La nouvelle stratégie électorale de Marzouki : marquer sa différence avec Ennahdha
Le temps fort des assises du Congrès pour la République (CPR) tenue tout au long du weekend aura été l’attaque virulente de Moncef Marzouki contre ses alliés d’Ennhadha qu’il a accusés de chercher à accaparer le pouvoir et à contrôler ses rouages administratifs et politiques donnant ainsi le ton à une rentrée politique qui s’annonce fort mouvementée. Sa lettre au congrès de son parti, le CPR, a pris de court les congressistes encore la recherche de leurs forces après tant de dissensions internes et de départs, pour rééditer leur exploit et garantir leur position lors des prochaines élections. La stratégie à adopter est difficile à choisir.
L'arbitrage doit se faire, explique à Leaders un congressiste, entre ceux qui appellent à une plus forte démarcation par rapport à Ennahdha, quitte à dénoncer ses pratiques et à remettre en cause le bilan du gouvernement qu’elle conduit et à ceux qui prônent une plus grande synergie avec le parti avéré les plus fort et le mieux structuré. Il est clair que d’emblée, Marzouki a voulu mettre le congrès devant cette grande question, affirmant clairement son option pour une stratégie offensive, espérant fortement y rallier les congressistes».
Déjà lancé depuis le printemps en campagne électorale, Marzouki essaye de trouver, en toute priorité, le meilleur moyen de conserver la présidence de la République directement à la faveur des urnes, sans être obligé de solliciter l’appui d’Ennahdha. Les sondages lui donnent certes un bon taux de popularité généré par sa forte présence médiatique (surtout lors du premier semestre), ses fréquents déplacements à l’étranger qui lui confèrent une dimension internationale et ses prises de position assez décalées par rapport à la troïka sur certaines questions. Sans confondre notoriété, popularité, populisme et, in fine, ultime vote, les analystes savent que la nature même du régime politique n’ayant pas été encore fixée (présidentiel, parlementaire, aménagé…) et les délais qui nous séparent des prochaines élections risquant de se prolonger, voire même, jusqu’à l’été prochain, tous les calculs risquent de conduire à de fausses spéculations.
Une seule donnée compte : la puissance de la machine à gagner les élections, c'est-à-dire la taille du parti, l’étendue de son implantation dans le pays, la qualité de ses militants de base et dirigeants, la pertinence de son programme et… l’abondance de ses finances.
Conscient de ces enjeux, Marzouki a –t-il voulu prendre un raccourci pouvant lui permettre de reprendre en main son parti et de rallier en sa faveur une bonne frange de l’opinion publique, cherchant à s’imposer, sinon en recours, du moins en partenaire-clé incontournable ? Pour le moment, sa marge de manœuvre peut paraître large, tant Ennahdha est attaché à la troïka, réitérant officiellement son « respect au président Marzouki, le militant des droits de l’Homme, le chef de l’Etat et le partenaire ». Sauf qu’en politique, l’équilibre des forces n’est jamais figé. Dans un sens comme dans un autre. La nouvelle saison politique qui commence à peine nous réserve sans doute plein de surprises. En tout cas, M. Marzouki aura prouvé s'il en était besoin qu'il ne pensait pas à cette élection seulement en se rasant le matin. Plus qu'une idée fixe, c'est une monomanie