Houssine Labidi est-il indéboulonnable ?
La célébration cette année de la nuit du destin n’a pas ressemblé à ses devancières. Sur deux points au moins : la morosité qui l’a marquée et la présence très remarquée du Cheikh Houssine Labidi, l’imam « dissident » de la Grande-Mosquée (une première en Tunisie !). Un style dépouillé, des causeries sans relief, lues sur un ton monocorde par des cheikhs enturbannés de manière ridicule et des dignitaires religieux à la mine patibulaire, c’est tout ce qu’on peut dire d’une cérémonie exceptionnellement courte marquée par l’absence du mufti et du ministre des affaires religieuses.
Fort heureusement, il y avait Houssine Labidi avec son burnous et son écharpe d’imam entourée autour du cou. Bien que destitué à deux reprises, Il était là, indéboulonnable, trônant en maître de céans dans la grande salle de prière, défiant le pouvoir politique. Il clôt la cérémonie par un discours éminemment politique où il ne manque pas de distribuer les blâmes et les satisfecit. Beau joueur, il rend hommage au chef du gouvernement et au président de l’assemblée constituante. Le plan serré choisi du réalisateur de la télévision ne permet pas de connaître leurs réactions. Mais on les devine mal à l’aise. Ils se seraient bien passés de ces louanges.
Et on les comprend. Car cette présence de Labidi est un véritable camouflet pour le pouvoir . Elle résume à elle seule son incapacité de faire respecter la loi républicaine dans ces espaces de non droit que sont devenues nos mosquées. Il faut se rendre à l’évidence : les déclarations tonitruantes de Noureddine Khademi sur la nécessité de contrôler les lieux de culte relevaient de l’incantation. Allons-nous finir par ressembler à ces pays du Golfe où le pouvoir religieux joue le rôle de contrepoids du pouvoir politique ?