intégrité de nos universités et de nos entreprises, étouffant la joie de nos enfants, s’acharnant sur les créateurs dans les domaines des arts et de la culture. Nous ne nous résignerons pas face à ceux qui accusent leurs compatriotes mécréance, à la ségrégation, la militarisation de la vie publique, l’embrigadement des lieux de culte et d’éducation, incitant à la haine. »
 
Cessions et privatisations. « Nous combattrons toute tentative de cession de nos biens publics, et nous nous opposerons à toute tentative de mainmise sur nos médias publics, comme nous refusons l’asservissement à nouveau de l’Administration pour reproduire de nouvelles forme de despotisme, sous quelque forme que ce soit ».
 
Défendre l’UGTT. « Nous n’accepterons aucune attaque contre notre organisation, atteinte à ces symboles, dénaturation de ses luttes et mise en doute de ses revendications légitimes ».
 
Sous-traitance. « Nul ne saura nous dissuader de combattre l’externalisation, la fragilité de l’emploi, ou nous détourner de la persévérance à améliorer le pouvoir d’achat des travailleurs et défendre le droit syndical sur le lieu du travail ».
 
SMIG et SMAG. « Nous affirmons notre attachement à l’alignement du SMAG sur le SMIG, leur revalorisation et l’augmentation des salaires pour tous, ainsi que l’aboutissement des négociations sociales et l’amélioration du pouvoir d’achat au moment où les prix flambent sans que le gouvernement ne parvienne à mettre en place les mécanismes nécessaires pour les maîtriser ».
 
Accaparation. « Le devoir nous appelle aujourd’hui, gouvernement, partis, organisations et associations à faire prévaloir l’intérêt national du pays, bannir tout esprit d’accaparement et de quota, de mettre de côté les tiraillements idéologiques et de croyances, pour se consacrer à l’accomplissement des objectifs de la révolution et les exigences de la réforme politique et de la transition démocratique ».
 
La Constituante. « A l’Assemblée nationale constituante de se dédier à l’élaboration de la Constitution et que soit réactivée l’instance Supérieure Indépendante pour les Élections. »
 
Le gouvernement. « Au gouvernement de se débarrasser de l’ambiguité et des généralités de son discours déroutant et qu’elle s’attaque sans hésitation ou atermoiement à sa mission première :  la création d’emplois, notamment pour les diplômés, à initier sans retard le développement des régions intérieures par l’intensification de l’investissement, la consolidation de l’infrastructure, à la lutte contre la pauvreté, à l’aménagement des équipements publiques essentielles et de combattre de toute force le phénomène de la contrebande qui menace la sécurité alimentaire et détruit le pouvoir d’achat ».
 
L’opposition. « A l’opposition et les composantes de la société civile d’abandonner leur atomisation et leur négativisme, pour chercher à établir des ponts de communication et de coopération entre elles ainsi qu’avec le gouvernement et l’Assemblée, dans l’intérêt de la Tunisie et de son peuple ».
 
Vigilance. « Nous devons être vigilants pour préserver le printemps de notre révolution de tout chantage, fermer les issues devant les forces de destruction et de la contr- révolution, en les identifiant et démasquant leurs accointances ».